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Full text of "La cryptographie: ou, L'art d'écrire en chiffres"

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LES SECRETS M NOS PKtGS 

CRYPTOGRAPHIE 

L'kRT D'ÉCRIRE EU CHIFFRES. 



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TARIS.— IMP. SIXOH hAÇON ET COUP., RUB D^eRFURTBf 1. 



LES SECRETS DE NOS PÈRES 

«RCVEILLIS 

PAR LE BIBLIOPHILE JACOB-qS^mC 

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CRYPTOGRAPHIE 



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I/ART D'ÉCRIRE EN CHIFFRES 









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PARIS 

ADOLPHE DtLAHAYS, LIBRAIRE-ÉDITELII 

4^, BUK VOLT&IHE, 4-6 
1858 



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nARlS.— IMP. SIVOH RAÇON ET COHP., RUB D^ERFURTBf 1. 



LES SECRETS D E NOS PÈRES 



«ECCEILLIS 

PAR m BIBLIOPHILE JAGOB0& 



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CRYPTOGRAPHIE 



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L'ART D'ÉCRIRE EN CHIFFRES 



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PARIS 

ADOLPHE DELAHAYS, LIBRAIRE-ÉDITEIU 

4-6, RU£ VOLT&lhE, 4-6 

1858 





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Cryptographie 

L'MIT D'fCRWE EN CHIFFRES. 






CHAPITRE PREMIER. 

DÉPINITIOir DE LA CRYPTOGRAPHIE; SON ORIGINE; 
NOTIONS niSTORIQOES. 

Nous alloua essayer de faire coiinaître 
quelques-uns des procédés mis en usage 
afin de permettre à des personnes séparées 
par des distanûes souvent c<»isidérables, 
de communiquer entre elles, en recouvrant 




423216 ' 



ces communications du voile du mystère. 

Ces procédés forment une véritable 
science qui a reçu, comme tant d'autres, 
un nom tiré du grec. 

La Cryptographie ou Stéganographie est 
Tari d^écrire de façon à dérober h autrui 
la connaissance de ce qu'on a tracé. 

On peut s'efforcer de dissimuler l'exis- 
tence de récrit. On emploie, en ce but, 
les encres de sympathie dont nous parle- 
rons plus tard, ou bien l'on tâche de cacher 
soigneusement le papier auquel ou a 
confié son secret. 

Miiis plus habituellement on a recours 
aui divers procédés en usage afin de jeter, 
sur une dépèche qui peut tomber dans des 
mains indiscrètes, un voile qu'on faft de 
son mieux pour rendre impénétrable. 

Pour atteindre ce but : 

On abrège les mots d'après un système 
convenu (c'est la Brachygraphîe ou Sténo- 
graphie). 



•"-^- - - - - -- — — — — ^ 



ëN COiFFRES. :î 

On fait usage des sigois dont le sen» 
est arrêté entre les correspondants : des 
lettres, des chiffres, des signes employés 
dans les mathématiques et dans la chimie, 
des points, des lignes, des figures queU 
conques ou de fantaisie, des couleurs, etc.^ 
sont d^une grande ressource en semblable 
occasion. 

On emploie des mots et des phrases, aux- 
quels on convient de donner un sens tout 
autre que celui qu'on y attache dans le 
cours ot\iinuire des choses. 

11 y a toujours eu, il y aura toujours 
des secrets, qu'il faudra bien confier au 
papier «fm de les transmettre à des cor- 
respondants dont on est séparé par des 
distances plus ou moins grandes ; mais on 
est bien aise de dérober imx investiga- 
tions d'une curiosité indiscrète ces com^ 
munications mystérieuses. 

Il a donc f^llu recourir à des moyens 
destinés à voiler le sens des avis qu'on 



 l Mit t) ÉCRinË 

voûtait transmettre. De là l'origine de Pé- 
criture en chiffres. 

De même que tous les arts, celui-ci 
débute par des essais naïfs et incomplets. 
Les écrivains de l'antiquité en ont con- 
servé le souvenir. 

§1". 

De la Cryptographie chez les peuples de l'antiquité. 

Hérodote nous fait connaître divers pro- 
cédés un peu primitifs auxquels eurent 
recours, faute de mieux, certains per- 
sonnages plus ou moins célèbres dans les 
annales de ces temps reculés. 

C'est d'abord un esclave dont on rase la 
tête, et sur la peau nue de son crâne on 
trace quelques mots laconiques, mais d'un 
grand sens. On laisse aux cheveux le 
temps de repousser, et on expédie cette 
épitre d'un nouveau genre à l'ami qu'il 



EN CHIFFRES. S 

8*agit d'instruire de choses importantes. 
Les perruques n^aYuient point été inTontées 
h cette époque; elles auraient été d'une 
grande utilité en pareille circonstance. Il 
Ta sans dire qu'un pareil procédé n*est 
point susceptible d'une application fré-> 
quente. 

Un seigneur de la Cour de Perse, ayant 
à transmettre à Gyrus uh avis essentiel, 
s'avisa d'une invention qui ne rentre pas 
précisément dans récriture chiffrée, mais 
qu'il estbon. de consigner ici; laissons par- 
ler Hérodote : 

« Harp'jge voulut découvrir à Gyrus 
« son projet, mais, comme ce prince était 
< en Perse et que les chemins étaient gar- 
« dés, il ne put trouver, pour lui en faire 
« part, d'autre expédient que celui-ci: 
« S'étant fait apporter un lièvre, il ouvrit 
« le ventre de cet animal d'une manière 

adroite et sans arracher le poil, et, dans 



« 



« l'état où il était, il y mit une lettre où 



6 l'art d'écrire 

« il arait écrit ce qu*il avait jugé à pro- 
f pos. L^ayant ensuite recousu, il le reifiit 
« à celui de ses domestiques en qui il 
«r avait le plus de confiance, et lui or- 
• donna de le porter h Gyrus, et de lui 
« dire, en le lui présentant, de Touvrir 
« lui-même et sans témoins. • 

9 11. 

La scytale des Lacédémonieus- 

Le gouvernement de Sparte transmettait 
ses ordres à ses généraux au moyen d^une 
espèce de courroie. Voici de quelle façon 
Plutarque raconte le fait dans la vie de 
Lysandre; nous faisons usage de la traduc- 
tion naïve du vieil Amyot : 

< Les épiiores luy envoyèrent inconti- 
«c nent ce qu'ilz appellent la scytale 
« (comme qui diroit la courroye), par la- 
« quelle ilz luy mandèrent qu'il eust à 
K s'en retourner aussitost comme il Tau- 



EK CHIFFRES. 7 

• roit reçue. Cette scytale est une (elle 

« chose : quand les éphores enToient à la 

< guerre un général ou un adnural, ilz 
« font accpustrer deux petits bfttous ronds 

< et les fi^nt entièrement égaler en gro»« 
« seur et en grandeur; desquels deux 
i bastonsilz en retiennent Tun par devers 

< eutx et donnent Tautre à celuy qu*ilz 

< enToyent. Hz appellent ces dc«x petits 
« bastons scytaies, et, quand ilz veulent 

< faire srcrMement entendre quelque 
« chose de conséquence k leurs capitaines, 
« ilz prennent un bandeau de' parchemin 
« long et étroit comme une courroye, 
« qu'ilz entortillent à Tentour de leur 
« baston rond, sans laisser rien d*espace 
« Yuide entre les bords du bandeau; puis 
« quand ilz sont ainsi bien joints, alors 
« ilz escrivent sur le parchemin ainsi en- 
« roUé ce qu'ils veulent, et, quand ili ont 
« achevé d'eserire, ilz desveloppent le 
tf parchemin et Tenvoyent à leur capi- 



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. V •«-«.__.. <L-'»Ai«ft.«r"^_' 



« taine, lequel n'y sçauroit aultrement 
« rien lire n; cognoistre, parce que les 
« lettres n'ont point de suitte ny de liaison 
« continuée, mais sont escartées Tune ça, 
« l'autre là, jusqu'àce que, prenant le petit 
« rouleau de bois qu'on luy a baillé à 
« son partement, il estend la courroye de 
« parchemin qu'il a reçue tout à l'entour, 
«( tellement que le tour et le ply du par- 
« chemin venant à se retrouver en la 
« mesmc couche qu'il avoit esté plié pre^ 
« mièrement, les lettres aussi viennent à 
f se rencoiitrer en la suitte continuée qu'el- 
« les doivent estre. Ce petit rouleau de 
« parchemin s'appelle aussi bien scytale 
u comme le rouleau de bois, ne plus ne 
i moins que nous voyons ailleurs ordi- 
« nai rement que la chose mesurée s'ap» 
« pelle du mesme nom que fait celle qui 
«1 mesure. » 

Un poëte latin donne une application 
copfoime à celle de Plutarque; transcii- 



EM CUIFFEE6. ' 

voDs ici les cinq vers qui s^accordent avec 
le récit du biographe grec : . 

Vel Lacedemoniano scytaleiri imiUref libelli 
Segmina Pergamei, tereti oircumdaUi ligno 
Perpétue iriscribeos versu : qui deinde solutus 
Non respoùdeutes sparso dédit ordine formas : 
Douée consiinilis ligni replicetur in orbem. 

Nous ferons remarquer, en passant, que 
la scytale ne devait pas âtre bien difficile 
à deviner. En effet, il était aisé de voir 
en tâtonnant un peu, quelle était la ligne^ 
qui devait se joindre pour le sens à la U* 
gno d'en bas du papier; cette seconde li-> 
gne connue, tout le resté était aisé à 
trouver : en supposant que cette seconde 
ligne, suite immédiate de la première dans 
le sens, fût, par exemple, la cinquième, 
il n'y avait qu'h aller de là à la neuvième, 
à la treizième, à la dix-septième, et ainsi 
de suite jusqu'au bout, et Ton trouvait 
toute la première ligne du rouleau En- 
suite on n'avait qu'à reprendre la seconde 



10 l'art u* écrire 

ligne #en bas, puis la sixième, la dixième, 
la quatorzième, et ainsi de suite. Tout 
cela est aisé à voir, en considérant qu*une 
ligne écrite sur le rouleau devait être 
formée par des lignes partielles é^lement 
distantes les une£^ des autres. 

Un autre Lacédémonien, réfugie auprès 
du monarque de l'Asie, trouva dans son 
patriotisme les moyens de transmettre à 
Sparte un avis de la plus haute impor- 
tance. C'est encore Thistorien que nous 
avons déjà nommé qui va nous raconter 
ce fait. Laissons parler Hérodote : 

• Xerxès s^étant déterminé à faire la 
« guerre aux Grecs, Démocrate, qui était 
« à Suse, et qui fut inrormé de ses des- 
« seins, voulut en faire part aux Lacédé- 
« moniens. Mais, comme les moyens lui 
« manquaient, parce qu'il était à craindre 
a qu'on ne le découvrit, il imagina cet 
« artifice. 11 prit des tablettes doubles, en 
« ratissa la cire, et écrivit ensuite sur le 



KK CUlPFftSS. il 

« bois de' cet tablettes les projets du roi. 

« Après cela, il oouyritde dre les lettres, 

« afin que, ces tablettes n'étant point 

« écrites, il ne pût arriver au porteur rien 

« de fâcheux de la part de ceux qui gar- 

a datent les passages. L*6nToyé de Démo- 

c crate les ayant rendues aux Lacédémo- 

i niens, ils ne pwent d*abord former 

« aucune conjecture; mais Gorgo, femme 

• de Léonidas, imagina, dit-on, ce que ce 

ir pouvait être et leur apprit qu^en enle- 

« vaut la .cire ils trouveraient des carac- 

« tëres sur le bois. On suivit .«on conseil, 

« et les caractères furent trouvés. Les 

« Lacédcmoniens lurent ces lettres et les 

« envoyèrent ensuite au reste dés Grecs. ■ 

glu. 

Auiitis systèmes cryplographiques conuus des anciens. 

Biaise de Vigenère, dans son Traité des 
ehiffT$$, livre dont nous aurons à parler 



^ . _ ' » 



li LABT h ECRIRE 

en détail, mentionne quelques-uns des 
procédés qu'avaient imaginés les anciens 
et dont nous venons de fournir des exem* 
pies: 

« Il y en a qui font une incision dans 
« une verge de saulx, estant en sèv» dessus 
« Tarbro encore, et la creusent, puis, y 
« ayant inséré les lettres, la laissent re- 
« prendre et reclorre, et coupent la verge. 
« C'est de Tinvention de Théophraste , 
« non des plus spirituelles pour un si 
« subtil philosophe, joint que .cela a be- 
ff soin do temps, et si la cicatrice y de- 
« meure empreinte tousjours. Le mesme 
« se peut effectuer et encore plus corn- 
a modément dans un baston de torche en 
fl semblable bois de sapin creusé, puis 
« enduire la fente avec de la sciure fort 
« subtile et sassée, de la mesme estoITc 
« destrempée avec de la colle blanche : 
« de quoy il semble Qu'usa Brutus eu 
« allant h Delphe&v comme le marque 



it^ CttlFFllES. i% 

a Tite-tive à la fin du premier livre. Et 

« en un autre endroit de la quatrième 

« Décade, Polycrate et Oiognète enfer- 

« mèrent .un brief de plomb dans une 

« tourte. Il y en a qui enferment leurs 

« lettreis dans un caillou artificiel faict de 

« ceste sorte : On prend des cailloux de 

< rivière qu*on faict calciner et réduire en 

« poudre passée par un subtil tarais. 

« Puis on rincorpore avec sa quarte par- 

« tie de résine fondue et une de poix, 

« meslant bien le tout avec un baston, et 

c estant cette composition encore chaulde 

a et par conséquent molle, enveloppant 

« la lettre dedans, façonnant le caillou 

« devant le feu à«>tout les mains trem- 

« pées en eau tiède, de la sorte que bon 

« leur semble; cela faict, on le laisse se- 

« cher. 9 

Les Romains empruntèrent à la Grèce 
toutes les connaissances qu'elle possédait, 
mais ils les perfectionnèrent. César em- 



ii l*AltT b'écRlUE 

ployait pour sa correspondance secrète une 
méthode que nous aurons occasion de faire 
connaître plus tard, et qiu aujourd'hui 
n arrêterait pas longtemps le plus novice 
des décfaiffreurs. 

On a attribué à TuUius Tiron, affranchi 
de Gicéron, Tinvention de la méthode d'é- 
dire en notes tachy graphiques, et on leur 
a même dogné le nom de Notes iirimien' 
nés; mais cet art était déjà conuu des 
Grecs. Tiron a seuieineut le mérite très- 
réel d'avoir augmenté le nombre des . ignés 
et de les avoir distribués dans un meilleur 
onlre. Sa méthode» perfectionnée par Sè- 
nèque et d'autres, s'étendit daus tout 
l'empire. On s'en est servi pour les actes 
publics, en AllenHigne, jusqu'à la lin du 
dixième siècle; la France y avait renoncé 
un peu plus tôt. C'est de là que les offi* 
ciers publics chargés de la transcription 
des actes ont reçu le nom de notaires, 
qu'ils conservent encore. En cessant de 



faire usage des notes tironiennes, on en 
oublia la signification. Quelques savants 
ont entrepris à cet égard des travaux im- 
portants; citons surtout YAlphabetum ti- 
ronianum du bénédictin Dom Garpentit'i* 
(PariSfilAl, in-fol.); on peut recourir éga- 
lement au Nouveau Traité de diploma- 
tique de D. D. Tassin et Thuilier, ainsi 
qu'au Dictionnaire diplomatique de Doin 
de Vaines Ln ouviage de J. Gruter, Ty- 
ronlt ac Senecx no/« (1605, in-folio), 
présente plu:>icurs milliers-de ces notes ; 
chacune d elles ciprimeun mot différent; 
les tmils, les lignes, les points dont elles 
se composent, devaient exposer h bien 
des méprises, à moins qu'on n'écrivit avec 
beaucoup de lenteur et d'attention, et nul 
doute que pareille écriture ne fût d'un 
emploi très'incommode. 

Nous copions cinq notes tironiennes 
prises au hasard; elles sontuu échantillon 
fidèle de cette méthode sténograpbiqve. 



16 L'ARt D'éOUIRE 

ri. Glemens. 
^, Mars. 
*/^ Legilimus. 
^^. Imperator. 
^^.^ Patres conscripti. 

Au neuvième siècle, Raban-Maur, ar- 
chevêque de Mayeucc, a rapporté deux 
exemples d'un chiffre dont les Bénédiclins 
font connattpe la clef dans leur grand 
Traité de diplomatique. Dans le premier 
exemple, on supprime. les voyelles et on 
les remplace par des signes convenus; Vi 
est désigne par un point, Va par deux, Ve 
par trois, Vo par quatre, Vu par cinq, de 
telle sorte que, pour écrire : 

Incipitversu sBonifaciia rchi. ghrio^ 

sique martyrii» 

On mettra . 

.Nc.p.l vtfsirs B::!i.f:c.. :reh.gl::r.::s.<jx 
iiii:rt r.s 

Dans le second exemple, on substitue 



JtJLLJ^ll*— il 



J 



h cliaque voyelle la lettre suivante. Toute- 
fois les coosoones b^ f, 4, p, x, qui, dans 
ce système, liennent lieu de voyelles, con- 
servent aussi leur valeur. 

g IV. 
Le chif.'i-e chez les modernes. AMcdoies. 

Nous sommes peu disposé k-ajouter fol 
h TasserlioB d*un vieil historien, diaprés 
lequel le fondateur plus ou moins fabu- 
leux de la monarchie française aurait été 
versé dans les mystères de la Cryptogra- 
phie. 

i Pharamond , très- puissant roy des 
t François en Germanie, -et quarante-troi- 
'4 sième après Ma rcovir , lorsque par grande 
« puissance il marchoit sur les limites des 
M Gaules, afin que secrètement il eserivist 
<( de ses afTaires, a^usti pour ses secrets 
« des minuties ptTégrines et estranges. » 



18 L'ARt D'éCRlKE 

Le moyen âge présente peu d^exempies 
de récriture eu dHffres; mais, dès l'époque 
de ia Renaissance, la nécessité de moyens 
occultes de communication se fait de plus 
en plus sentir au milieu des intrigues di- 
plomatiques qui se croisent en tous sens. 
Divers auteurs composent sur pareil sujet 
de trfts-gros livres; des éditions multi- 
pliées attestent T utilité de pareils écrits, 
et chacun s*efforce de découvrir les 
moy<^s de rendre impuissants tous les 
efforts des investigateurs. 

Au dix-septième siècle, les monarques, 
les ministres, les ambassadeurs, font con- 
stamment, du chiffre, un usage qui n'a cessé 
de s^étendre et de se perfectionner jusqu'à 
nos jours. 

Les dépèches chiffrées qui se sont 
amoncelées en quantité immense durant 
cette période n'ont point été, la chose va 
sans dire^ livrées à la publiâté; elles sont 
restées ensevelies dans les archives secrètes 



des chancelleries; on peut toutefois ren^ 
contrer, dans des recueils de documents 
éloignés de Tépoque contemporaine, dîfers 
exemples de l'emploi de la Cryptographie, 
divulgués par )a Toie de Timprcssion. 

La correspondance imprimée d'un érudit 
célèbre qui exerça d'importantes fonctions 
diplomatiques, 11. Grotius, présente divers 
passages écrits en chiffres. Empruntons 
quelques lignes h une dépéch« adressée au 
chancelier de Suède, Oxenstiern, dépêche 
qu'on lit dans l'édition d'Amsterdam (1687, 
in-folio) des Epistolx H. Groliù 

« Is de quo scripseram 60» 57, 8f , 73, 
< nomen hahens, 80, 60, 74, 20, 70, 6. 
« 10, 72, 66, 81, 47, 31, 10, 33, 66, 
<( U, 106, 10, 35, 3], 217, 246, ah Eu- 
« sebioVindiceque auditus.... Egit pluri- 
« mura cum 79, 59, 76, 72, 13, 42. » 
" Henri IVftisait parfois usage d'un chiffre 
qui ne paraît pas avoir été fort compliqué; 
sa Correspondance inédite avec Maurice 



te Savant, landgrave de Messe, publiée 
par M. de Rommel (Paris,! 840»8') , en offre 
plusieurs exemples, citons quelques lignes : 
« Je vous assure que je lais grand es- 
time de leur amitié 67, 69, 68, 62, 
- 74, 74. 18, 65, 49. 14, 16, 49, 19, 
« 31, 42, 15, 58 en est rentremetleur. 

« Je suis advcrly que 55, 52, 21, 84, 
« 49, 27, 55 » 

Quelques chiffres sont surmontés d'un 
trait ou du deux points; des Ictires grec- 
ques et divtrs signes employés par les 
chimistes et les astronomes se mêlent aux 
chiffres. L'éditeur a reproduit le tout, sans 
chercher à découvrir ce que cachait un 
voiie qu'il aurait dû s'efforcer de soulever. 

Mentionnons, d'après la Biographie unù 
verselle, une anecdote qui se rattache à 
répoque dont nous parlons : 

A la fm du seizième siècle, les Espagn&ls 
voulurent établir des relations entre les 
membres épars de leur vaste monarchie, 



£K CUiFFRES. 91 

(^i embrassait i\w& une grande partie de 
riialiei les Pays-Bas, les Philippines, et 
d^'rainenses contrées dans le NouTeau- 
Monde; car ib afaient le plus grand inté- 
rêt à ce que leurs ceromumcations ne pufr- 
seui être découvertes : ils imaginèrent un 
chiffire qu'ils variaient de temps en temps, 
afin de déconcerter tous ceux qui avaient 
tenté de percer les mystères de leurs corres- 
pondances. Ce chiffre, composé de plus de 
cinquante signes, leur fut d'aune grande 
utilité pendant les troubles de la Ligue et 
les gueiTCs qui décolèrent alors TEurope. 
Queiques'unes de ces dépêches ayant été 
interceptées, Henri IV les remit à un géo- 
mètre habile, Viete, en le chargeant d^en 
trouver la clef. Le mathématicien y réussit, 
et il parvint même à saisir le chiffre dans 
toutes ses variations. La France profita 
pendant deux ans de cette découverte. La 
Cour d'fitpagne, déconcertée, accusa le 
gooTemement français d'avoir h ses ordres 



9i LART d'Écrire 

des sorciers et de recourir au diable afin 
d'obtenir la révélation des secrets crypto- 
graphiques. Elle demanda que Viete fût 
jugé comme un négromant : elle porta ses 
plaintes à Rome. Une prétention aussi ri* 
dicule n'excita que le rire; le géomètre 
aurait pu cependant avoir des tracasseries 
sérieuses, s'il n'eût été, en cette affaire, 
soutenu par un puissant monarque; toute 
accusation de sorcellerie pouvait, en 1500, 
avoirdes conséquences extrêmement graves. 

L'histoire conserve le souvenir de di- 
verses anecdotes dont l'emploi des chiffres 
a été la cause; nous allons en relater 
quelques-unes : 

Dans le cours des longues négociations 
qui firent durer pendant tant d'années le 
Congrès de Westphah'e, les plénipoten- 
tiaires de diverses puissances demandèrent 
à connaître les propositions que faisait 
l'Empereur d'Allemagne concernant cer- 
tains points en litige; son ambassadeur, 



EN CUIFFKEf. tS 

Isaac Volttnar, t'excusa de ne pouvoir les 
communiquer, en alléguant qu^el les étaient 
écrites en chiffres et qu^l lui fallait trois 
semaines pour en avoir la clef. Cette ré- 
ponse excita un mécontentement général, 
et renvoyé du duc de Savoie s'écria: 
« N'avons^ous point paraii nous le nonce 
du Pape, et a'est-il pas certain que le Saint* 
Père a dans ses mains la clef qui lie et qui 
délie? {clavem Hgandi et solvendi). 
Adressons-nous donc à lui, afin qu'il nous 
donne la clef qui est si nécessaire en 
ce moment. » 

Une autre ci rconstance originale se montra 
au conunencementdu dix-huitième siècle: 

L'électeur de Brandebourg, Frédéric III, 
avait formé le projet de s'élever au rang 
des têtes couronnées et de convertir en 
royaume son duché de Prusse, 11 était 
presque impossible que ce projet pût s'ef- 
fectuer sans l'assentiment de l'ËmpenBur 
d'Allemagne, auzerain du Corps germani- 



« » 



il LART b EGRIBE 

que. Des Begociations furent donc ouvertes 
à Vienne : elles 8*y traînèrent des années 
entières; des difficultés nombreuses s'op- 
posaient à raccoinplissement des voeux de 
rËlecteur. Son ministre auprès de la cour 
d'Autriche, le baron de BartholoH, se ser- 
vait, pour sa correspondance, d*un chiflre 
dans lequel chaque lettre de Talphabel 
était représentée par un nombre convenu; 
d'autres nombres exprimaient des noms 
de personnes ou de lieux. 

Cette nomenclature comprenait, entre 
autres personnages, un jésuite, le père 
Wolf, qui avait accompagné à Berlin Tam- 
bassadeur d'Autriche, en qualité de cha- 
pelain, et qui se livrait avec activité à 
des intrigues politiques. 

Le nombre 24 signifiait rÉtecteur, 
110 TEmpereur, 116 le père Wolf. 

Barthololi écrivit, un jour, deVienne,que, 
pour fiûre avancer TafTaire, il était indis- 
pensable que 34 (I^ÉIecteur) adressât une 



y#Ml|<— M il |l,l« 



EN CHIFFRES. SX 

lellre autographe à 110 (rEmperaar). 

Le de ce dernier nombre, étant trace 
à la hâte, fut pris pour un 6, et l*on en 
conckit à Berlin qu il fallait que TÉlecteur 
éerÎTÎt de sa main au père Wolf. 

Frédéric II! n'hésita point, et» bien que 
cette démarche pût lui paraître étrange et 
jqu'elle choquât son orgueil, il adressa de 
suite au père Wolf une longue épitre écrite 
en entier de sa main et dans laquellp, ex- 
pliquant, justifiant ses projets, il s'eiTor- 
çait d'obtenir l'appui du bon père, auquel il 
prodiguait les compliments ctles promesses. 

Le jésuite fut aussi surpris que flatté de 
recevoir une pareille communication : elle 
le décida â ne rien épargner pour faire 
réussir les mes du prince qui venait ainsi 
se mettre sous sa protection; il s'adressa 
au confesseur de l'Empereur; des lettres 
allèrent k Rome trouver le général de 
la puissante société; bientôt tous les ob- 
stacles qui s'étaient jusqu'alors accumulés 



26 l'abt d'ëgairc 

s'aplanirent, et, grâce k cette méprise 
fortuite dans une dépêche diiffrée, grâce 
à ce qui parut transformé en un 6, TË- 
lecteur obtint de la cour de Vienne ce 
que peut-être, sans cet incident» elle lui 
aurait toujours refusé. Autre chapitre a 
joindre à la piquante histoire des très-pe- 
tites causes qui amènent de grands éfé< 
nements. 

§.V. 

Cartes mystérieuses de M. de Vergennes. 

Sous le règne de Louis XV et de 
Louis XVI, récriture chiffrée devint de 
plus en plus llndispensable auxiliaire de 
la diplomatie; les divers cabinets de TËu- 
rope, engagés dans une interminable com- 
plication d'intrigues politiques, s'effor- 
çaient mutuellement de se dérober leurs 
secrets. On enlevait les courriers, on cor- 
rompait à force d'or les employés de,s 



EN CHIFFRES. 87 

diancelleries. Afin de résister aux tenta- 
tives d'une curiosité aussi irritée, il fallut 
inventer des raffinements cryptographiques 
de plus en plus mystérieux. 

Le comte de Vergennes, ministre des 
affaires étrangères sous Louis XVI, faisait 
usage, dans ses relations avec, les agents 
d^lomatiques de la France, de procédés 
occultes, dont un Allemand, J. F. Opitz, 
avait, dit-on, été Tinventeur. Ce chiffre 
était employé dans les lettres de recom- 
mandation ou dans les passeports qu'on 
donnait aux étrangers qui se rendaient en 
France ; il servait à fournir, sur eux et à 
leur insu, des renseignements dont ils 
étaient eux-mêmes porteurs sans le soup- 
çonner le moins du monde. La patrie, 
Tâge, la religion, la profession, le carac- 
tère, les vertus et les vices, le signalement 
du -pep'sonnage qu'on désignait ainsi au 
ministre, les motifs de son voyage, tous 
ces détails et bien d'uutres encore se trou- 



* . . * » 



28 LART D ECRIRE 

vaient indiqués sur une simple cai*te oîi 
rien ne sollicitait Tattention des profanes 
qui n*otaient point initiés h de pareils 
mystères. 

Entrons 5 ce sujet dans quelques parti- 
cularités : 

La couleur de la carte désignait la pa- 
trie de Tétranger. Le blanc était affecté 
au Portugal, le rouge à T Espagne, le 
jaune à rÀngleterre, le vert k la Hollande, 
le blanc et le jaune h Venise, rouge et 
vert â hi Suisse, rouge et blanc aux Ëtats 
de l'Église, vert et jaune à la Suède, vert 
et rouge h la Turquie, vert et blanc à la 
Russie, etc. 

L'âge du porteur était exprimé par la 
forme de la carte. Si elle étiit circulaire, 
c'était l'indice qu'il avait moins de vingt- 
cinq ans; de 25 à 30, ovale; de 50 à 45, 
la carte était octogone ; de 45 à 50, elle 
était hexagone; de 55 k 60, c'était un carré; 
au-dessus de 60, un carré loni;. 



%r**"'9i«M»^>^»«9MBe'^vs«s 



£fi ClttFFJlES. SU 

Deux lignes placées au-dessous du nom 
du porteur de la carte indiquaient sa taille. 
S'il était grand et maigre, les JJgnes étaient 
ondoyantes et parallèles; grand et gros, 
elles se rapprochaient Tune de Tautre; une 
stiture moyenne et petite se trouvait si- 
gnalée par des lignes droites ou courbes 
placées à des distances plus ou moins 
éloignées. 

l/cxpression de la physionomie était in- 
diquée au moyen de la figure d'une fleur 
placée dans la bonlure qui entourait la 
carte. Une rose désignait une physionomie 
ouverte et aimable, une tulipe exprimait 
un air pensif et distingué. 

Un ruban était entortillé autour de la 
bordure, et, selon qu'il descendait plus ou 
moins bas, il faisait savoir si le recom- 
mandé était célibataire, marié ou veuf. 

Des }:oints placés également dans la bor- 
dure révélaient la position de fortune. 

La religion du personnage, qn'on signa* 



30 i/arî décrire 

lait de la sorte, était indiquée au moyen 
d'un «igné de ponctuation placé après son 
nom. S'il était catholique, on mettait on 
point; luthérien, un point et une virgule; 
calviniste, une virgule; jnif, un trait d'u- 
nion. S'il passait pour athée, on ne mettait 
aucun signe. 

Des points placés au-dessus, au-dessous 
ou à coté de quelques-mots, de petits signes 
rais dans les angles de la carte, dans le 
genre de ceux-ci : 

. M§§§. ^■'"^". s-Xi-e-r;, 

et qui pouvaient passer pour de simples 
ornements sans conséquence, indiquaient 
les qualités, les défauts, l'instruction du 
porteur de la carte« En y jetant un coup 
d'œil, le ministre apprenait en une mi- 
nute, aussi hien qu^il Teût fait e« lisant 
une page entière de raisonnements, si 
rindividu auquel on avait remis pareil 
billet, était joueur, vicieux ou duelliste ; 



EN CHIFFRES. %\ 

sSl venait en France pour se marier, pour 
recueilKr une succession ou pour se livrer 
h rétude ; s'il était médeciir, journaliste, 
homme de lettres; s'il méritait d'être sou- 
mis b une surveillance, ou bien s'il ne de- 
vait inspirer aucun soupçon. Rien ne pou- 
vait faire soupçonner qu'il y eût autant de 
secrets dans un simple billet de l'aspect le 
plus inofTensif, et conçu, par exemple en 
ces termes : 

ALPHONSE B'ANGEHA 

recommandé à monsieur 

le comte de Yergennes par le marquis 

de Puysegur, ambassadeur de France 

à la cour de Lisbonne. 

Mais les lignes placées au-dessous du nom 
du porteur, les signes de ponctuation, les 
ornements très-peu multipliés jetés dans 
les coins de la carte, étaient gros de ré- 
vélations que nul n'aurait soupçonnées. 
Tout ceci est d'ailleurs raconté beaucoup 



ùi ]/àRÎ D^BCRlrtK 

plus longuement que nous ne devons le 
faire, dans une brochure devenue fort 
rare et imprimée en langue allemande 
vers 1793. Elle a pour titre : « Correspon- 
dance de la police secrète du comte de 
Yergennos, ministre de Tinfortuné roi 
Louis XVI. » 

§ Vi. 
La Cryptographie au dix-neuvièinc «ècle.* 

Les grands événements dont l'Europe a 
été le théâtre depuis une soixantaine 
d'années, ont fait sentir de plus en plus 
Tutilité de récriture chiffrée. 

Dans le cours des opérations militaires, 
les ordres, les dépêches, sont Uès-frcquem- 
ment interceptés ; il peut en résulter les 
conséquences les plus grave?. L'ennemi 
apprend de la sorte des choses qu'il est 
d'un intérêt immense de lui tenir cachées : 
si le sens des lettres dont il s'empare est 



EM CHIFFRES. 53 

caché sous un mystère qu'il ne peut per« 
eer, il n'a plus entre les mains qu*un 
chiffon de papier qui ne lui est d'aucun 
secours. 

Quelques lettres de l'empereur Napo- 
léon, écrites dans le cours de ses campa- 
gnes et publiées dans divers ouvrages bis- 
toriques, montrent que deux chifTres, le 
grand et le petit, étaient en usage parmi 
les généraux français pour correspondre 
entre eux et avec Tétat-major général. 
D'un autre côté, il est certain que beaucoup 
de dépêches importantes n*ont jamais été 
chiffrées. L'HiUoire de la guerre de 
la Péninsule^ par le colonel anglais Na- 
piér, renferme un grand nombre de let- 
tres écrites par le roi Joseph, par des 
maréchaux, par des ambassadeurs, par le 
ministre de la guerre à Paris ; ces lettres, 
remplies de détails importants, furent in- 
terceptées par les guérillas et saisies avec 
les voitures de la cour lors de la bataille 

3 



Si L*ART d'Écrire 

de Vitoria. Si on avait eu la précaution 
de les mettre à Tabri sous un procède 
cryptographique habilement choisi , elles 
n'auraient jamais figuré à la suite des ré- 
cits d'un adversaire des armées françaises. 

Nul doute qu'à Theure actuelle les 
diplomates n'aient encore, pour leurs com- 
munications les plus intimes et les plus 
secrètes, recours h Tart du chiffre. Nous 
ne saurions dire quels sont maintenant les 
systèmes qui obtiennent la préférence, 
mais nous pensons qu'ils ne s'imitent pas 
de ceux dont nos pères faisaient usage et 
qu'il nous reste k faire connaître. 11 est 
difficile d'imaginer en ce genre quelque 
chose de mieux que ce qui a déjà été dé- 
couvert. 

Nous avons à passer en revue les écri- 
vains qui ont successivement exposé les 
mystères de la Cryptographie. 



EN CIIIPFRE9. 35 



CHATITRE II. 

ALTLU1IS Qtt ONT ÉCRIT ^VR LA CnVPTOOP.APHlE. 



8 r. 

L'abbé Trithème. 

Le premier auteur qui ait traité ex 
professo et en détail Tart d*écrire en 
chiiïrcs fut le célèbre Trithème, mort en 
1516, abbé de %aint>Jacques à Wart- 
zbourjf. Polygraphe actif, historien, bio- 
graphe, auteur d'un grand nombre de 
livres ascétiques, il ne nous appartient 
que comme ayant mi^ au jour deux ou- 
vrages, Tun sur la Polygraphie, Fautre 
sm* la Stéganographie (SUganographia, 



36 l'art d'écrire 

hoc est y ars per occultam scripturam 
animi sui voluntatem absentibus ape- 
riendi certa). La Polygraphie fut publiée 
pour la première fois à Oppenheiin, en 
1518, deux ans après la mort de Fauteur; 
elle a souvent été réimprimée durant le 
siècle qui suivit sa mise au jour. Il en 
existe une traduction française par Gabriel 
de GoUange, sous le titre de Polygraphie 
et universelle escnture cabalistique, 
avec la clavicule, etc. (Patis, 1541. 4**). 
Ce mot de Polygraphie ne doit point s'ap- 
pliquer, comme d'usage, k des mélanges 
d'écrits de différents genres ou sur divers 
sujets : Trithème veut seulement ensei- 
gner à écrire un même mot, de plusieurs 
manières. 11 donne des alphabets nou- 
veaux, composés, soit de lettres étrangè- 
res les unes aux autres, soit de ca- 
ractères de convention. Quant à la Stéga- 
nographiCt les expressîoiis bizarre» qui y 
abondent firent prendre ce traité pour un 



BN CHIFFRES. S7 

livre de magie, et telles furent les cla- 
meurs de quelques individus faciles à épou- 
vanter, que le comte palatin Frédéric H, 
surnomme pourtant le Sage, livra aux 
flammes le manuscrit autographe qui se 
conservait dans sa bibliothèque. 

Il est impossible de ne pas convenir 
que, surchargés de détails inutiles, acca- 
blés d'une foule de réflexions mystiques, 
de considérations allégoriques, et se traî- 
nant sous le poids d'une immense éru- 
dition cabalistique qui étale hors de tout 
propos les rêveries creuses et les imagi- 
nations folles des vieux rabbins*, les ouvra- 

* Parmi les nombreux écrits qui montrent à 
quel point Trithème était infatué de pareilles 
idées, il faut citer sa ChronoiogUt mystica de 
septem tecundeis sive inieUigenliis »rbeê post 
Deum moventibus. Une ancienne doctrine pla- 
tonique ou cabalistique plaçait dans chaque 
sphère céleste une intelligence chargée de la 
gouverner. Trithème s'efforce de rattacher, à ce 
système, des notions historiques et d'en établir 
la réalité. Un pareil livre n'eut pas moins de 



fi8 Taat a'écriikf: 

gcs de Trîdième sont des lectures les 
plus indigestes et les plus pénibles aux- 
quelles on puisse se condamner. 11 faut du 
courage et de Tattention, pour déniéler au 
milieu de toutes ces digressions et de tou- 
tes ces rêveries les procédés de Crypto- 
graphie qu'indique Pabbéde Saint-Jacques. 

Essayons de donner une analyse suc- 
cincte des quatre livres dont se compo^ 
la Stéganographie, 

Le premier livre comprend trois cent 
soiiante-seize répétitions de Talphabet 
formé de vingt-quatre lettres ; à chaque 
lettre correspond un mot de la langue ; le 
tout forme un total de neuf mille vingt- 
quatre mots. Afin de faire Hen compren- 
dre ce système, il convient de transcrire 

six ou sept éditions. Il n'est pas surprenant que 
ces rapsodies inintelligibles aient trouvé de 
nombreux lecleurà, et il est eitrémenient pro- 
iMblc que le docte abbé ne se comprenait pas 
toujours lui-même, lorftqu'il dt^voloppait ses 
étranfes imaginations. 



K.\ CUfFFUES. 



quelques-uns de ces alphiibefs ; nous re- 
produirons le premier, et nous y joindror.s 
trois autres pris au hasard (les 23% SIC* 
ol3i9«). 



a Jésus, 

b le Dieu, 

le Sauveur, 

d le modérateur, 

a le pasteur. 

f l'auteur, 

g te rédempteur, 

h le prioce, 

i le fabricateur, 

k le conservateur, 

1 le gouverneur, 
m l'empereur, 

n le roi, 

o le recteur, 

P le juge, 

q rillustrateur, 

r rniuminaleur, 

a le consolateur, 

t le Seigneur, 

n le diminatcur, 

X le' créateur, 

y le psalmateur, 

s le souverain, 

A le protecteur, 



l'amour. 

la dilection. 

la charité. 

la révérence. 

l'obéissance. 

le service. 

le zèle. 

la mémoire. 

le souvenir. 

la souvenance. 

la faveur. 

l'affection. 

la loi. 

la foi. 

l'espérance. 

le commandement. 

la rccordatioD. 

la parole. 

la connaissance. 

le salut. 

l'amitié. 

la promesse. 

l'ordonnance. 

la liieaTeiNanro. 



40 





l'art 

4 


d'Écrire 




fragiles, 


Europe. 




misérables, 


Candie. 




ingrats, 


Hongrie. 




ignorants, 


Panonie. 




iniques. 


Pologne. 




injustes, 


Germanie. 




malheureux. 


Saxe. 




malicieux, 


Helvétîe. 




obstinés. 


Suède. 




perdus, 


lUlie. 




pécheurs, 


Remanie. 


m 


criminels, 


Lombardie. 




volontaires, 


Espagne. 




vains, 


Andalousie. 




mauvais, 


Castille. 




détestables. 


Gaule. 




abominables, 


Bretagne. 




damnables. 


Normandie. 




immondes, 


Aquitaine. 




indigents. 


Guyenne. 




pauvres. 


Gascogne. 




pusillanimes, 


Auvergne. 




pervers. 


Bourgogne. 




abjects. 


France. 



Vous pouvez, au moyen de ces alpha- 
bets, exprimer voire pensée d'une façon 
inintelligible pour les non initiés, et voici 
comment : Écrivez d*abord sur un morceau 



EN CHIFFRES. 41 

àe papier, que vous détruirez ensuite, ce 
que vous voulez faire savoir, et traduisez, 
en posant pour la première lettre le mot 
qui lui correspond dans le premier alpha- 
bet ; pour la seconde lettre, cherchez dans 
le second alphabet le mot à côté duquel 
elle est placée ; ainsi de suite. On a de 
la sorte une suite de mots qui ne présente 
qu*une série de non-sens, mais, si notre cor- 
respondant est mnni (comme il doit Tétre) 
de la copie exacte des alphabets dont 
vous avez fait usage, il n'aura nulle peine 
à découvrir le sens qui se cache sous cette 
enfilade de mots, étonnés de s'j trouver 
placés ^ans une série bizarre. 

Trithème rend ceci fort clair au moyen 
d'un exemple; nous allons le reproduire 
exactement : Un méchant vous demande 
une lettre d'introduction auprès d'un de 
ses amis avec lequel il veut se lier. Vous 
avez des motifs pour ne pas repousser 
cette prière ; d'un autre côté, vous voulez 



ii I.'aRT D'tCRlRK 

transmettre des renseignemenls exacts sur 
votre recommandé. Vous le chargez alors 
de remettre k celui qu'il Ta tixwver, un 
écrit qui présente les phrases suivantes : 

• Le Roi universel esornant les corps 
« manifeste aux languissants sûreté irn- 
« mortelle avt>c ses sanctifiés en béatitude 
« Amen. La charité incompréhensible 
« évangéliquement dénoncée aux hommes, 
« reluctante d*e&hottation, réduit les in- 
«( justes bannis aux choses profanes , 

• faisant de vilipender la recoixlation du 
c Rédempteur des cieux et aussi la comp.i- 
« gnie de la volupté innediible que pour- 
« suivœ. PaiH|uoy, ô immondes, sou- 
« tenez pureté et serez recueillis aux rè* 

• gnes des déifiés et là perpétuellement 
« prédestinés. Abolissez donc les dissimu- 
« iationsxie cette chamalité, puisqu'estes 
<c heureusement compris aux exaltations 
« du modératenr tout voyant. » 

Cherchez à quelle lettre du premier 



KN GlIllfFRKS, 43 

alpiiabet correspond le premier mot 
de celte oraison polygraphiquCy et vous 
trouTez In lettre n à côte du mot le roi. 
Passant au second alphabet , vous verre/ 
que le mot universel signifie e. >Àu troi- 
sième alphabet, vous remarquerez la let- 
tre V h côté du mot exornant. Au qua- 
trième alphabet vous noterez la lettre o 
comme étant en regard de les corps : et le 
cimjuième montrera un v dans la même 
ligne que le mot manifeste. En continuant 
de la sorte, vous trouverez que la plu*ase 
ci- dessus se traduit exactement par : 

f Ne TOUS servez de ce porteur, car il 
est menteur et larron. » 

Trithème explique qu'avec ce système 
on peut s'exprimer très-facilement dans 
quelque langue que ce soit, il en fournit 
Hes exemples pour Titalien et le latin ; la 
phrase suivante: 

M Imaginez, terreins immondes, très- 
« vite se ruinent terriennes, ardemment 



4i l'art D'écftIRE 

« fraudes avez; glace faillirez, présu- 
(t merez, malheureux, etc. 

Signifie tout simplement : Te m(meo, 
amicCf ne in hoc negoéio immiscens. 

L'auteur fait remarquer : 

Qu*il ne faut jamais « qu*en aucun 
(T ordre et rang alphabétique une diction 
« soit doublée, répétée, réitérée, ni mise 
« en écrit par deux fois. » 

Qu'il ne faut pas qu'il y en ait d'ou- 
bliées ni d'omises. 

On ne doit prendre qu'un seul mot dans 
chaque alphabet, et il est essentiel de ne 
pas laisser passer im seul alphabet sans y 
prendre une expression. 

Les mots qu'on traduit en langage po- 
lygraphique doivent être écrits tout au long, 
sans abréviation, distinctement et dûment 
séparés. 

Il va sans dire que l'individu avec le- 
quel vous correspondez de la sorte doit 
posséder un recueil d'alphabets exacte- 



EN GUIFFBES. 45 

ment et de tout point semblable à celui 
dont vous faites usage. Chacun peut com- 
poser en ce genre un livre analogue a 
celui de Tritbème, et il est bon que les 
ms et princes en possèdent un certain 
nombre, afin de s^entendre avecleurs am- 
bassadeurs et leurs généraux» d'une ma- 
nière qui ne soit pas uniforme. 

On peut aussi convenir qu'on changera 
ou transportera l'ordre des mots contenus 
dans chaque alphabet, et ces transpositions, 
qu'il y a moyen de varier à TinOni, aug- 
mentent beaucoup la difficulté qu'offre 
le déchiffrement d'une lettre écrite selon 
la méthode polygraphique. 

Il serait possible qu'on trouvât des in- 
convénients à recourir, soit à la langue 
frauçaîse, soit à tout autre idiome, pour 
la formation des alphabets. Trithème a 
prévu cette difficulté ; il s'est efforcé de 
la résoudre, en composant des alphabets 
qui offrent des mots qui, n'appartenant ^ 



46 l'art D'écniHE 

aucun dialecte, peuvent servir de langue 
universelle. C'est dans un jargon cabalisti- 
que ayant avec l'hébreu un certain air de 
famille, qu'il est allé puiser ses matériaux. 
Un exemple devient nécessaire. 

Cabalit mossu ahi*u masstt basin so- 
phus strahil caffulun, etc. 

Un travail analogue à celui que nous 
avons déjà indiqué fera connaître que 
« ces mots përégrins, » ce langage bar- 
bare et étrange signifie : 

« Ne venez en cour, car le roi est fort 
offensé contre vous. » 

Le troisième livre de la Polygraphie 
est consacré à des séries d'alphabets de 
mots cabalistiques, mais il y a ici un raETi- 
nement : la seconde lettre de chaque mot 
doit être extraite et écrite à la suite Tune 
de l'autre ; ces lettres réunies donnent le 
sens qu'on veut couvrir d'un voile. 

Anna mesardvain rosmdumeramion 
afang lisamar neparo uzafun amai' 



E>" CIIIFFBES. 47 

achieè benadas epalam ronis orrifer 
olrimeeh rresarym luqfphus arornn. 

Un travail dans le genre de celui dont 
nous avoiis donné Tidée, raontiera que 
ceci veut dire : 

« Ne vous fiez à ce porteur. » 

II va sans dire qu'on peut convenir que 
la lettre significative sera la troisième, la 
quatrième, n''importe enfin Inquelle de 
chaque mot. L'abbé de Saint- Jacques con- 
vient , d'ailleurs, que ce procédé n'est pas 
trop sûr et secret, « car tout homme d'es- 
« prit et de savoir, par cas fortuits, tattt 
« par sa curiosité que par son labeur et in- 
« dustrie, pourroit trouver le secret et oc- 
«t culte mystère caché sous cette écriture. » 

Le quatrième livre expose la méthode 
bien connue de la transposition des lettres 
alphabétiques ; « on peut faire et compo- 
ser autant d'alphabets différents et dis- 
semblables, qu'il y a d'étoiles au ciel. » 

les vingt-quatre lettres répétées de mn- 



( > 



48 LART D ECHIRE 

uière à former un carré de la façon suÎTante 
(nous nous bornons à en donner l'esquisse) : 

ABCDEFG YZ 

Bcdefgh 6A 

Cdefghi B 

De C 

E f G 



F 
G 



f- 



Y : 

ZABCD XY 

peuvent former un grand nombre d'al- 
phabets ; on peut choisir cdui qu'on veut, 
et, une fois qu'on s'est mis d'accord, en 
faire usage pour la correspondance se- 
crète. 

Trithème passe ^suite à un alphabet 
numéral, « qui ne sera trouvé moins sûr 
et secret qu'il est nouveau et moderne. » 

a a 1 g f 7 u ic 13 t ih 19 

b b !2 h g 8 o id 14 u k 20 

c c Z in 9 p ie 15 x ka 21 

d d 4 k i 10 q il 16 y kb 22 

c e 5 1 ia 11 r if 17 z kc 23 

f I 6 « ib 12 t ig 18 A kd 21 



tu CHIFFRES. 



i^ï 



Avec te système, les mots traître et 
méchant s'énoncent $oqs la forme sui- 
vante : ih. if. a. h. ig. ih. if. e. kd. ib. 
6. ig.c. ic. a. i. ih. 

Cette façon de cadier sa pensée est fort 
diflieile à pénétrer; car, suivant la re- 
marque de Tauteur, « tous ceux qui ver- 
ront récriture faicte en ceste sorte et par 
(-est alphabet, penseront et croyront que ce 
sera transposition de lettres et travaille- 
ront pour néant à la supputation et re- 
cherche d*iceUes. » 

11 va sans dire que Trithème n*oublie 
pas un alphabet formé des lettres ordi- 
naires distribuées c par ordre confus, irré- 
gulier et sans ordre ni règle. > 11 est aisé 
(l'en composer une foule de ce genre. En 
voici un exemple : 



a 





K 


/ 


n 


c 


t 


e 


h 


P 


h 


b 





M 


u 


k 


c 


9 


• 

1 


H 


P 


h 


\ 


n 


il 


r 


k 


l 


q 


y 


y 


m 


e 


i 


J 


* 


r 


d 


z 


/ 


f 


s 


m 


S 


* 


8 


a 


/ 



50 l'art d'écrire 

La lettre placée dans la seconde colonne 
doit surtout être substituée à celle qlii se 
trouve dans la première et qui entre 
dans Tavis à chiffrer ; tous écrirez : 

lldicg todri iki xiusi%m ci,,,,* 

Si tous voulez dire : 

« Prends garde que Tennemy ne... » j 

C'est d*un procédé de ce genre qu'usait 
César pour correspondre avec Cicéron et au- 
tres perâonnages de 1 époque» selon le té- 
moignage de Suétone, procédé que Tabbé 
Trilhème expose en ces termes : 

« Four rintcUigence de ce secret, il fal- 
« loit changer et prendre la quatrième let- 
« tre de Falphabet, qui est D, pour la pre- 
« niiére lettre, qui est A ; E^pour B; F , pour 
« C, et ainsi consëquemmeut transposer et 
« changer lesdites lettres alphabétiques. » 



EK CUIFFBE8. M 

gîl. 
J. B. Porta. 

La diplomatie italienne STait, au soi* 
zième siècle, grand besoin d'invoquer les 
ressources de la Cryptographie, afin de 
couvrir d'un voile impénétrable des se* 
crets souvent terribles et les plus sinistres 
combinaisons. Le Conseil des Dix devait 
tenir à ce que ces dépêches fussent con- 
stamment lettre close, dans toute la ri- 
gueur du mot ; les Borgia, les Visconti, 
les Famèse, avaient fréquemment h trans- 
mettre des communications qu'il fallait 
soustraire à tous les yeux. L'art de récri- 
ture chiffrée devint une étude des plus 
importantes à Milan, à Florence, à Rome. 
Un Napolitain, dont l'intelligence cher- 
cheuse et l'active curiosité s'exerçaient sur 



SI / i/art D*écniRE 

toutes sortes de sujets *, J. B. Porta, réu- 
nit et discuta, en s'efTorçant de les perfec- 
tionner, les diverses méthodes cryptogra- 
phiques connues alors au delà des Alpes. 
L'esprit net et pratique de cet écrivain 
)c préserva complètement des aberrations 
tout à fait étrangères à pareil sujet, aux- 
quelles Trithème s''était abandonné; il 

' l/agricvllure, l'optique, la mécanique, la 
lunémoDique, la nK^téréologie, la physique, fu- 
icut tour à tour l'objet des méditations de Porta- 
il fut du nombre de ces hommes hardis, conque* 
mots, qui ne peuvent échapper i l'influence des 
préjugés de leur époque, mais qui découvrent 
ou pressentent de hautes vérités. 

Son traité de la Physiognomonie humaine. 1586, 
a fourni beaucoup d'idées h Lavater. Son livre 
de M Magie kvmaitte, très-souvent réimprimé au 
Hnzième siècle, renferme, parmi beaucoup do 
rails puérils compilés avec peu àt jugement, 
une foule d'observations importantes sur les 
miroirs, la lumière, la statique, etc. Les divers 
ouvrages de cet écrivain remarquable sont ana- 
lysés avec étendue dans la Notice historiqve àc 
H. G. Duebesoe, sur tu vieet les travaux de Partit 
l'aris, ISOl, 8-, 583 page*. 



EN ClIlFPBES. 53 

s'efibrça d'être utile, mais il pécha par 
excès d'imaginatioD. A force de vouloir 
multiplier les procédés d'écriture secrète, 
il prit la peine dVn montrer et d>tt 
décrire un grand nombre qui seraient 
d'un usage très-incommode et dont il est 
bien certain que jamais personne n'a eu 
ridée de faire usage. 

L'ouvrage dans lequel Porta a déve- 
loppé ses idées, est intitulé : 

De furtivh lillerarum notis, vulgo de 
ziferis. On en compte des éditions assez 
nombreuses ; nous signalerons celles de 
Naples, 1563, 4% et 1602, D»; de Montbeil- 
lard, 1592 , 8' ; de Strasbourg, 1606 , 8" , 
etc. Cet écrit est divisé en trois livres. 

Le premier, après avoir consacré quel- 
ques pages aux hiéroglyphes et à la sténo- 
graphie en usage parmi les anciens Ro* 
mains, passe en revue les diverses maniè- 
ivs de se faire comprendre en dérobant 
toutefois sa pensée au vulgaire ; le kngage 



5i LART d'ECU inE 

a]tégorique, métaphorique ou énigmatique, 
les mots amphibologiques ou entrelacés, 
coupés ou renversés» les syllabes insigni- 
fiantes ajoutées dans le discours, sont utiles 
en pareille cînjenstance. 

On peut aussi conimuoiquer ù distance, 
sans se parler, et par lo simple son, qui, 
répété, indique le rang que tient dans Tal- 
pbabet chaque lettre des mots qu'on veut 
porter à une oreille amie ; deux corps frap- 
pés l'un contre Tautre, des coups donnés 
sur une muraille d'après une manière 
convenue, servent également d'interprète. 

Les signes muets, tels que les gestes, 
l'emploi des emblèmes, celui des signaux 
AU moyen des flambeaux, occupent tour ù 
lour Porta. 

Le douzième et dernier chapitre de son 
premier livre roule sur une manière an- 
cienne de désigner les nombres par les 
doigts, d'après Bède. On n'ignorait point, 



EN CUIPFRKS. 55 

dans Tantiquité le mojea dç converser 
secrètement au moyen des doigts, soit en 
montrant un nombre de doigts pareil au 
rang' numérique que les lettres qu'on 
veut désigner tient dans Talphabet, soit 
en indiquant du doigt celles des parties du 
corps dont la première lettre indique la 
lettre qu il s'agit d'exprimer. 

Notre auteur arrive à la bandelette ou 
scytale lacédémonienne, et il juge avec 
raison que ce procédé était facile à 
découvrir ; il signale un moyen très-peu 
usité, remploi du fil, qui, après avoir reçu 
récriture, peut être roulé en peloton ou 
être employé à coudre les bords d'un vê- 
tement. Il observe qu'on peut écrire sur 
la trancbe d'un livre obliquement inclinée 
ou sur un jeu de cartes disposé en biseau 
ou sur les plumes des ailes déployées d'un 
pigeon ou d'un autre oiseau h plumage 
blanc. 

Il aborde enfin plus nettement la Gryp- 



se l'art n'ÉCRiftK 

tographie proprement dile^ Ce qu'il ne 
«lit point, peut s'analyser facilement. 

Les diverses manières de désigner 
récriture peuvent se réduire à trois : la 
transposition des lettres, qui comprend le 
renversement des mots, le changement 
des iigui'es des lettres, et le changement 
de valeur des lettres. 

La transposition des lettres dans un avis 
que Ion veut donner, peut s'effectuer d'une 
foule de laçons différentes; la première 
de toutes est aussi la plus simple : elle 
consiste à écrire sur deux lignes, en met- 
tant alternativement la 1'' lettre sur la 1'" 
ligne ; la 2* lettre sur la 2* ligne; la 3' 
sur la 1'*, et la A" sur la 2*, et ainsi de 
suite. La difficulté augmente si Ton écrit 
sur quatre lignes : la 1'* lettre sur la 1'* 
ligne ; la 2" sur la 4" ; la 5* au bout de la 
1'* , la 1*^* au bout de la 4"; la 5* sur la 
2* ligne ; la 6* sur la 3* ; la 7* au bout 
de la 2' ; la 8' au bout de la 3', en sui- 



KN CUIFPRES. r.i 

vant aimi le même ordre pour le reslc. 

Veut-on écrire crune manière encore 
plus compliquée? Ou transporte toutes les 
lettres de Tavis qu'on veut donner, sur 
des cadres de diverses formes, soit carrés, 
soit triangulaires, soit parallétipipèdcs, soil 
sinueux, soil en losange, soit en quinconce, 
soit en demi-cercle, tous divisés par des 
rayons qui forment autant de lignes per- 
pendiculaires sur des lignes droites ou 
courbes; et, quand Tavis a été écrit de ma- 
nière à imiter symétriquement la figure 
géomcti'ique convenu^ , on produit la 
transposition des lettres en prenant les 
rayons de lettres, de bas en haut et de haut 
en bas, de droite à gauche ou de gauche à 
droite, de manière que ces lettres, ainsi 
rassemblées, ne présentent aucun sens. 

Vous convient-il d'avoir recours k une 
autre manière de transposer les lettres, 
plus indéchiffrable encore? Transcrivez 
à part ce que vous voulez mander secrète- 



59 LAHT D ECRIRE 

ment; puis écrivez en interfigne, les lettres 
an-dessous des lettres, une devise quelcon- 
que convenue ; cellenîi, par exemple : Va- 
mour est un malin enfant, devise, qu'il 
faut recommencer une fois, deux fois, trois 
fois, jusqii'à ce que les interlignes soient 
entièrement remplis. Ensuite on a recopié 
sa missive secrète, et, au lieu de transcrire 
par interligne la devise convenue, on met 
au-dessous de chaque lettre de la missive le 
chiffre qui désigne le rang que chaque 
lettre de cette devise tient dans l'alphabet. 
Ainsi, au-dessous de la première lettre de 
la missive, au lieu d'une / on écrit 10; 
sous la seconde, au lieu d'un a, on écrit 1 ; 
sous la 3% aulieu d'an m, on pose 11 . Ces 
deux opérations faites, on prépare de la 
manière suivante la missive qui doit être 
adressée : chaque ligne est tracée par des 
points, entre lesquels est un intervalle suf- 
fisant pour y poser les lettres dans le rang 
que les chiffres de la devise indiqueront. 



KN CHIFFRES. ^0 

On part toujmm de la dernière lettre po- 
sée, pour compter le nombre des points à 
passer, arant d'arriver à l'intervalle où doit 
être posée la lettre suivante de la missive; 
et, quand on est parvenu en comptant jus- 
qn'au dernier point, on recomnu^nce à 
compter par les premiers points, jusqu'à ce 
qu'enfin toutes les lettres de la missive 
soient pbcées dans leur rang, de sorte 
que la devise sert, comme Ton voit, de 
clef pour connaître de quelle manière 
on doit trouver, dans cette suite de lettres 
transposées» celles qui forment un sens 
pour les remettre h leur place. 

Porta s'occupe ensuite de la façon de 
découvrir et d'interpréter les lettres trans- 
posées ; il ne s'agit que d'essayer de ras- 
sembler les 1", 5% 5% 7% 9* lettres, ou 
de il en 11, ou autrement, jusqu'à ce 
qu'on trouve un root qui forme un sens ; 
lorsqu'on en aura trouvé un, il deviendra 
plus faciled'en trouver un autre, enobser- 



60 LART d'ÉCRIKE 

vantr<irdre que tient chaque »lettife du 
mot trouvé. On comprend qu'à cet égard 
il n'est pas possible de donner aucune rt;- 
gle précise ; la variété arbitraire des com- 
binaisons s'oppose à toute règle. 

Notre auteur ne saurait oublier la sub- 
stitution de nouveaux caractères de l'al- 
phabet, de manière que les lettres ne res- 
semblent à aucune de celles connues. Pour 
rendre récriture plus indéchiffrable, on 
peut, entre ces caractères, en insérer 
d'autres qui n'ont aucune signification : 
on les place, soit au commencement, soit 
au milieu, soit à la tin des mots, pour 
mieux tromper les curieux. 11 est cer- 
taines lettres qui peuvent être rempla- 
cées par d'autres, q par cm; x par es; z 
par ss ; y par t. On peut encore éviter 
les mots où se trouvent les lettres /i, 6, 
^f P* 9> f* w. 11 est à propos de ne pas se 
conformer strictement à Torthographe. 
On peut aussi changer une kttre dans un 



EN CHIFFRES. ^ 

mot, un ù pour un t, un e pour c; un r 
pour un l ; par pour pré. Les mono- 
syllabes, les Toyelles seules, doivent 
être évitées avec soin ; elles présentent 
moins de difficultés à un déchifTWon* 
exercé, et elles peuvent le mettre sur la 
voie. On peut aussi écrire par abbréviation. 
Après avoir exposé toutes ces règle?, 
Porta envisage son sujet sous un autre 
point de Tue : le déchiffrement des dépè* 
ches dont ou veut pénétrer le sens. Il re- 
commande de compter d^abord le nombre 
de caractères différents employés dans la 
missive, lesquels ne peuvent excéder 2i ou 
22; s'il s'en trouve davantage, le décbifïire- 
ment est plus difficile, puisqu'il y aurait 
alors des caractères superflus ou inutiles. 
Lorsque les caractères différents sont au* 
dessous du nombre 21 ou 22, il faut savoir 
quelles sont les lettres qui manquent, tâ- 
che délicate àkquelleon ne peut procéder 
que par conjectures. 



«B^ 



6% l'àhi d'écrire 

porta s'occupe des moyens de distinguer 
des voyelles les consonnes. D'abord, toute 
les fois qu'on rencontre dans le cours de 
la missive cinq caractères différents et 
fréquemment répétés, on peut être assuré 
que ce sont des voyelles. En second lieu, 
on peut observer quelles sont les lettres 
qui sont répétées le moins fréquemment, 
ce sont les consonnes q, x, y et quelque- 
fois Vh; en troisième liëu^ les lettres iso- 
lées qui ne tiennent à aucun mot sont 
assurément des voyelles. En quatrième lieu, 
lorsque les mêmes formes de caractères 
commencent ou acbèvent un mot, on doit 
présumer qu'il y a des voyelles, car i 
n'arrive jamais qu'un mot commence ou 
finisse par deux consonnes (n'oublions pas 
que Porta écrit en latin, et que c'est à 
cette langue que s'appliquent tous ses rai- 
sonnements). Ginquièment» il faut faire at- 
tention que, lorsqu'au milieu d'un mot il 
se trouve deux consonnes , k lettre qui 



EM CniFFBES. G.\ 

pjrécède et celle qui suit sont («rtainc* 
ment des voyelles. Cependant les lettres 
h,leir font quelquefois exception à cette 
règle, puisqu'on les trouve placées en troi- 
sième consonne dans le mot. Il faut savoir 
aussi que deux voyelles peuvent être k côté 
Tune de Tautre, et que, ^ar conséquent, 
les lettres placées avant et après sont des 
consonnes. 

Notre auteur dirige ensuite sa percep- 
tion sur les moyens qu'on peut employer 
pour découvrir les places qu'occupent les 
consonnes. Il peut s'en trouver quatre de 
suite dans un même mot, comme phûiisie, 
diphthongue : alors 17i aspirée se trouve 
placée la seconde et la quatrième; lorsqu'il 
y a trois consonnes de suite, comme dans 
phrase, thrônet la lettre h est la gecondo; 
et il n'y a que trois consonnes qui admet* 
tcnt r/i, savoir c, p, t. Il y a quatre cou- 
sonnes qu'on appelle liquides ou mouillées, 
savoir L m, n, r. La consonne b admet 



ni l'art o'écRiRi 

les lettres l et r; exemple : blanc, broê. 
La consonne c les admet pareillement; par 
exemple : clair y scribe. LV n'admet que 
Vh, Il est rare de trouver ensemble Vm et 
Vn, comme dans Mnemosijne ; le g et Vn 
comme dans ignare. 

Porta développe ainsi de longues et mi- 
nutieuses observations sur le retour plus 
ou moins fréquent des voyelles, sur leur 
combinaison avec les consonnes, mais ces 
détails se rattachent à la langue latine et 
ne sont pas susceptibles d'une application 
exacte h d'autres idiomes. 

Dans le quatrième livre de son traité, 
Porta étudie la mutation de la valeur des 
lettres, de façon qu^un même caractère 
puisse représenter tantôt un a, tantôt un p, 
tantôt un m. 

11 faut d'abord se faire des caractères 

inconnus qui représentent vingt lettres âr 

l'alphabet (le A, Yx, le; et le v étant ex- 

,chis); on a un triple cadran, dont celui du 



MIPi 



EN CIIIFFAES. 65 

centi*e est mobile; tous trois divisés eu 20, 
24 ou 28 parties égales, de manière que 
les espaces de chacun se correspondent 
très-eiactement. Le grand cadran contien- 
dra la suite des nombres depuis 1 jusqu'à 
20, 24 ou 28. Le second cadran moyen 
contiendra la série des vingt lettres de 
Talphabet et quatre ou huit cases en blanc, 
et le petit cadran concentrique mobile 
portera les vingt signes en caractères re- 
présentatifs des lettres de Talphabet, im- 
médiatement placés au-dessus d'elles. Il 
faut d'abord écrire en écriture courante 
Tavis secret qu'on veut envoyer; puis, cet 
écrit est mis en caractères représentatifs 
des lettres de l'alphabet; mais, pour ren- 
dre cette écriture très-difficile à décou- 
vrir, on fait, k chaque lettre, avancer d*uu 
cran le cadran mobile, de sorte que le ca- 
ractère qui représentait un d représente 
un e; pour la lettre suivante, ce même ca- 
ractère représente un (; et ainsi des au- 

5 



(>6 i/Ar.T d'écrire 

très. De cette manière» le même caractère 
ayant diverses représentations, il est aise 
de sentir tout ce qu'un pareil moyen jette 
d'obscurité dans une correspondance se- 
crète; mais il faut que les correspondants 
aient chacun un instrument pareil et con- 
certent d'avance entre eux la manière de 
s'entendre. 

On comprend que gous ne pouvons en- 
trer ici dans la description détaillée des 
combinaisons dont ce procédé est suscepti- 
ble; on le trouva, dans l'ouvrage de Porta, 
accompagné d'exemples et de figures com- 
pliquées. Pour suppléer aux cadrans ci- 
dessus, il donne une table de permutation 
très-propre à changer à volonté les signes 
représentatifs. 

Les alphabets, fabriqués à plaisir et n'of- 
frant ainsi aucun trait de lumière aux in- 
vestigations Jcs curieux, tiennent une 
grande place dans le traité du savant na- 
politain. 



ËM CHIFFRES. 67 

Voici un des modèles de ces alphabets 
qirindique Porta et qu'il regarde comme 
indéchiffrables. On partage les lettres en 
trois groupes de trois lettres et en six 
groupes de deux, delà façon suivante : 



a 1 n 


b m X ' c n z 


clo 


cp 


fg 


g r 


hs 


i t 



pour répondre h ces neuf groupes, on 
forme neuf caractères de la forme que 



voici : 



juLDDcnnr 

et on ajoute à chacun d'eux un, deux ou 
trois points, afin d'exprimer la place quV- 
cupe dans le tableau la lettre de Talpha- 
)>*t qu'on veut représenter ; ainsi Vn sera 



■et»' ■" ..• _„Wlic «•! 



pliquées. 



EN CHIFFRES. 69 

Au lieu de chaque lettre, il s'agit d'é- 
crire le mot qui correspond à cette même 
lettre dans le tableau cindessus. Ainsi, pour 
exprimer le nom de Romat on mettra : 
Adjuva clemens aeteme Deus; et la tra- 
duction du mot hostis (l*ennemi) sera libe- 
rator clemens tuere, liberasapiens tuere. 

On comprend, d'ailleurs, que ce procédé 
n'^offrirait pas de bien grandes difficultés à 
un déchiffreur un peu sagace et au fait 
des ressources de son art. 

S III. 

Blaùe de Vigenère. 

Profitant des recherches de Trlthème et 
de Porta, un écrivain français du seizième 
siècle, plus fécond que judicieux y Biaise de 
Vîgenèrc (1), mit au jour un gros vo- 

* Mort en lo96; il remplit d'imporUntos fouc- 
lions diplomatiques, et il traduisit un grand 
nombre d'au(eur!< grecs et latins; ses tradu<-- 



• t 



70 LABT D fiCRlBE 

lumc in-4% Itquel ne renferme pas moins 
de 600 pages consacrées à la Cryptogra- 
phie. L'auteur n'a point su se préserver 
de recueil contre lequel ses prédécesseurs 
étaient venus échouer. Au lieu de poser 
clairement et nettement des règles préci- 
ses, au lieu d'indiquer des procédés faciles 
à comprendre, il se plonge dans Tocéan 
des rêveries cabalistiques. H reproduit, en 
général, les inventions chryptographiques 
de Porta. 

Parmi les diverses méthodes qu'indique 
Vigenère, nous allons essayer de l'aire 
comprendre la suivante : 

Dressez un tableau composé de huit co- 
lonnes et disposé de la manière qui suit : 

tions sont aujourd'hui vouées h l'oubli le plus 
profond, de même que sou Traité ieê Comèt'es 
ci &0D Trailé du feu et du sel, quoique ce dernier 
écrit Lc'est un livre d'alcliiinie) ait obtenu troi« 
ou quatre éditions en France, et <^u*il ait même 
rencontré des traducteurs qui Tont fait f s^er 
en latin et en ang1ai>. 



tV CHlfFRES. 



71 





A A 


BB 


ce 


AB 


AC 


BC 


CB 


A 


a 


d 


g 


1 





r 


u 


B 


11 


e 


h 


m 


P 


s 


X 


C 


c f 


• 

1 


u 


q 


l 


z 



On cherche^ parmi les petites lettres, 
celle que Ton veut écrire, et, à sa place, on 
pose les deux capitales qui sont dans la 
case supérieure correspondante 5 cette let- 
tre ; on y joint la capitale de la ligne ho- 
rizontale placée n gauche, et on transcrit 
ces capitales ou petites lettres; ainsi, pour 
écrire le roiy on voit que In lettre / corres- 
pond par en haut à Â B, cl k gauche à la 
lettre A : on pose aba; Ve sera bbb; le 
mot roi s'exprimera par : bca, aca, ccc. 

Vigenère n'oublie pas l'usage qu'on 
peut faire de deux exemplaires d'un même 
livre : on convient de recourir à une page, 
la première venue ; on se met d'accord sur 
une ou deux lignes de cette page, et on in- 



1 » 



72 LART D KCRIRE ^ 

dîque les diverses lettres de Talphabet 
par des chiffres correspondant à Tordre 
dans le^el ces lettres se présentent. En 
prenant pour exemple la troisième ligne 
du feuillet 5 de Touvragc de Vigcnère lui- 
même, on opérera sur la phrase suivante : 

« Partie de son âme dont elle constitue la 
différence. » 

et on dressera le tableau suivant : 

Ϋartiedsonml ...• 
2 5 4 5 6 7 8 9 <0 H 12 .... 

On aura soin de négliger les lettres ré- 
pétées et de continuer ce travail sur la li- 
gne suivante si toutes les lettres de Talpha- 
bet ne se trouvent pas dans la ligne choisie. 

De cette uianière, ces deux mots, le 
pape, seraient représentés par les chiffres 
suivants : 

12.6. i.2.1.6. 

Le roi .s'exprimemit en écrivant : 

12. 6. 3.9.5. 
Vigenère remarque que ce chiffre est 



EN CUIFFRËS. 73 

inexpugnable, sans la communication du 
secret, car que serait-il possible de con- 
jecturer là-dessus? 

Les vingt-quatre caractères de Talpha- 
bet usuel lui paraissant trop simples et trop 
susceptibles d'être deyinés, Vigenère in- 
vente des chiffres de 72, de 64, de 48 ca- 
ractères; chaque lettre est représentée par 
deux, trois ou quatre signes imaginés à 
plaisir et qu'on peut varier à rinfini. 

Une autre combinaison consiste k indi« 
quer chaque lettre de Talphabet, sur un 
chiffre; mais, afin de dérouter les curieux, 
on entremêle les lettres, car les écrire à 
rebours de la façon suivante : 

Z Y X... B A 
1 2 3... 23 24? 

serait trop na'if. On peut les diviser en 
deux séries, dont voici un modèle : 

UILHABGI>E, 
OU bien les placer de cette manière : 

. L A M B N€ 

123 4 5 6? 



74 L*Anî I)*ÉCniRE 

ou bien, enfin (car ces arrungeinnits sont 
susceptibles de modifications presque in-> 
finies), assigner à chaque lettre un chifTrc 
de convention. 





15 


n 


1 




» 


o 


«3 




il 


P 


.S 




20 


q 


12 




3 


r 


8 




18 


• 


22 


( 


24 


t 


4 


19 


u 


10 


1 


Ifi 


V 


2 


k 


7 


X 


14 


1 





y 


17 


m 


13 


■ 


6 



De cette manière, Lyon est pris, s'ex- 
primerait par : 917 231, 5224, 581622. 

Et certes, quclqu^un qui n'aurait pas le 
secret du cliiffre attribué nrhitruirement à 
cha(|iie lettre, se trouverait dans Tinipos- 
sibilité pn'^que absolue de deviner le sens 
de ces nombres mystérieux. 

Vigenère n oublie point « un bel artifice 
de se réserver un second sens ctché 
parmy le premier, si Ton estoit surpris et 



ES CDIFFBES. 7$ 

contraint (l*exhiber son chiffie; » mais les 
explications qu*il donne k cet égard sont 
confuses et d'une longueur tellett que, si 
nous avions la patience de les transcrire, 
peu de personnes sans doute auraient celle 
de les lire. 

Le défaut de la plupart des procédés 
qu'indique le Traité des chiffres, c'est 
une cxtrênic complication: Tauteiir fait 
un usage immodéré de lettres de diverses 
couleurs, et il expose, «d'une façon souvent 
très- peu claire, des systèmes de chifFres 
tellement mystérieux, que relui qui vou- 
drait en fiire usage se trouverait peut- 
être lui-même dans un embarras inextri- 
cable pour dccliiflrer ce qu'il aurait écrit. 

Vigenère fait observer que la Crypto- 
graphie se retrouve dans la plupaii des 
professions : 

ff Les hommes de tout temps ont esté 
« curieux de se tracer chacun pour soy 
« quelques notes secrètes pour se receler 



76 LART d'eckirij: 

• de la cognoissance dés autres, comme 
a les marchands en leurs marques et pa- 
« piers de compte; les médecins, en leurs 
« pieds de mouche; les jurisconsultes, en 
a leurs paragraphes. » 

11 expose avec complaisance un moyen 
de transmettre un ans, sans avoir recours 
à récriture, mais en employant des grains 
de diverses matières, accouplés deux à deux 
et arrangés comme des chapelets. 

grains d'or, d*ai^ent, d'ébène, d'ivoire, 
d'or A B C D 

d'argent E H I L 

d'ébèoe M N P 

d'ivoire R S T V 

De sorte que le mot deus, par exem- 
ple, aurait pour expression, en suivant les 
lignes horizontales : deux grains dW et 
d'ivoire, deux d'argent et dV, deux grains 
d'ivoire, deux d'ivoire et d'argent. 

Après avoir expliqué ce procédé, Vige- 
nère consigne, en son livre, la réflexion 
que voici : 



EN CUHI'RKS. :7 

« Au rang des chifTi^s ou occulte écii- 
tf ture, on peut bien reléguer aussi les 

< minutes des greffiers, notaires, sergcns 
(' et semblables manières de gens de pra* 
« tique, et encore Fécriture de beaucoup 
a de personnes, qu'à peine autres qu'eux 
f sçauroient lire, quoiqu'elle ne soit que 
« des lettres ordinaires, mais difformées de 
« telle sorte, qu'on n'y sçauroit presque 
« rien discerner. Or, laissant à part ces 
t( vicieux chafTourements qui procèdent 

< d'insuffisance, il y en a d'autres qui 
« consistent en perspective, car, en y re - 
« gardunt de front, on n*y sçauroit rien 
« discerner de lisible, mais Taccomodant 
4 obliquement en Tassiette qui luy est 
« propre, ce qui est oit imperceptible ap- 
« paroist. 11 y en a d'autres qui dépendent 
« de la seule acuité de la vue, la lettre cs- 
«( tant si déliée que l'œil k peine la peut 
« comprendre : telle que s*est vue de nostre 
« temps celle d'un gentilhomme sieunois. 



^8 L*Aftt d'ÉG&IRB 



a appelé Spanocchio, qui écriyoit sur un 
« velin, sans aucune abréviation, tout Vin 
« principio de Saint-Jean, en autant ou 
« moins d'espace que ne contient le petit 
« ongle, d^une lettre si exquise et si bien 
« Tonnée, qu'il ne seroit pas possible de 
« mieux faire. Pline, d'après Gicéron, aU 
(( lègue que toute VUiade d*llomère, qui 
H contient de quatorze à quinze mille vers, 
« avoit esté escrite de si menue lettre en 
« relin, qu'elle pouvoit toute entrer en 
« une coquille de noix. » 

Le célèbre chancelier Bacon a, dans son 
traité De dignitate et augmenlis scien- 
tiai^m (livre VI, ch. ij, fait connaître 
uncbiiïre, dont il est Tinventeur, et qui est 
basé sur les permutations de deux lettres 
seules, a et b, combinées par groupes 
de cinq. Ces deux lettres sont susceptibles 
da 32 combinaisons de ce genre; il y en a 
donc plus qu'il n'en faut pour exprimer 
Talphabet tout entier^ et cet alphabelum 



CN ClIlFFhES. 10 

tiluterarium (c'est ainsi que le nomme 

Bacon) pouri*& s'écrire de la façon sui* 

vante : 

n aaaaa n akliaa 

h aaaab o abbab 

c aaaba p abi>ha 

d aaabb q abbbb 

e aabaa r baaaa 

f aabab s baaab 

g aabba t baaba 

h aabbb u baabb 

i abaaa w babaa 

k abaab x babab 

1 abaha y babba 

m ababb z babbb 

On comprend» du reste, qu'au lieu des 
lettres a ei b on peut prendre toute au- 
tre dont on aura envie» ou bien les rem- 
t lacer par quelque signe algébrique, ou 
par une marque quelconque à laquelle on 
voudra s'attacher. L'inconvénient de cet 
alphabet, c'est que tout mot ordinaire se 
tronve représenté par cinq fois plus de 
lettres. Paris, par eiemplo, se traduira 
pr abbba aaaaa baaaa abaaa baaab. 



SO i/akt d'ëckire 

Loi^qu'on voudra écrire Espagne, il faudra 
prendre la peine de tracer aabaa baaab 
abbba aaaaa aabba abbaa aabaa. Une 
phrase un peu longue se trouvera ainsi 
exiger beaucoup de temps et une attention 
fort soutenue, pour être écrite sans que 
quelque erreur ne vienne s'y glisser. 

Bacon a prévu que le mystère de son 
alphabet ne serait pas très-difficile à dé- 
couvrir, et il a dû cherclier quelques 
moyens, afin de mettre sa pensée à Tabri 
des curieux : il a donc imagine ce qu'il ap- 
pelle Valpliabetum biforme. Après avoir 
déchiffré la dépêche écrite d'après la mé- 
thode que nous venons d'exposer, on n'ar- 
rive point encore au véritable sens : il Q^i 
enveloppé dans les lettres qui sont mises 
en majuscules dans l'alphabet biforme , 
lettres qu'indique à ceux qui ont la clef de 
c^ procédé les groupes de lettres auxquels 
elles correspondent. 

Pour faire comprendre ceci, il est in- 



£!( CHIFFRES. 

(Hspensabie de transcrire d'aiiord ce iiou* 
Tel alphabet, tel qu'il se montre dans roii- 
vrage de Bacon. 

ab ab ab ab ab ab ab ab 



AA 


aa 


BB 


bb 


ce 


ce 


DD 


dd 


ab 


ab 


ab 


ab 


ab 


ab 


ab 


ab 


EE 


ce 


FF 


ff 


GG 


gg 


HQ 


bh 


ab 


ab 


ab 


ab 


ab 


ab 


ab 


ab 


11 


• • 

11 


KK 


kk 


LL 


II 


MM 


mn 



ab ab ab ab ab ab ab ab 

IS*i\ nn 00 00 PP pp QQ qq 

ab ab ab ab ab ab ab ab 

RR rr SS as TT It VV vv 

ab ab ab ab ab ab ab ab 

uu WW \?w XX XX YY ab 

ZZ zc 

Supposé maintenant qu'on veuille donner 
avis à quelqu'un de s'enfuir, en lui faisant 
passer le mot latin fuge^ on écrira d'abord 
la phrase suivante, qui présente un sens 
tout opposé : 

* Manere le volo douce veuefo. 

En prenant dans l'alphabet ci-dessus les 
letti'es a et ^ qui correspondent aux lettres 



8i i/aRT d'ÉCUIUË 

dont est formée cette phrase, on mettra : 

aaliab baabb aabba aabaa 
Maner ctevo lodon ecvenero 

Ces quatre groupes d'à et de b réunis 
par cinq, indiquent, d'après les combinai- 
sons de TAlphabet Biforme, les quatre 
lettres qui forment le mot FUGE. 

il faut reconnaître que les explications 
trop succinctes et très-peu claires que donne 
Bacon à Tégard de ses procédés de chiffres, 
laissent beaucoup à désirer. L'idée d'em- 
ployer les combinaisons des lettres n'est 
cependant point indigne d'une attention 
sérieuse : il y a le germe de tout un sys- 
tème de chiffres qui n'a pas de limites. 

Remarquons, en effet, que des mathéma- 
ticiens ont cherché le nombre des combi- 
naisons que peuvent offrir les 25 lettres de 
l'alphabet groupées ensemble de toutes les 
manières imaginables : ils ont trouvé le 
chiffre formidable àê 42 quadrillons, 
165,840 trillions» 398,198 billiotts, 



K^ CHlFrRËS. 85 

058,854 millioDs, G95,625. Pour snkk 
toute rénornaité de ce nombre, il faut se 
souvenir qu ou a démontré que, pour écrire 
toutes les combinaisons qu*il énonce, il 
serait indispensable de se procurer une 
feuille de papier qui aurait 421,300 fois 
rétendue de la superiicio de la Terre. 

g IV. 

JÎTJme Cardan. 

Cet Italien célèbre, qui toucha à toutes 
les questions (1) et qu'une vaste érudition, 

* L'édition de ses Opéra amnia (Lyon, 1663, 
10 vol. in-rolio) ne renferme pas moins de fSi 
traités en ouvrages divers. On peut consulter, 
à l'égard de cet étrange écrivain, Buhle, Hit- 
loire de la Philonophie, tom. lY, p. 730-759 de 
la traduction française; la Rétrospective Review, 
tom. I, p. 94-112; un article de M. Mercey, Re-- 
vue de Paris, juin 1841 ; un mémoire do M. Franck, 
lu en 18M à l'Académie des sciences moralas et 
politiques. Quant au mérite de ses travaux scion- 



U i/art d'écrire 

jointe II des talents très-distingués, n\i 
point préservé d'une accusation de folie, a 
dit quelques mots de la Cryptographie 
dans son ouvrage de la Subtilité; les voici 
d'après la vieille traduction française : 

« Prenez deux peaux de parchemin de 
« mesme grandeur et semblablement ré- 
f glées et lignées; vous y ferez séparément 
« des trous assez petits, mais toutefois de 
« la grandeur et hauteur du corps que 
« vous avez accoutumé faire vostre lettre : 
« Tun de ces pertuis pourra tenir sept 
« lettres, l'autre trois, l'autre huit ou dix, 
« de s(»rte que tous les trous ou pertuis 
« qu'aurez faits pourront tenir ensemble 
« cent vingt caractères ou lettres. De ces 

tifiques, on peut consulter V Histoire des Sciences 
mathématiques en Valiez par M. Libri, tom. III, 
p. 107, et V Histoire de la Chimie, par M. Uoefer, 
tom. Il, p. 99. Cardan a trouvé deux biographes, 
l'nn en Italie (Mantovani. Vita di Cardano, Milano, 
1821, 8*), Pautre en Angleterre (G. l., the life avd 
timesofti. Cardan^ London, 1856, % vol. 8*). 



EN CfllFFRES. fi» 

« deux peaux, vous donnerez Tune h cehiy 
« auquel vous désirez escrire, et tous re- 
« tiendrez Tautre à tous; et, lorsque 
« voudrez escrire le plus brief et succinct 
« que tous pourrez, de sorte que Tostre 
« escriture n'excède pas ledit nombre de 
« cent TÎngt cnractères ou lettres : qui 
« est tout ce que les espaces et pertuis 
• susdits pourront comprendre. Et après, 
c< sur les pertuis, fuits comme je Tay dit, 
« vous escrivcz, au feuillet de papier qui 
41 est dessous, le sujet et sentence que 
« voudrez; et, après, à un autre feuil- 
9 lel, et conséquemniciit au troisième. 
« Cela estant fait, vous remplacez les es- 
« paccs et distances qui demeureront 
«> vides, ainsi augmentant ou effaçant jus* 
« ques à tant que vostre sentence et sujet 
« apparoissent et se montrent. Vous ac- 
9 complirei la seconde sentence au se- 
<f cond feuillet de papier, faisant extrait en 
« telle sorte, sur la première, qu'il sem 



86 l'art d'kcrikë 

« blera et appnroistra que les mots et pà- 

« rôles soient suÎTants et consécutiis Tuti 

9 après Tautre. La troisième adapterez 

« aussi à telle soite et manière; que, sans 

« aucune interruption ni intermission des 

« premières lettres, Tordre, la sentence, 

« le nombre des paroles avec la grandeur 

« se trouveront et apparoistront, retenant 

« mesure, sujet et intelligence. Et après 

« appliquerez, sur ce papier escrit en cette 

« manière, le parchemin que pour cette 

« cause vous aurez taillé et percé, faisant 

« en tout et partout, aux extrémitez des 

« trotts ou perçures, de petits et subtils 

« points, jusques k tant que le sujet et 

« intelligence des lettres parviennent en 

« la sorte que vous désirez les escrire. Et 

« après, celuy à qui vous les enverrez, 

« mettant sur elles son exemplaire percé 

« (comme il est dit), entendra subitement 

« et facilement la conception de vostre 

<( Volonté. » 



EN CHIFFRES. W 

S V. 
Le duc de Brunswick. 

Au eominencement du seizième siède, 
uu duc de Brunswick-Lunebourg, Auguste 
le Jeune, se livrait avec ardeur à Tétude; 
il publia divers écrits sous le pseudonyme 
de Gustave Selenus. Selenus, du grec Se- 
lène (la lune), était une espèce de traduc- 
tion du mot Lunebourg; Gustave est IV 
nagramme d'Auguste, Le jeu des échecs, 
rhorticulture, Tart d'écrire en chiffres» oc- 
cupèrent tour k tour Tattcntion de ce 
prince; son livre sur le sujet que nous 
traitons ici a pour titre : Systema in-' 
tegrum Chryptographim\ c'est un i«>folio 
de près de 500 pages. 

Trithème a firâmi la majeure partie des 
procédés décrits dans ce gît» volume» où 
il se trouve malheureusement baMROup 
d'idées cibalistiques; les exemples étant 



88 l'akt d^kcrirs 

pour la plupart empruntés a la langue 
allemande, il n'y a pas moyen de les re- 
produire textuellement. 

Parmi les méthodes que décrit le duc 
Auguste, en voici une dont nous n'avons 
pas encore fait mention : 

Formez trois colonnes, en inscrivant, ï 
coté des cinq voyelles répétées trois fois, 
les consonnes de Talphabet : 



a 


b 


a 


h 


a 


P 


c 


c 


c 


h 


c 


<l 


• 

1 


i 


• 

1 


i 


i 


f 





f 





m 





a 


u 


g 


u 


n 


u 


l 



Au lieu d'écrire les ]etti*es qui empor- 
ti»it les mots que vous voulez chiffrer, 
vous inscrivez celles qui leur oorrespon-' 
dent. Vous mettez par exemple un f en 
place d'un r, et vice versa, un o en place 
d^un fi ainsi de suite. 

Pour éaire Vempereur d'Autriche, 
Touf zMttrez icoakitk iaqujeak. 



'ETf CHIPPKES. S9 

Rien n'empédie d'employer à rebours 
un alphabet ainsi dressé ou de substituer 
quelques lettres à d*autre8, en suivant une 
marche dont on s^a convenu : cela aug- 
mentera beaucoup les difGcuUés du dé- 
chiffrement. Au moyen de méthodes sem- 
blables, le prince allemand montre 
comment les mots suivants : Cras eœpec' 
tabis adventum meum^ peuvent se tra- 
duire par zfxubxmsbeugpgeurmiolhrha. 

Les alphabets imaginaires et forges à 
plaisir, que fait connaître le prince, sont, 
pour la plupart, la reproduction ou Timi- 
talion de ceux qu'on trouvait déjà dans 
le livre de Porta; il a prjs la peine de 
faire graver (page 282) ralphabet qu'une 
tradition très-peu authentique alliibue à 
Fîilomon, et il n'a point oublié celui dont 
les habitants du pays d'Utopie font usage, 
ï ce qu'affirme Thomas Morus. Il a lui- 
même invente un moyen d'exprimer les 
Icttfes, au moyen d'un système de lignes 



90 l'art d'échirë 

brisées, obli^nesi parallMes, etc., ou bien 
grâce à des groupes de points disposés de 
diverses manières. Nous pensons qu'il 
serait superflu de donner la reproduction 
de ces alphabets fiintastiques, car le dttinp 
des inventions de ce genre est sans bornes. 



EN CHIFFRES. 9t 

ClIAPlTftE ni. 

lIKtiLES ET PHOCéDKS BB CRTPTOGniPllfE. 



§1". 

Préceptes généraux. 

Bfaîntenaiit laissons de côté les métho- 
des anjourd hui abandonnées qu'exposent 
les écrivains du seizième siècle, et cher- 
chons à fmre comprendre quelques-unes 
des règles auxquelles se conformaient, 
dans leurs dépêches chiffrées, les diplo- 
mates du siècle dernier, règles qui servent 
encore habituellement de guide â leurs 
successeurs. 

Les signes de ponctuation sont soppti- 
més, ou bien, lorsqu^'il est nécessaire 
d'en faire usage, aHn de donner jilus de 



$2 l'aBT o'kCIlIRE 

clarté au texte chiffré, on les indique par 
une marque particulière. Les accents et 
le trait d'union sont abolis. 

Ou emploie ce qu*on nomme des non- 
▼aleurs (otiosi cfuiracteres), afin de dé- 
router les curieux. Par exemple, on peut 
convenir que tous les nombres composés 
entre 200 et 400, entre 825 et 950 ne 
signifient rien et qu'il ne faut point en 
tenir compte dans le dcchilTrement. Le 
déchiffreur non initié pt^rdra beaucoup de 
temps à vouloir trouver un sens là où il n*y 
en a pas et sera complètement fourvoyé. 

Parfois, on a recours à un chitTre de 
contre-sens ; on convient que les phrases 
chiffrées, comprises entre deux marques 
convenues, telles que des croix, des pa- 
rcnthàses, des chilfres déterminés à 
Tavance, etc., doivent être entendues dans 
un sens diamétralement opposé à celui 
quelles présentent. Par exemple, la phrase 
chiffrée : « Le roi est malade, maia il va 



EN CIIII^FRËS. OS 

mieux et sa guérison est certaine,» doit 
être interprétée ainsi tout antrement : 
a Sa mort est certaine. » 

Il n^est pas mal d'employer dans une 
dépêche chiffrée des mots de diverses lan- 
gues ; le mystère sera encore plus difficile 
'à percer ; eo voici un exemple : U armée 
de l'Empereur se réunit aux troupes 
du roi; écrivez, en taisant usage du latin, 
deTallemand, du français, de l'espagnol $ 
de l'anglais; exercitus der Kayser se 
réunit à las tropas of the king. Chiffrez 
ensuite, et il sera presque impossible de 
découvrir ce que vous avez confié au papier. 

Les mots écrits avec des abréviations 
convenues à Tavance, présentent une res- 
source avantageuse ; il est bon de les in- 
diquer au moyen d'un signe convenu. 

On a vu des hommes d*Êtat employer 
la méthode d'écriture hébraïque, c'est-h- 
dire ranger les chiffres de droite à gati- 
che. 



H LARî D ECKiftK 

Un procédé qui n^est pas très-compliqué 
consiste à dresser le tableau suivant : 

aljcd efgh iklm nopq rstu xyi 
12 5 4 5 6 

I 

et 1*00 exprime chaque lettre du mot qu*oii 
veut déguiser par un double chiffre, dont 
le premier représente le groupe de lettres 
et le second, le rang qu'occupe dans ce 
groupe la lettre qu'on a en vue. Ainsi, IV 
s'exprime par 51, le g par 23; pour écrire 
fesiiva lente, on mettra : 

22 21 52 S5 51 41 11 53 21 41 55 21 

Il n'est pas sans exemple qu'on joigne 
au chifîre convenu pour représenter telle ou 
telle lettre, un nombre invariable qui, joint 
h ce chiffre, en donne un autre, sur lequel 
les efforts les plus opiniâtres n'ont guère 
de prise, lorsqu'on ne connaît pas le secret. 
Supposons qu'on soit convenu que le chif- 
fre 8 représente 1'/, 74 IV, 5t l'r, 26 !'(?, 
59 Tt; pour écrire le wi, on mettrait 8 



KM r.lIlFFRKS. 05 

74 31 2t> 59; mais, si on ajoute 6 à chacun 
de ces.noiTibreSy on aura 14 80 37 32 65. 
Il va sans dire qu'au lieu d'ajouter, on 
est parfaitement maître de retrancher, de 
multiplier, de diviser : l'essentÎQl est que 
les deux coiTespondants se mettent bien 
d'accord sur la marche qu'ils adoptent. 

§ II. 

Chiffre Imaginé par Mirabeau. 

L'imagination active de Mirabeau tou- 
chait à tout ; il inventa, dans un moment 
de loisir, une méthode de chiffre qui n'est 
pas sajis mérite. Divisez Talphabet en cinq 
parties égales, désignez d'abord chacune 
des cinq divisions par un numéro, indiquez 
ensuite par des numéros chacune des lettres 
que vous aurez groupées arbitrairement : 

1 
c f g u s 
12 3 4!; 



■T"»' 



^^^^1 



90 



L^ It T 


D^É 








2 








X II 

1 2 


ni 
3 

3 





k 


* 


s e 
1 2 


il 
3 

4 


h 

A 


3 




ri 1 
1 t 


l 


2 


w 
5 





5 
n i r t V 
12 3 4 5 

Les chiffres 6 à 9 et sont regardés 
comme non-valeurs. 

On range sur deux lignes les chiffres 
qui expriment la lettre qu'on veut repré- 
senter ; la première de ces lignes désigne 
le groupe ; la deuxième la place qu'occupe 
dans ce groupe la lettre en question. On 
indiijpiera donc ïh par 3 , le / par 4 , le d 
par I ; à côté de ces chiffres, tantôt à droite 
et tantôt à gauche, on mettra des non- 
valeurs afin de dérouter ; en conséquence, 
ces mots le Danube s'exprimeront, si Ton 
veut, par : 



EN CHIFFRES. 



97 



74 3948 



27 
«6 



50 



i6 
47 



3659 
4827 



Ou comprend de reste, que ceci peut 
être susceptible d*une multitude de com- 
binaisons diverses. 



â III. 



Dictjoanaii'e de coavenlion. 



Un procédé, très-souvent mis en tmge, 
consiste à former une espèce de diction- 
naire dans lequel des mots sont remplacés 
par d^autres ; en voici un exemple : 



Allies, 


lui. 


Camp, 


7 


Amiral, 


quand. 


C^non, 


doit. 


Arriver, 


être. 


Cavalerie, 


bon. 


Armistice, 


car. 


Conseil, 


w. 


AUraper, 


pourquoi. 


Définitif, 


mais. 


Ailendre, 


amie. 


Deux, 


voir. 


Avenir, 


2 


Demander, 


événement. 


balance, 


oui. 


Descendre, 


loi. 


Baron, 


3 


Division, 


non. 


Bayaroià, 


amen. 


Dii, , 


art. 


Bois, 


et. 


Tnipcreur, 


est. 



08 


LART D 


KCBIRE 




Entre, 


t^t. 


OsUacisu.e, 


X. 


Événement, 


demande. 


Partis, 


etca^lira. 


Faux, 


8 


Teur, 


z. 


Favori, 


jamais. 


Question, 


ami. 


Fureur, 


demain. 


Querelle, 


troc. 


Général, 


G 


Quand, 


bleu. 


Gloire» 


104 


Baviu, 


granil. 


Gouverneur, 


selon. 


Ilenfort, 


son. 


Hommes, 


tard. 


Bisquer, 


bas. 


Bonneur, 


gagné. 


Huiner, 


loup. 


Ici, 


il. 


Sottise, 


vert. 


Inventeur, 


hier. 


Surseoir, 


or. 


Levé, 


eux. 


Suisse, 


froid. 


Lignes, 


nous. 


Terrain, 


fier. 


Harécha), 


cerf. 


Trois, 


corde. 


Manœuvres, 


fin. 


Tuer, 


rond. 


Mille, 


âne. 


Union, 


Vienne. 


Naples, 


crue. 


Vivres, 


choix. 


Nouvelles, 


quart. 


Volontaires, 


lois. 


OpéraUon, 


sot. 


Voyage. 


Gaad. 


Ordroi 


ni. 







Mots perdus qu*on intercale dans les 
phrases : 

Assez, après, beaucoup, beauté, carré, 
dîner,, honneur, loterie, mer, noire, 
port, etc. 

En se servant de cette table, voici 



i EX CUIFFnES. Od 

comment on pourra rendre le passage sui- 
umï : 

« Le Conseil au rien statué de définitif. 
« Il parait cependant qu'on ne balance 
(( qu'entre deux partis, celui de risquer lu 
« levée du camp et celui de demander un 
ce armistice. » 

« Le w n'a encore rien, or de mais. Il 
parait cependant qu'on ne oui que loi 
voir etc, , celui de bas la eux du 7 et ce- 
lui de événement un car. » 

g IV. 

LcUrcs et mots expiimés par dci chifrres. 

Une des méthodes le& plus générale- 
ment arrêtées consiste à représenter clia- 
que lettre et un certain nombre de mots, 
de syllabes et de noms propres, par des 
chiffres; afin de mieux dérouter les inves- 
tigatioQS, on exprime la même lettre ou le 
même objet par divers chiffres ; les noms 



100 l'art u'éCRlRE 

de nombre eux-mêmes se traduisent par 
des chiffres. On forme ainsi des tableaux 
qui portent le nom de chiffre chiffrant ; 
en Toici un modèle. 



a 


G 


19 


500 


46 


h 


8 


50 


2S0 


20 


o 


4 


2 


125 


18 


d 


11 


41 


65 


87 


e 


31 


47 


201 


900 


f 


49 


9S 


113 


699» 


8 


25 


43 


68 


100 


h 


39 


93 


200 


8446 


i 


57 


89 


98 


105 


k 


64 


86 


244 


9797 


1 


51 


69 


83 


111 


m 


13 


63 


92 


536 


B 


54 


102 


107 


5886 


O 


58 


79 


129 


7654 


P 


21 


95 


140 


999 


q 


' ^ 35 


84 


110 


l!ttO 


r 


59 


81 


108 


548 


s 


52 


74 


103 


1370 


t 


56 


82 


104 


925 


u 


53 


97 


112 


1000 


V 


32 


94 


203 


n66 


X 


34 


114 


300 


966 


y 


67 


78 


201 


6740 


? 


42 


91 


106 


420 



EJH CIIIFFIIES. 



lOi 



Mots et syllahes. 
au, 
de, 
en, 
est, 
et, 
été, 
ici, 
le, 

mais, 
non, 

OQ, 

ou, 
pour, 
que, 
le roi, 
la reine, 
le ministre N, 
le prince N, 
Tarmée, 
il est parti, 
il est de retour, 
il est malade, 
]i est mort. 



i 



72 
45 

1 
76 

7 

27 

lôO 

9 

'm 

127 

88 

70 

65 J) 

80 

812 

770 

60 

779 

700 

576 

62 

5699 

671 

2b 

9b 

5 X 

14 

16 

y 



99 

77 

15 

1944 

101 

128 

270 

88 

71 

28 

887 

2471 

72 b 

699 

817 
44 
61 

790 

1620 

33 

753 

865 
96b 
90b 

6 X 
26 
73 

188 



66 
12 
50 
1186 
1650 
29 
109 
489 
1849 
75 
666 
740 
25 
778 
644 
776 
825 
970 
1718 
89^ 
854 
540 
86c 
92 c 
11 X 
20b 
18 
37 



40 
1777 
1401 
85 
90 
171 
2224 
1444 
2991 
55 
649 
48 
850 
400 
816 
555 
670 
819 
1200 
600 
687 
690 
4559 
88d 
98 d 
50x 
24 
22 
38 



«»^ ■!<*« 






n i/aut 


bV^CRinr. 






4 


1 


10 


45 


Tiii 


S 


115 


132 


650 


G63 


6 


119 


138 


192 


290 


M 

l 


lie 


134 


195 


274 


8 


118 


189 


194 


271 


i) 


117 


136 


189 


289 





190 


280 


651 


661 


Non-valeur», 


:^o 


à 4500 






Cootre-sens, 


+ + 


el : -: 







Suf^sons qu'on veuille chiffrer les li- 
gnes que voici : 

« Le roi est parti le 12 du courant pour 
t l'aimée, avec le prince N. et le mi- 
« nistre N. + il a àe bonnes intentions 
u pour votre Majesté +; Tannée, forte de 
« 150,000 hommes, doit passer le Danube. » 

On fera précéder cet avis de quelques 
mots qui lui donneront Tapparence d'une 
missive relative k quelque opération de 
commerce ou de banque, et on écrira : 

« Je n''ai pu encore réussir à effectuer 
« Tenlprunt que vous désirez contracter et 
« au sujet duquel vous m'avez écrit. 
• 3000 4499 812 570 9 14 IC 11 53 



RN CHIFFRES. 105 

€ courant SI 58 55 8t 69 6 i08 15 51 
i 47 19 52 201 4 5017 779 7 5778 60 
«14 b + 98 85 46 45 20 129 54 102 
« 900 105 105 107 104 201 5886 925 
« 98 7654 102 52 65b 1266 96 556 
« 90 b + 700 66 24 18 190 280 651 
« 661 59 58 15 65 47 74 11 129 98 82 
« 21 6 52 74 201 81 88 65 500 102 112 
« 5 51. Cette affaire pourrait avoir à 
' « Hambourg des chances de réussite. » 

Les mots, bonnes inUniionSf étant af- 
fectés du chiffre de contre^sens, il iaot 
comprendre : mauvaues ùitenlions oupe» 
favorables. 

S V. 

Théori* des ehiffres chinranu «t déchiffrants. 

Les auteurs de VEncyclopédie métho- 
dique ne pouvaient oublier, dans leur vaste 
répertoire de omni re scibili, Tart de 



i\H LAhT D*ÉCRIIIE 



récriture eu chiffre; voici le résumé dos 
notions qu'ils exposent à cet égard : 

Lorsqu'un agent diplomatique part pour 
une amknssade ou une légation, le minis- 
tère des affaires étrangères lui remet or- 
dinairement trois chiffres, le chiffre chif- 
frant, le chiiïre déchiffrant^ et le chiffre 
banal. Le chiffre chtfi'rant» partigé en co- 
lonnes, marque. dans la première non-seu- 
lement les lettres de Talphabet, mais aussi 
les syllabes, les mots et les phrases dont 
c^ agent aura probablement besoin dans 
le cours de sa négociation, les noms des 
souverains ou république, de leurs princi- 
paux ministres, etc. Cette colonne est quel- 
quefois imprimée, mais la seconde colonne, 
remplie en écriture par le département des 
affaires étrangères, renferme les nombres, 
diiffies ou caractères par lesquels on juge à 
pn^[M)« de désigner la lettre, le mot ou la 
phnie, oouune dans le modèle suivant : 



EN CHIFFRES. 




1 


Chiffre ehifffmt. 






ft -45. «eo. ZW. 


lOSO. 


805 


h 9. 506. 53. 


HIO. 


21 


c 15. 36 444 


ao 


1006 


Tempereur, 44 SI lin 


f 




le roi d^Espagne, 35. 88. 


301. 


1144 


rarmée des alliés, 80. 95 


1022 


888 


le pa|>e, ÎJO 302 467 


19 




avantage, 18. 75. 63 






brouiller, tt. 79 103 







lori 



On a soin de ranger par ordre alphabc" 
tique les npms substantifs, les verbes ci 
les phrases, selon leurs lettres initiales, 
pour la commodité du chiflreur, et l'on 
emploie divers nombres dont il peut se ser* 
vir à son choix, afin de désigner le même 
mot ; grâce k cette précaution» en cas d'in- 
cident, il devient plus difficile de décfaiiïi^r 
la dépèche. 

Les articles d'une dépèdie qui mérite le 
secret se chiffrent tout au long ; on n'y met 
point de mots écrits en caractères ordinai- 
res, parce que ces mots, quelque indifférents 



10C l'art D'ÉCHinK 

qu'ils puissent paraître, se trouvant dans 
le chiffre, peuvent faire deviner une partie 
du sens ou du moins découvrir la matière 
qu'on traite. Il ne faut pas négliger de 
distinguer tous les mots par un point, 
qu'on met derrière chaque nombre, puis- 
que, sans celte précaution, une dépêche 
serait indéchiffrable pour le correspondant, 
qui ne pourrait se servir de sa clef et qui 
verrait les nombres confondus. 

Le chiffre déchiffrant marque , dans la 
première colonne à gauche, tous les nom- 
bres dont le chiffre chiffrant est composé, 
depuis le plus bas jusqu'au plus haut dans 
leur ordre naturel, et la colonne à droite 
contient le root, la phrase ou la lettre que 
chaque nombre désigne. Lorsqu'on veut 
chiffrer quelque dépêche, on cherche dans 
ce chiffre déchiffrant la signification de 
chaque mot qui se présente, et on l'écrit 
au-ftessus entre les lignes, qui doivent 
être espacées convenablement, de même 



EN CIltFFRKS )07 

que les nombre? éloignés les uns des au- 
tres h une juste distance. 
En voici un exemple : 

l.e ^1ini^t^e d'ici est tout dévoué aux intérét^^ 
iVH 25 U 9 1904 76 336 

de l'Angleterre; c'est le fruit de dix mille 
888 54 il 68 9 

gui nées semées à propos. 
ol9 1106 718 

§VI. 

Autres systèmes de chiffres. 

Lorsqu'^on soupçonne que les chiffres ont 
été Tendus par des commis ou des servi- 
teurs infidèles, on tâche de tromper les 
gens qui ont fait acquisition du chiffre. 

Alors la Cour écrit à son ministi« ou 
bien le ministre mande à sa Cour le con- 
traire de ses véritables intentions. On ex- 
prime en chiffre la contre-partie des nou- 
velles qu^on veut transmettre; on met 
ensuite, dans la dépêche, un signe, une 
marque, un cjiractère, un mot ou une 



^ j j » • 



lOB l'akt d'égriiie 

phrase, dont on est convenu avant le départ 
du négociateur, indice qui annule non- 
seulement tout ce qui vient d*étre dit, 
mais qui désigne aussi qu'on doit Tenton- 
dre dans le sens op[K>sé ; c'est ce qu'on 
appelle le chiffre annulant. Lorsqu'on 
découvre qu'une puissance» rivale essaye de 
corrompre nos, employés, on lui fait par- 
venir adroitement un faux chiffre, et on 
l'induit en erreur en écrivant des contre- 
vérités. 

La Cour donne quelquefois un chiffre 
différente chacun de ses ministres dans 
le« pays étrangers; mais, comme il im- 
porte souvent au bien des affaires géné- 
rales, que ces ministres lient entre eux des 
correspondances, on leur remet un chiffre 
banal qui leur est commun à tous et dont 
ils peuvent se servir. 

Le chiffre à simple clef est celui où Ton 
se sert toujours d'une même figure pour 
designer une même lettre. 



.MM-Am 



EN CHIFFRES. 100 

Le chiffre à double clef est celui dans 
lequel on change d'alphabet à chaque mot 
ou dans lequel on emploie des mots inu- 
tiles. 

Une manière ))lus simple est de conve- 
nir d*un même livre peu connu, ou d'une 
édition ancienne, imprimée an loin, pres- 
que ignorée : on, forme une clef de trois 
chiffres ; le premier marque la page du li- 
vre qu'on a choisi; le seoMid désigne la li- 
gne de cette page ; le troisième marque le 
mot dont on doit se servir. Cette manière 
d'écrire ne peut être devinée que de ceux 
qui devineront d'abord à quel livre on a 
recours; elle présente d'autant plus de 
diflficulfés, que, le mèrûe mot se trouvant 
en diverses pages du livre, il est presque 
toujours 'désigné par différents chiffres; 
le mèttie chiffre revient rarement désigner 
le même terme. 

!t(Tu8 altons maintenant passer en revue 
quelques-uns des sysfèniés de Cryptogra- 



HO LART DECRIRE 

phie que développent les auieu* s du dix- 
huitième siècle, systèmes dont le fond se 
trouve déjà chez Vigenère et chez Porta, 
et qui ne sont pas indignes d'attention, 
quoique, n'ayant guère été mis en usage, 
ils soient demeurés dans des livres con- 
damnés à trouver peu de lecteui^. 

§ Vil. 

ChifTi-e par escelleocc. 

Tel est le nom que Dlandot, dans son 
Contre-espion, donne à un chiffre, qui 
réunit, d'après lui, le plus grand nom- 
bre d^avantages que Ton puisse désirer 
pour une correspondance secrète et qui les 
réunirait tous sans exception, s'il n'était 
pas d'une «lécution assez lente. €6t incon- 
vénient est compensé par l'immense dif- 
ficulté, par rimpossibilité même, on peut 
le dire, de découvrir, lorsqu'on ne possède 
pas le mot de clef convenu entre les cor- 



E.\ eniFFttES. ni 

reiii)ondanls, le sgns d'une dé|,écli« écriic 
de la sorte. 

Pour faire emploi de ce chiflre, il faut 
d'abord que les deux correspondants se 
munissent d'un cari-é, qui présente pour 
les lettres ce que le carré arithmétique 
pi^ésente pour les chilTres, c'est-à-dire 
que dans Tun on multiplie des lettres, 
comme des chiffres dans l'autre, en cher- 
chant le carré correspondant aux deux 
teimes qui se servent réciproquement de 
multiplicande et de multiplicateur. 

Voulez-vous savoir, par exemple, com- 
bien font six fois quatre ou quatre fois six? 
Cherchez, sur la première ligne horizontale 
de votre carré, l'un de ces deux nombres; 
cherchez ensuite l'autre sur la première 
ligne verticale, c'est-ànlire sur la pre- 
mière colonne. Voyez ensuite quelle est 
la case qui correspond en même temps 
à chacune de celles où sont ces deux nom- 
bres. Vous trouvez 24, qui est effectivement 



. -5--^ « 



112 l'art d*écrire 

le produit de six on de quati^ multipliés 
l'un par Tauire. De même dam le carré 
de lettres, si vous voûtez multiplier F par 
M, vous trouverez S à la case qui répond à 
FF de la première ligne et h TM de la 
première colonne. Vous trouvez égale- 
ment S à la case qui correspond h TM de 
la première ligne et à TP de la pre- 
mière colonne. Ceci posé , n'oublions pas 
qu'il y a un mot de clef dont les cor- 
respondants conviennent entre eux. Sup- 
posons que ce mot de clef soit blanc-bec 
(et si nous prenons ce mot pour exemple, 
c'est qu^il y a avantage à choisir des ex- 
pressions peu usuelles et qui déjouent tons 
les efforts d^imagination de ceux qui s'ef- 
forceraient de les deviner). Il faut que vous 
multipliiez constamment, par les lettres du 
mot choisi, toutes les lettres de la missive 
que vous voulez âWfirer; puis, cela fait, 
vous placez ôhacûbe dès lettres de blanc- 
hêc sous chacune des véritables lettres 



BiN ClllFrKE». 11-5 

^ue TOUS aurez à écrire, en rc pétant 
sans cesse le mot convenu et en recom- 
mençant à l*inscru^ aussitôt (pie tous 
Tavez termine. 

Supposons que vous veuillez, vous, gc- 
uéral d'armée,. transmettre cet avis: 

« Nous devons décamper celte nuit : » 
Vous le disposerez de la façon suivante : 
Nous devons décamper cette nuit. 
Blan cbecbl ancblabi ancbe cblan. 
Dans cet arrangement, vous regardez 
chacune des lettres vraies de ta missive, 
comme des chiffres d'un multiplicande et 
chacune des lettres du mot de clef, comme 
un multiplicateur. Vous opérez ensuite 
de la fuçon suivante : 

En multipliant N, première lettre vraie 
de la dépêche, par B, première lettre du 
mot de clef, vous trouvez sur votre carré 
la lettre P, à la case qui correspond d'un 
côte à TN, de Tautre au B. Vous placez P 

8 



lU l'art d'écrire 

pour première lettre de la missive chif- 
frée. 

La seconde vraie lettre est un 0, la se- 
conde lettre de la clef est L. La case qui 
correspond à et à L est un A, que vous 
posez comme second caractère. 

La troisième vraie lettre est un D, la 
troisième lettre du mot de clef un A . La case 
qui correspond à Tune et à Tautre lettre, 
vous donne Y, et la case qui correspond 
ensuite à S (quatrième lettre vraie) et h 
P^ (quatrième lettre du mot de clef), est G. 
Vous mettez pour troisième et quatrième 
caractère de votre dépêche chiffrée : Y G. 

Gontinant cette opération sur chaque 
mot de la dépêche vraie, vous arrivez à 
la phrase chiffrée que voici : 

pavgggerpœsfcrsgddsxvjqzuu 

Tant qu'on ne possédera pas le mot de 
clef, il sera impossible de deviner le sens 
d'un pareil billet. Yotre correspondant 



EN CHIFFRES. 115 

déchiffrera sans peine cette missive, en 
faisant une opération inverse k celle que 
vous avez accomplie. 

Au-dessous du billet chiffré, il écrira 
chacune des lettres du mot de def. Il 
cherchera ensuite successivement dans la 
première colonne du carré chaque lettre 
du mot de clef, et, à chaque lettre, il cher- 
chera sur la même ligne la lettre corres- 
pondante du billet chiffré. Alors ta lettre 
qui commence la colonne où se trouve 
cette lettre de chiffre est la vraie ; c'est 
celle qu'il faut écrire pour avoir la vérita- 
ble missive. 

On remarquera que chaque fois qu'une 
lettre se présente dans la dépêche vraiCf 
elle donne dans la dépêche chiffrée un ré- 
sultiit difféient ; aussi toute investigation 
deraeure-t-ellô stérile, lorsqu'on ne pos- 
sède pas les mots qui forment la clef d'un 
pareil chiffre. 

Cette méthode ebt, au fond, sauf quel- 



11(J l'art d'écrire 

qu.'S legci^es dilférences; la même que 
celle qu*expose le père Kircher, qu'il m^t 
en œuvre au moyen d'un tableau de chif- 
fres {abacus vumeralis), formé de lettres 
de l'alphabet disposées horizontalcmonl 
d'abordi verticalement ensuite, et donnant 
ainsi un carré composé de 576 cases, dans 
chacune desquelles est placé un chiffre. 
Le procédé qu'indique Neyron (Principes 
du droit des gens, Brunswick, 1783, 8% 
p. 170), rentre dans une catégorie toute 
semblable* 



â VIII. 
Grille en ch{\9sis. 

La manière d'écrire on chiffres au 
moyen d'une grille en châssis est bien 
simple et d'un usage facile. Elle réclame 
|.eu de temps. Il s'agit d'avoir un châssis 
découpé sur la longueur des lignes, comme 
le désigne la figure ; celui auquel on écrit 
possède un instrument tout semblable. 

Chacun des coins du châssis doit porter 
une marque différente, parce que ce 
châssis peut se placer dans divers sens. 

Après l'avoir posé sur une feuille de 
papier de même grandeur, en faisant atten- 
tion aux marques des quatre coins, on 
transcrit, dans les ouvertures, l'avis 
qu'on veut transmettre. La lettre une fois 
tracée d'après cette méthode, on lève le 
châssis, et, dans les intervalles qui se ren- 
contrent entre chacun des mots, on en 



n 



118 LART U*éGRlRE 

écrit tVautrcs, afin de remplir les vides ; 
on doit autant que possible les choisir 
de manière qu'ils puissent former un sens 
avec ceux qui ont été écrits dans les ou- 
vertures du châssis. 

Le correspondant qui reçoit cette épître 
applique, par-dessus chaque page, un châs- 
sis semblable ; alors tous les mots inutiles 
S8 trouvent masqués, et il n'a sous les 
yeux que les mots qui composent Taris 
qu'on s'est proposé de faire passer. 

La lecture d'une des œuvres les plus 
remarquables de M. de Balzac (Histoire 
des Treize) a révélé Tcxistence de la grille 
h bien des persomies fort peu au fait des 
procédés de la Cryptographie. 11 s'agit, 
dans le pas.age ci-dessous, d'un agent de 
change, qui, ayant en main une lettre 
adressée à sa femme, lettre qui présente 
un non-sens continuel, vient consulter un 
de ses amis, employé au ministère des 
affaires étrangères : 



EM .CHIFFRES. 119 

<( — G*est une lettre k grille .. Attends. 

(( Il laissa Jules seul dans le cabinet, et 
« revint assez promptemcnt. 

« — Niaiserie, mon ami ! C'est écrit avec 
« une vieille grille dont se servait Tam- 
c< bassadeur de Portugal sous M. de Ghoi- 
« seul, lors du renvoi des jésuites... . 
a Tiens, voici ! 

« Jacques superposa un papier à jour, 
a régulièrement découpé comme une de 
« ces dentelles que les confiseurs mettent 
« sur leurs dragées, et Jules put alors 
«t facilement lire les phrases qui restèrent 
« à découvert. » 

Donnons un exemple de ce procédé. 

Supposons qu'on veuille mander ceci : 
f Vous me trouverez très*dispo$é à vous 
rendre. » 

On écrit ces mets dans Tordre et à la 
place que leur assigne la grille dont on 
fait usage» et on remplit les intervalles, par 
d^autres mots, de façon que le tout pré- 
sente un sens assez raisonnable. 



•wmr—mmm' 



ti^\ i/aut d'ëcrirs 



Je I V0II6 I prie de [ me ] mamler si Vous 
[ trouverez ] bon, mon [ très- ] cher, que je 
I disposé j dès [T1 présent des effets que 
[ vous ] avez offert de me [ rendre, ] etc. 

Voici maintenant le vrai sens rétabli au 
moyen de la grille : 



vous 



] S 



I trouverez | [ très- | 

[ disposé I [ à I 



I vous] [ rendre. ] 

8 IX. 
Chiflj-e au moyen d'un c«<lr»o. 

Ce procédé est un peu compliqué. IL 
exijTe du temps cl de raUentîon, mais il 



EN ciiirrRi^s. i^t 

présente les plus grandes garanties d'un 
mystère impénétrable. 

Vous tracez sur un caiion un cadran, 
que ?ous divisez exactement en vingt-qua- 
tre parties égales et sur chacun desquelles 
vo js transcrivez une des vingtH]uatre let- 
tres de Talphabct. 

Vous avez un autre cercle de carton 
mobile avant un centre commun avec le 

m 

premier et pouvant tourner librement sur 
ce centre. Vous le divisez en un mémo 
nombre de parties, et vous y transcrivez 
également les diverses lettres de Talpha- 
het. Si les lettres sont rangées dans Tor-.' < 
(Ire ordinaire sur les deux cadrans, rem- 
ploi de ce moyen de correspondance devient 
plus commode. 

Le cadran mobile doit être placé de 
manière que ses divisions correspondent 
exactement à celles du premier cadran. 
On le dispose de la manière que Ton veut; 
€t, si la lettre U, par exemplo, du cadran 



122 l'art d'écriak 

intéiieur correspond à la lettre A du ca- 
dran extérieur, on place en tête de la pre- 
mière ligne qu'on écrit les deux lettres H 
et A : elles indiquent, k celui avec lequel 
on correspond, de quelle manière il doit 
de son côté placer la macliine parfaite- 
ment semblable dont il est muni ; sans 
une pareille indication préliminaire, il se* 
rait impossible de parvenir à s'entendre. 

Une fois les cadrans disposés, on prend 
la lettre que Ton veut chiffrer et que Ton 
a d'avance écrite en caractères ordinaires; 
au lieu de chacune des lettres dont les 
mots sont composés, on place, sur la dépê- 
che que l'on expédie, les lettres qui y cor- 
respondent sur le cadran intérieur. 

Si le mot que vous voulez chiffrer est 
celui de m, par exemple, vous mettrez, 
au lieu de l'r, la lettre â? qui y corres- 
pond sur le cadran intérieur, et ensuite, 
au lieu des lettres o et i, les lettres t; et n ; 
vous aurez ainsi xvn, et le déchiffrement 



EN CHtFFllËS. iiS 

ile ce que VOUS écrirez delà sorte sera 
presque impossible à celui qui ne saura pas 
que TOUS tous servez des cadrans, et qui, 
le sùt-il, ne connaîtra pas quelle disposi- 
tion vous leur donnez. 

Vous continuez de même pour toutes 
les lettres dont se composent tous les 
mots de la dépêche qu'il s'agit de dégui- 
ser. 

Votre correspondant met à profit Tin- 
dication il A, dont il vient d'être question : 
il donne à ses cadrans une disposition 
identique à celle que vous avez adoptée ; 
il cherche successivement sur le cadran 
extérieur toutes les lettres qui répondent 
sur le ciidran intérieur à chacune de cel- 
les qu'il trouve daps votre missive , et il 
arrive ainsi sans difâculté à traduire la 
dépêche qu'il a reçue. 



lil i/aIit d'écrire 



^ X. 

De IVmplvi des signes astronomiques. 

Les signes astronomiques, c'cst-h-dira 
ceux dont on fuit usage pour désigner les 
planètes et les diferscs parties du zodiaque 
ont été plusieui'S fois mis en usage comme 
dans la Cryptographie. Supposé que chaque 
lettre soit représentée par un de ces signes, 
il faudra beaucoup de temps et de peine, 
pour écrire une dépêche en suivant une 
pareille méthode, et le secret ne sera pa s 
mieux Cîiché. Un chiffre de'ce genre ne 
présenté pas plus de diflicuUé que celui 
dans lequel chaque lettre de l'alphabet est 
représentée par une autre lettre, a, par 
exemple, étant remplacé par rf, b par e, 
g ^^t ff ainsi de suite. 



EK CUIFFRES. m 

On éprouve moins d'embarras à luire 
iisiige d'un chiffre» dans lequel les signes 
astronomiques sont mélos à des lettres 
empruntées aux alphabets hébraïque , 
grec ou latin, ou bien à des chiffres numéri- 
ques, h des figures de mathématiques. Cha- 
cun de ces signes exprime une lettre, une 
syllabe ou un mot. Cette méthode était du 
goût des anciens auteurs; mais aujour- 
d'hui elle ne trouve guère de partbans. 
Vigenère se plaît à en fournir des exem- 
ples qu'il développe avec sa prolixité ha- 
bituelle. 

Voici, parmi les procédés de ce genre, 
le meilleur et le plus simple. On partage 
Talphabet en cinq parties ou plus; on 
place chacune de ces sections dans un carré 
particulier, et on désigne chaque carré par 
un signe astronomique convenu ■ Donnons- 
en un exemple. 



126 




LART 


D^é 


CRIRB 






a b c d 




e f g h 




i k 1 111 


o 




3 


- 


V 




n p q 




r s l u z 






d" 




? 





Il vaut mieux de ne pas laisser les let- 
tres de Talphabet rangées dans Tordre 
habituel. Lorsqu'on veut faire usage des 
tableaux ci-dessus, il faut, pour exprimer 
chaque lettre, écrire le signe qui dénote le 
carre, et indiquer la lettre qu'on a en vue 
par un numéro qui correspond à la place 
qu'elle occupe. L'e se trouvera donc re- 
présenté par 31, Tm par Tfp^, Vo par 
ç}^, etc. Si Ton veut transmettre Pavis 
que « Tannée a passé le Danube, » on 
mettra : 



EN CHIFFRES. liT 

ip3 01 ^1 1(1^ 3c 3e ©1 cTs 0* 

$2 ç:2 3i ^Tsa* ©4 01 

Ce procédé est un peu long, puisque 
chaque lettre réclame Temploi d'un signe 
et d'un numéro ; il ne présenterait pas de 
très-grandes difficultés à un dochiffreur 
habile, s'il était mis en usage de la manière 
que nous indiquons, tnais il est aisé dV 
ajouter des complications qui en déguisent 
mieux le mystère. 

g XI. 

Signes de la inném(mique. 

L'idée d'appliquer à la Cryptographie 
les signes imaginés pour la mnémonique 
ou l'art de la mémoire, s'est naturellement 
présentée à quelques Imaginations. Jean- 
ilenri Dobel, dans son Collegium mm- 
nionicum ou Révolutions d'un nouveau 



^ • ' 



l*2ê LART D CCAinE 

secret de Vart de la pensée (en aUemim), 
Hambourg, 1707, 4"), a travaillé en ce 
sens. 11 désigne par les numéros 1 à 25 
chacune des lettres de Falphabet; il tra- 
duit ainsi en chiffres chaque phrase conte- 
nue dans la dépêcl.e qu^on veut rendre se- 
ci-ète. Enfin, il transforme ces chiffres eu 
mots que donne sa mnémonique chifiréc. 
Il écrit ces mois tout au long. Il arrive 
ainsi à des séries de mots latins qui n'of- 
frent aucun sens en apprence. 

Dobel représente, dans ses procédés de 
mnémonique, les chiffres, par des con- 
sonnes; ainsi 1 «»b, p, w; 2*— c, k, q, 
X ; 3 -— f ou V ; 4 » g ou j ; 5 •— 1 ; 6 
— m ; 7 — n; 8 « ri 9 — s ; — d 
ou t. Veut-il exprîmer mnémoniqurment 
ces chiffres, il prend des mots latins dans 
lesquels se rencontrent les consonnes' qui 
correspondent aux chiffres en question. 
Test ainsi que le nombre 567 aura pour 
expression les lettres Im-^ei pour rc- 



EN ClilFFHES. HO 

présenter ces lettres, il a recours aux 
mots : liinen, lumen, lamina, columen. 
Ce procédé exige beaucoup de temps, de 
peine 'et de papier. Une page entière 
d'écriture chiffrée est nécessaire pour ex- 
primer quelques lignes de la dépêche qu'il 
s'agit de transmettre. Ces inconvénients 
sont cause qu'on n'a peut-être jamais fait 
usage de cette méthode mnémonique, qui 
est, d'ailleurs, il faut en convenir, une de 
celles dont Tinterpi'étation présenterait 
le plus dedillicultés. 

g Xil. 

Correspondance au moyen d'un jeu de cartes. 

11 faut avoir un jeu de cartes et dispo- 
ser toutes les figures dans un ordre quel- 
ciMique dont on sera convenu avec son 
correspondan|. On doit également déter- 
miner l'ordre du mélange qui doit se faire 
«le ces cari. s. 



* » 



150 L ART 1) ECRlltE 

Ces deux choses ayant été réglées, vous 
écrivez, comme d'ordinaire, votre lettre 
sur une feuille de papier, et, arrangeant 
ensuite le jeu de cartes dans Tordre dont 
vous êtes convenu, vous les mêlez et vous 
tracez sur chacune d'elles, en commen- 
çant par la première qui se trouve alors 
dessus le jeu, successivement toutes k*s 
lettres qui composent ce qui a été écrit 
sur le papier; lorsque vous avez placé 
une lettre sur chacune de ces cartes, vous 
les mêlez de nouveau, toujours dans le 
même ordre et sans y rien changer, et vous 
continuez de placer de même toutes les let- 
tres qui suivent ; vous reitérez cette opéra- 
tion jusqu'à ce que vous ayez transcrit tou> 
tes les lettres qui composent ce que vous 
voulez mander. Ayez Tattention de mettre 
un point après chacune des lettres qui 
terminent un mot, afin d'indiquer la sépa- 
ration de tous les mot:*. 

Supposons qu'on soit convenu de se scr- 



LN eu IF FI. ES. 151 

vil* (l'un jeu de [liquct de trente- deux 
cartes, dis|io$é dans l'ordre qui suit, et de 
mêler ce jeu, en mettant alternativement à 
chaque mélange trois cartes au-dessus des 
trois premières et trois aii-dessous. Le 
jeu étant remis dans son premier état, 
chaque carte sera chargée des lettres ci- 
après. 

On suppose que la lettre chiifrée con- 
tient la phi-ase suivante : 

« Je connais trop, monsieur, rintérét 
« que vous prenez à tout ce qui peut 
« augmenter ma félicité, pour retarder 
« plus longtemps à vous confier le dessein 
« que j'ai formé de m 'unir par les liens 
« les plus sacrés a la famille de... p 

". LETTKKR DE LK PHKAKE 

oHDRK nr.H UARTE8 ci-clessus, 

convenu^ dans l'ordre où elles dci- 

eiilio ct'ux qui s'écrivoni. vent se Irouver 

sur chacune des caries. 

Méimige, 12 5 4 5 6 * 

as (!(; piquCf ii r t i I •; 

ïlix lie rarrcaii, ^ c a ii u r 

• huit «le «œur, i n r <| •> r 



152 l'art o'éCRIKË 

LBTTRBS IIK LA PHM»K 



OKDIIC DES CARTES 

convenu 


ci-ac 
dans rordiv 


«SUS, 

ou dles doi- 


eiilre ceux qui s'écrivenl. 




vent se trouver 


sur 


chacune des cartes. 


roi de pique, 


P 


P 


a 


11 n é 


neuf de trèfle, 


m 


e 


f 


f s s 


sept de carreau, 





u 


e 


i 1 a 


neuf de carreau, 


e 


t 


s 


t t 1 


as de trèfle, 


u 


a 


1 


e e a 


valet de cœur. 


r 


u 


V 


m s f 


sept de pique, 


l 


e 


i 


s n a 


dix de trèfle, 


r 


s 


l 


c 1 ni 


dix de cœur. 





a. 


e. 


r. i 


dame de pique, 


1 


u 


P 


s 111. 1 


huit de carreau, 


i 


s. 





i» c. 1 


huit de trèfle, 


n 


P 


u 


d e. 


sept de cœur, 


V 


q 


î 


a f d 


(laine de trèfle. 


l 


u 


e. e. 


neuf de pique, 


s. 


i. 


u 


j r. elc 


roi de cœur, 


t 


g 


e 


e c. 


dame de carreau. 


e 


m 


r. 


r. ni 


huit de pique, 
valet de trèfle, 


r 


e 


m 


1 11 





t 


d 


p. p 


sept de trèfle, 


n 





e 


s. a 


as de cœur, 


II 


a 


r. 


a. r. 


ucuf de cœur. 


c 


e. 


r. 


V 1 


as de carreau, 


s 





r 


o i 


valet de pique. 


t. 





c 


u e 


dix de pique, 


J. 


t. 


1 


e. c 


roi de carreau. 


e 


c 


i 


d s 


dame de cœur, 


c 


e. 


c 


c p 


roi de trèfle, 


q 


Il 


II 


a N 


valet de carreau, 


II 


t 


J! 


y i» 



RN CHIFFRES. IS'i 

Toutes les lettres qui composent les 
mots de la dépêche qu'on veut chiffrer 
•lyant été séparément transcrites sur ces 
trente-deux cartes» comme il vient d'être 
indiqué, vous mêlerez indistinctement ce 
jeu de cartes, et vous l'enverrez à volro 
correspondant. 

Manière de lire. 

Celui qui reçoit ce jeu de cartes le dispose 
d'abord (eu égard à la figure des cartes) 
dans Tordre qui a été convenu ; il en fait 
un premier mélange, et transcrit successi- 
vement e'i de suite toutes les lettres qui 
se trouvent les premières en tête de cha- 
cune de ces trente-deux cartes, en ayant 
bien attention de ne pas les déranger dr 
leur ordre; après quoi, il les mêle de nou- 
veau et recommence cette même opération 
jusqu'à ceque toutes les lettres soient trans- 
crites : ces lettres forment naturellement 
le discours contenu dans la dépêche en 
chiffres. 



J.-ii L*ART D*ÉCRIRF. 

Une précniition qui n'est pas h dédai- 
gner consiste à écrire en encre symj n- 
thiquc les caractères tracés sur ces cartes; 
si elles viennent h tomber entre des 
jnains indiscrètes, rien n^indique IVxis- 
lence du secret qui leur a été confié. 

gxin. 

De l'emploi des lettres nulles, alin de cacher \o sens 
d'une dépêche. 

On écrit en clair la dépêche qu'on ve..l 
transmettre, mais on y mêle des mots 1 1 
des syllabes de façon à obtenir une suite 
de mots étrangers n'appartenant à aucune 
langue et qui ne présentent aucun sens. On 
partage les mots composés de plusieurs 
syllabes, et d*un mot on en fait plusieurs, 
en ajoutant des lettres que le décbiffreur 
regarde comme nulles» 

Voici un passage emprunté k la Germa- 
nie de Tacite et écrit d'aprt's un pareil 
systt'me. 



EX CIIIFFKES. J'.'i 

Dans la première ligne, les trois pre- 
miers mots : Lampsi deso mleu, et le der- 
nier : nous, sont nuls. 

Dans chacune des lignes suivantes, le 
premier et le dernier mot le sont également. 

Dans chacun des autres mots placés 
dans ces diverses lignes, la première et la 
dernière lettre sont nulles. Il va sans 
dire que le choix des syllabes et des let- 
tres aflectées de nullité est parfaitement 
indifférent. 

Ceci posé, on peut écrire la phrase sui- 
vante. Nous mettons en italique, pour plus 
de clarté, les lettres qu'il faut conserver ; 
mais, dans la dépêche chiffrée, rien ne 
doit distinguer ce qui est valable et ce 
qui est ajouté. 

Lampsi deso saleu eregesxx %ex^ mobio nous 
fulher dilates uducesn iexï mirhile^ ai 
ma ts«mttntà. oneci gregio afre/so sinfinie 

et 
yes a/fls sauta dibei strat ^poteso elasiy 

par 



136 L^RT d'Écrire 

lii sf /a sdncesï sexe ma oplos spo/mi sînd 
inio squame simpei sln'op a/?îo oprofn-- 

ptuim que 
1o esii econspû ticuh. osim santev so^ts do 
le &emo saguntu sadmio eraliox an^s 

spraei y 
allos osunt^ dorche. 

\jp. passage de Tacite se trouve ainsi 
très-clairement énoncé : 

Beges ex nohiliiaie^ duces ex virlute 
sumunt. Nec regibus infiiiUa aut libéra 
potestaSf et duces potius quam imperio 
si prompluif si conspicui, si anie aciem 
agunt, admiratione prassunt. 

Gomme il serait fort long d'écrire en 
tête et à la fin de chaque ligne un grand 
nombre de mots nuls , on simplifie de di- 
verses manières le système que nous ve- 
nons d'indiquer. 

On entremêle, aux mots de l'avis qu'on 
veut transmettre, des lettres prises au ha - 
sard, de façon, par exemple, que chaque 
lettre vraie est précédée de deux lettres 



R}^ CIIIFFBES. 1S7 

fausses. Pour écrire newo est ciomt (per- 
sonne n'est h la maison), tous mettrez : 

cxnpUrkmbdo ynecssmjt Ibdfkuophmcu?, 

Ou bien on mêle aux mots certaines syl- 
labes qui n'ont aucun sens. Pour dire : Pa- 
ter meus non est domi, vous mettrez : 
Paba^eb^r mébeubttô nobon ehest dolo- 
mib'i. Fababribicâbntober voudra dire : 
Fabricator. 

Un procédé du même genre consiste à 
renverser les mots de l'avis à transmettre, 
c'est-à-dire à les inscrire de droite k gau- 
che, en mettant au commencement et a la 
fin de chacun deux lettres qui ne signi- 
fient rien ; d'après cette méthode, pour 
écrire : « Tarmée est battue, » on pouria 
mettre : nheemralxà ve^jb iqeuttabkt. 

Tout ceci, on le comprend de reste, est 
susceptible de modifications très-nom- 
breuses; mais il faut reconnaître égale- 
ment qu'un déchiffreur, ayant de l'expé- 
rience et bien versé dans les mvstères de 



138 - l'aUT D*KGRlltE 

la Cryptographie, n'aurait pas beaucoup dt* 
peine pour (fécouvrir les secrets cachés 
sous un pareil voile. 



§ XIV. 

hc la st^^anomélrograpliie. 

Ce procédé est décrit en^étail dans un 
ouvrage publié par Mathias Ùken, en 1 751 . 
Donnons une idée de ce chiffre, qu'on peut 
regarder à juste titre comme un de ceux 
dont il serait le plus difficile de trouver 
la clef. 

Vous écrivez en caractères ordinaires 
Tavis que vous voulez transmettre en se- 
cret, et vous placez sous chaque lettre un 
chiffre, en ayant soin de faire suivre les 
numéros dans Tordre habituel. 

Supposons que vous voulez mander la 
nouvelle de la mort de Tempereur d' Allema- 



KN r.lIIFFnKS. \'oU 

jiiip, nonvollc que vous exprimez en latin. 

HERI OBIiT 
1234 .%7S9 

C.VROLUSAUGUSTIIS 
10. H .12.10.14.15.16.17.18.19.20.21 .22.Î3.24. 

1 M P E R A T R , 
•25.26.27.28.29.50.31.32.55 

Vous VOUS êtes muni d'un certain nom- 
bre de tableaux numérotés; chacun d'eux 
porte les vingt-quatre lettres deTalphabct, 
de A à Z, et, à côté de chaque lettre se 
trouve inscrit la moitié d'un vcre penta- 
mètre ou hexamètre. Les tableaux p-iii^ 
contiennent les premiers hémistiches, les 
tableaux impairs les seconds; de sorte 
qu'en réunissant les tableaux 1 et 2, o et 
4, 5 et G, on obtient les vers entiers. En 
voici un exemple : 

Tableau 1. Tableau 2. 

A Ne mora te teneat a -chartaB perfringero 

gomma m. 

b N> riinctare proror b sua vinciila de- 

moro charla*. 



« r 



140 I. ART D Er.RIEE 

h Nn dedigncritt e peregrinam evol- 

vere chartaro. 

Tablenu 3. Tableau -4. 

r A libi dilecUs i credÎTencreplagis. 

Tableau 5. Tableau 6. 

o Non tibi damniferos b depingel epistol.i 
• casus. 

Tableau 7. Tableau 8. 

i Latitias mentis i demat ut iHa. 

Cherchez dans le premier tablenu Thé- 
mistiche qui correspond à la lettre H et 
dans le second celui qui est placé h côté 
de la lettre Ë ; voyez dans le troisième ta- 
bleau quelle moitié de vers correspond è 
la lettre R, et, dans le quatrième, exami- 
nez ce que vous donne I. En écrivant à la 
place de chaque lettre rhémistiche qui lui 
correspond, vous exprimerez te root Heri 
de la manière suivante : 

>'e dedigneris peregrinam evolvere chartam, 
A tibi dileclis, credi venire plagis. 

En suivant ce même procédé, vous com- 
pléterez facilement votre dépêche. 



EN CHIFFRES. U\ 

11 convient de se servir d'un assez 
grand nombre de tableaux, afin de ne pas 
se trouver dans le cas de répéter les mê- 
mes vers, si la dépêche est un peu lon- 
gue. Uken a pris la peine de dresser qua- 
rante-quatre tableaux qui contiennent 656 
hémistiches et qui offrent ainsi le moyen 
de chiffrer un avis comjiosé de ce nombre 
de lettres. 

Le déchiffrement est facile pour votre 
correspondant. Il prend ses bbleaux, les- 
quels doivent, cela va sans dire, présenter 
la reproduction textuelle des vôtres; il 
cherche quelle est la letlie qui correspond 
à chaque hémistiche, et, en écrivant Suc- 
cessivement ces lettres, il est prompte- 
ment au fait de ce que vous lui deman- 
dez. 

On voit que la stéganométrograpliie 
est pour les non initiés une énigme dont le 
mot est introuvable; mais elle a Tinconvé- 
nient de prendre beaucoup de temps et 



m l'a ni o'ÉCKiiiË 

d'exiger des écritures considérables, puis- 
que chaque lettre de Tavis à traustnettra 
se trouve, dans la dépêche chiffrée, expri*. 
luée par plusieurs mots. 

§ XV. 

Gliirrre formé par un sys'èine de lettres ul de points. 

J. H. à Sunde, dans sdiSteganologia, in- 
dique un chiffre assez ingénieux, qui con- 
siste dans remploi combiné des lettres et 
des points. Les lettres sont réunies deux 
à deux, et, au-dessous de chaque groupe, 
on place un système variable de points. 
La chose se dispose de la sorte : 

ac io ub cd % lik Ini iip qr !)l vy xt 



• > ■« t 



Au lieu de la lettre a dans la dépêche 
à chifTrer, on place e avec un point devant; 
au lieu de Ve on écrit (if en plaçant cette 



K.N CUlFFliES. ir« 

fois lu point après; au lieu du d on écrit 
un Ct que précèdent quatre points disposés 
en carré; ainsi de suite. De cette iaçon, le 
mot amen se trouve exprime par les let- 
tres et les points qui suivent : 

el i a. V p 
et le mot Rhm se chiiïre de la sorte : 

q r'.K' o V P 
'à XVI. 

Db la subslilUtiuii des lellre» les unes aux autres, 
d'après un système compliqué. 

U est un système de cryptographie qui 
consiste simplement à remplacer les lettre.^ 
de la dépêche par d'autres lettres rangées 
d*après un oindre convenu. L'opération est 
longue, mais on obtient ainsi la presque 
certitude d'échapper aux investigations , 
car le grjnd nombre de combinaisons dont 
un pareil procédé est susceptible rend l.i 
découverte de ce secret exlrciMcmentdifli- 
cilc. 



L_ ••*. •• JPL-* - . 



Supiu... 


ils qu'on se soil mis d'aiwrd 


jiour rawgc 


rleschifrreslàKtdansl'oitliv 


suLvunt : 




1 a 


S 4 5 6 7 H 9 10 







il faut uloi's que lu première lettre lie la 
vraie ilé|»Ëchc soit, dans t'écrit cliîlTré. 
reriiplacéu |Kit' lu quatiîème lettre de celte 
itiènie dêiièclH:; i» seconde, par la sep- 
tième; la~ trnisièiiie, par la seconde; la 
quati'iëine. par la neuvième; ainsi Je suite. 

Ou range par décade ou dizaine les 
mots de la dépèrbe i cbilTj'er. 

Supposons qu'on leudle mander: 

« Le l'oi de H^movre est trës-malade, . 
et il ne pi;ul vivre longtemps, t 

On raisonnai de la sorte : 

La première lellre de la déjiâche, t, coi- 
respond à la quatritme. o; la seconde, e, à 
la qualriËtne, k; la Icoisième, r, b la secon- 
lit', f; Li<|uatrii:mc,o,ïi la neuvième, n, etc. 
On éi:i'ira en conséquence les lettre» qui 



r 



KN GUlFl'liK:^. . lAo 

forment successi rement lu dépôchecliinVêc. 

A la seconde dizaine, on procède, de 
même ; la correspondance des lettres se 
trouve toute nouvelle. 

Voici comment les vingt premières let- 
tres de la phrase prise |K)ur exemple se 
trouveraient chiffrées .: 

olienloirJaetrevsstre 

H importe de ne placer aucun point, 
aucun signe, qui indique la séparation dos 
mots ou la fin des dizaines ; on peut très- 
bien, d'ailleurs, au lieu de se borner h 0])é- 
rcrsur dix lettres, étendre à vingt ou h trente 
lettres ce système de rentplacement. On 
peut aussi, à chaque division nouvelle, em- 
ployer pour les chiffres un ordre différent, 
sur lequel on se sera mis d'accord. De 
celle manière, on rendra le problème plus 
que jamais insoluble pour les non initiés; 
mais il faut reconnaitre que cette méthode 
prend du temjis, et qu'à. moins d'une ;«»' 

10 



146 LAU1 D ËCRIR£ 

tciitiou furt soutenue ou est exposé, en 
chiiïrattt de la sorte, à couimettre bien des 
eiTours. 



'4 XVII. 
chiffre inventé par Uei'iuanu. 

Un pi'oresseur allemand, Hermanu, se 
vaulu, en 1752, d'avoir inventé un chiffre 
alisolumeut indéchiffrable; il mit tous les 
malhéiuaticiens de TËurope et toutes les 
sociétés savantes au défi d'en découvrir lu 
clef. Un réfugié français, Beguelin, fut assez 
habile ou assez bien inspiré pour la trou- 
ver dans r«ispace de huit jours, et il pu- 
iilia les détails de sa découverte dans les 
Mémoiresdel" Académie de Berlin, 1758. 

Le chiflre d'Hermann se compose de 25 
c.iractèi'cs différents et des neuf chiffres de 
r.iiilhniéliquc, de 1 à U. A chacun de ce^ 



£M CHIFFRES. U7 

caractères ré[>ond immédiulemeut au-des- 
sous une lettre de Talphabet, et chaque 
mot est sé))aré du suivant par un point. 
Plusieurs de ces caractères en ont un autre 
immédiatement au-dessus d'eux, et ces ca- 
ractères supérieurs sont en partie les mê- 
mes que les inférieurs; quelques autres si- 
gnée, qui ne consistent qu'en points ou en 
simples lignes, paraissent affectés à la ran- 
gée supérieure et ne se rencontrent nulle 
part dans rinfcrieure. 

Après bien des tâtonnements et des vé- 
rifications, Beguclîn reconnut que le chif- 
fre sur lequel il opérait était soumis à trois 
lois particulières : 

1** Tout caractère initial inférieur dont 
la valeur est au-dessus de 9 conserve sa 
valeur constante; 

2" Tout caractère initial inférieur dont 
la valeur affirmative est au-dessous de 10 
Miul, dans cette place, le double de sa va- 
leur oi'dinaire. 

3" Tout caractère inilial inférieur dont 



U8 l'aut d'éciiiue 

la valeur négative est au-dessous de 10 
vaut, dqns celte place, le double de sa va- 
leur ordinaire; plus une unité. 

Diverseslois particulières découlaient de 
ces lois générales : 

4' Le caractère supérieur initial cou- 
serve toujours sa valeur ordinaire ; 

5' Le caractère supérieur ne sert qu*à 
déterminer par sa valeur la lettre placée 
immédiatement au-dessous et nullement 
celle qui suivra à droite, à moins que le 
caractère inférieur ne soit zéro ; 

6" Lorsqu'au milieu d'un mot il y a un 
signe ou un caractère supérieur, ne fut- 
ce qu'un point, comme on a alors déjà 
deux valeurs requises pour déterminer la 
lettre, on ne joint pas celle du caractère 
qui précède à gauche; 

7° Un point placé sur un caractère qui 
n'est pas un chiffre arithmétique aug- 
mente toujours sa valeur d'une unité; 

8' Un point placé dans la ligure d'un 
tel caiaclèro le rend simplement négatif, 



KX CHIFFRES. Mî> 

sans rien njoviler ni diminuer à sa valeur; 

9" Une valeur m'gative ou soustractive 
n'est telle que relativement au caractère 
qui précède; toute valeur est affirmative 
ou additive par rapport au caractère sui- 
vant. De là vient que Finitiale inférieure 
est toujours affirmative, quoique le carac- 
tère soit négatif; 

10" Comme les lettres répondent à des 
nombres affirinatifs, la différence entre 
deiix caractères, dont Tun est négatif, es^ 
toujours censée affirmative, quoique la va- 
leur du caractère négatif soit la plus 
grande; 

11° Lorsque le caractère h gauche est 
zéro, il faut ajouter la valeur du caractère 
qui précède le zéro. 

Tout cela était assez ingénieux, mais 
Taccumulation de ces lois rend un pareil 
cliiffre d'un usage bien peu commode. Il y 
a de la bizarrerie dans la détermination de 
la valeur des lettres alphabétiques; et la 
multiplicité des règles, jointe aux diverf* 



». 



130 L*AHT D'éCRIDR 

usages d'un même signe, donnerait cer- 
tainement lieu dans la pratique à bien des 
fautes d'inadvertance. 

flermami eut tort d'annoncer son inven- 
tion d'une manière emphatique; il n'est 
guère de chilfre dont^n ne puisse venir à 
bout, dès que Ton en connaît la langue et 
que les mots sont distingués; à plus forte 
raison laissent- ils échapper leur secret 
lorsqu'on n*a pas eu le soin d'éviter le re- 
tour des mêmes signes pour exprimer la 
même lettre. Le chiffre du professeur alle- 
mand roulait sur des valeurs numéraires; 
il ne devait donc y entrer aucun chiffre 
arabe, ou du moins ceux-ci ne devaient pas 
y conserver leur valeur connue. 

Donnons maintenant un exemple de la 
façon dont se présentait le chiffre en ques- 
tion ; la phrase en langue allemande 
qu'Hermann avait déguiiiée au moyen de 
sa méthode signifie dans une traduction 
mot à mot et interlinéaire : « La orientale 



BIM^P— iBilPBW— — 1— ^1— ^ai— — gC J^ < W » M-n ^ia ■»- f 1 » ^ 



EN CHIFFRES. 1f>l 

science, au lieu des lettres, avec nombres 
et caractères, dVîcrire. » 

Dieorienialische Wissenschafl, amtaU 
der Buchstaben, mil Zalil iind Caractern 
%u schreiben. 
— ^. • ^ -2. 

ITA/Saoi^ (Te A3 A. 

X » . • .. . 

8V3;a" 8 0*. 2 AV. 
AGVOVAaW. 7Î0A. 

G^ I T. 3 T3. 

VâO ^^M (^ V. J7T. 

^ 8 (rT2 A 2 ^^ A. 

* Voir la planche IX, à la fut du volomn i\e 



Irii i/aKT D'éciilRK 



Il n'a jamnis cU* fait usage de ce chif- 
fre, et il est (lemeuré dans le domaine 
des théories imaginées à plaisir. En h 
perfectionnant, en évitant les eireurs quV 
vait commises Hermann et qui mirent 
rinterprète sur la voie de sa découverte, 
on pourrait encore obtenir, sinon un chif- 
fre radicalement inexpugnable (le mot 
impossible ne doit pas être admis en crypto- 
graphie), du moins on en aurait un qui 
présenterait les difficultés les plus formi- 
dables; mais une pareille méthode reste- 
rait toujours un simple objet de curiosité, 
car elle serait trop compliquée pour que 
la diplomatie en fit usage. 

§ XVIII. 

Po remploi des notes do musique. 

Ce système de cryptographie repose sur 

rilisloiro de l'Acndémio dos scionco- ol l»ello-- 
lHln»«i do Berlin on l7."iS. 



KN CUIFFP.ES. l.'ô 

\o même principe que celui donl la des- 
cription se trouve dans la IX' section de 
co chflpitre. Vous décrivez sur un carré de 
carton uq cadran divisé en vingt-quatre 
parties égales, et dans chacune d'elles tous 
transcrivez une des lettres de l'alphabet. 
Un autre cadran mobile, sur un point cen- 
tral et concentrique au premier, est divisé 
de même en un pareil nombre de parties 
égales. Il est réglé circulairement, comme 
un papier de musique. Vous marquez, dans 
chacune de ces divisions, des notes de mu- 
sique différentes les unes des autres. Vous 
n'oublierez pas de tracer les trois clefs de 
la musique dans Tinlérieur du cadran, et 
autour de ses divisions les divers chiffres 
dont les compositeur font usage pour 
exprimer les divers temps ou mesures. 

Vous fixez 'une des divisions quelcon- 
ques du cadran extérieur, de manière 
qu'elle se trouve vis-à-vis de celle du ca- 
dran intérieur; chaque lettre du premier 



1M L*ART b'éCRIRR 

cadran répond à une note placée sur le 
second. 

Prenez ensuite une feuille de papier ré- 
glé tet que celui dont on fait usage pour 
noter la musique ; et, apràs avoir disposé 
vos deux cadrans, placez, en tète de la pre- 
mière ligne de votre dépêche, celle des trois 
clefs qui correspond aux mesures indiquées; 
c^ci sert de règle à votre correspondant, 
afin qu'il dispose de la même façon, avant 
d'entreprendre le déchiffrement, le ca- 
dran qu'il a devant lui. Transcrivez sur 
le papier réglé la note qui, sur le cadran 
intérieur, répond aux lettres dont sont 
composés les mots de Tavis qu'il s'agit de 
transmettre. Votre correspondant, instruit, 
]Vkv la clef de la musique et par le chiffre 
qui désigne la mesure, de l'arrangement 
qu'il doit donner à ses cadrans, substi- 
tuera, en place de chaque note, la con- 
sonne ou voyelle qui lui correspond. 

En changeant de clef à plusieurs repri- 



EN CIIIFFBES. 155 

ses, on rend lo (léchifTiviiientplus diffîcilo 
pour les personnes qui n'ont pas le cadran 
cryplographique. Changer de clef, c'est 
disposer le cadran de façon qu'une des trois 
clefs de la musique réponde à un temps ou 
mouvement différent ; ce qui peut s'efTec- 
tner à plusieurs reprises dans la même 
lettre et ce qu'on indique de la manière 
ci-dessus signalée. 



iSfi i/art d'hciuhe 



CHAPITRE IV. 



v'J!- 



DF.S DIVERSES SOMES D ECRITl'RE ET DES DIFFERENT» 

I,ANr.\OES DE CONVENTION QDI SE RATTACHENT 

A l.A OORRESPONDANCE OCf.lLTE. 



8 I". 

Okygrîiphic. 



M. H. Blanc, sous-chef du bureau do 
rinslruction publique h la préfeclurc do 
la Seine, a proposé une écriture chiffrée 
de son invention, dans un livre intitule : 

Oky graphie, ou Varl de fixer par écrit 
tous les sons de la parole avec autant de 
facililéy de promptitude et de clarté que 
la bouche les exprime. Nouvelle mé- 
thode applicable à tous les idiomes, pré- 



EN CUlFllitS. io" 

^Miant des moyens aussi vastes, aussi 
sûrs que nouveaux d* entretenir une cor- 
respondance secrète dont les chiffres se- 
ront absolument itidéchiffrables. Paris, 
1802, m-12. 

Les signes qu^emploie cette méthode 
sont })eaucoup plus simples que ceux de 
Talphabet ordinaii'O. Ils se réduiseot à 
trois : i,c, a. On les écrit sur du papier 
réglé dans le genre de celui qui sert k la 
musique, mais avec la difîérence que les 
lignes rangées h côte les unes des autres 
sont au nombre de quatre seulement. Les 
trois signes indiquent leur signification, de 
inème que les notes de musique, d'après la 
position qui leur ei;t assignée sur les lignes, 
et, pour chaque signe, cette position peut 
se combiner de huit manières différentes. 
On obtient ainsi les vingt<^uatre K^ttres 
de Talphabet, qu on simplitie d'ailleurs en 
écrivant les mots tels qu'ils se prononcent. 

En combinant les signes de rOkygra- 



• » 



158 ' L ART EGhlRE 

phie, en se mettant d'accord à Pavanée sur 
le sens qu'il faut attacher à chacun d'eui 
placé de telle ou telle manière, en ayant 
recours aux non-valeurs et aux divers stra- 
tagèmes bien connus des cryptographes, 
on peut arriver sans i)eine à former un 
chiflre dont le mystère restera complète- 
ment impénétrable. M. Blanc donne, par 
exemple, huit alphabets divers qu'il a for- 
més selon sa méthoiic, laquelle est suscep- 
tible d'en fournir une quantité infinie. 

L'attention de M. de Talleyiiuid, alors 
ministre des ail'uires étrangères, fut appe- 
lée sur Tavantagc qu'offrirait l'Okygraphie 
pour la coriX3spondance secrète des am* 
bassades ; M. Diane nous fait savoir 
qu'il reçut une lettre très-flatteuse signée 
de Son Excellence; cette lettre rendait 
justice au mérite de l'Okygraphie, mais 
elle ajoutait que, dans les bureaux et dans 
les légations, on était habitué, de longue 
date, à des méthodes qui paraissaient sa- 



EM CHIFFRES. ilM 

tisfaisantes, et qu'il n'y avait guère moyen 
d'y introduire Teniploi de procédés tout 
nouveaux. 

§ 11. 

l'asigraplile. 

Ce mot se compose de deux mots gi*et'S, 
TTaffi, à tùUSt 7p<x9»,;Vcm. Ecrire même 
à ceux dont on ignore la langue, au moyen 
d'une écriture qui soit l'image de la pen- 
sée que chacun rend par différentes sylla- 
bes, c'est ce qu'on nomm^ Pasigraphie. 

Deux personnes, appartenante deux pays 
différents et à deux langues différentes, ne 
savent chacune que leur idiome; elles ap- 
prennent à le pasigraphîer; dès lors, ce que 
l'une écrit dans sa langue, Tautre l'entend 
dans la sienne. Adaptez cette méthode à 
plusieurs langues, le même écrit; le même 
imprimé sera lu en autant de langues, 
comme les chiffres de l'arithmétique, les 
signes de la chimie et les notes de la mu- 



iGo l'arï d'ECU ire . 

siquu soiUc^alcmenl intelligibles pour tuut 
\e monde, de Cadix .à «Stockholm, de Bos- 
ton à Calcutta. 

M. de Maimieux est un des auteurs qui 
se sont le plus occupés de Pasigiaphie; 
dans le procédé qu*il emploie, il fait usage 
de douze t^aractères; nous les reproduisons 
ici : 

-^xr c e dojxy^/. 

Il serait très-long et d'un faible intérêt 
d'expliquer ici comment, grâce à l'emploi 
de ces signes, il y aurait moyen de créer 
une écriture universelle qui serait entendue 
de tous les peuples» M. de Maimieux ex- 
prime lui-même en ces termes l'idée qui 
sert de base à sa méthode. 

« Le principal fondement de l'ai't pasi- 
« graphique est dans le moyen de snbsti»- 
« tuer le signe de la place des mots aux 
« syllabes dont toutes les langues compo- 
1 sent leul*s mots. Ces syllabes dilfcren 



KN CHIFFRES. 161 

« (l'un idiome à raulre,,jiar l'ePelde coii- 
« ventions locales qu'un étranger ne pcul 
« connaître qu'après beaucoup crétudes et 
« un long usnge. Chaque mot présente 
« des particularités qu'il faut savoir pour 
« bien posséder une langue, soumise, d'ail- 
c leurs, à des règles très-nombreuses, peu 
a fixes, souvent contradictoires et noyées 
« dans un océan d'exceptions. La place 
v( du mot pasigraphié demeurant la même 
« pour tous ios peuples, ceux-ci s'enten- 
« dent facilement, puisque les signes de 
« la place du mot, devenus le cor|)s du 
«I mot, restent les mêmes, de quelques 
« lettres que soit formé le mot placé dans 
« la ligne, si d'ailleurs la méthode est ré- 
« duite à douze signes qui n'éprouvent au - 
u cuije exception. » 

Ia?s signes de la Pasigraphié peuvent 
être employés dans récriture en chiffios. 
Parmi les écrivains qui se sont occupés du 
problème de la langue universelle, les 

11 



102 i/art d'Écrire 

uns, eomino M. de Maimieiix, ne font usage 
que d*an petit nombre de caractères; 
d'autres (Becker, notamment» dans sa 
Notitia linguss universalis) ont recoui^ 
ù une foule de signes qui rappellent un 
peu les notes tironîennes et qui se com- 
posent de lignes droites ou courbes, combi- 
nées de diverses manières et de façon que 
chaque signe exprime un mot et une idée. 
L*emploi d'un pareil système serait évi- 
demment entouré de difficultés multi- 
pliées ; Tapplication à la Cryptographie de 
.«ignés aussi peu connus n'offrirait que de 
bien minces avantages ; aussi, dans la 
pratique, n'a-t-on jamais songé à y re- 
courir. 

§ III. 

Hiéroglyplies. 

Nous ne saurions oublier ici divers svm- 
boles, dont Tantiquité fil usage^ afin dé- 



EN CHIFFRES. 165 

noncor des préceptes, des leçons ^ des 
fiiits qui demeuraient lettre close pour le 
vulgaire et dont Téruditiou moderne s'ef- 
force de retrouver la clef perdue depuis 
bien des siècles. 

Parmi les différents systèmes d'écriture 
mis en usage dans le but d'exprimer ces 
idées qui restaient un mystère pour les 
non initiés, les fameux hiéroglyphes de 
l'ancienne Egypte tiennent le premier 
rang. 

Diodore de Sicile, au livre lll de sa 
Bibliothèque historique, parle des carac- 
tères hiéroglyphiques employés par les 
Égyptiens. Après avoir dit que ces carac- 
tères offrent à nos yeux des animaux de 
tout genre, des parties du corps humain, 
des ustensiles , des instruments, principa- 
lement ceux dont font usage les artisans, 
il expose dans les termes suivants les mo- 
tifs qui leur ont fait donner ces formes : 
« Ce n'est point, en eflfct, par l'assemblage 



164 l'art D*éCRIRE 

des syllabes que chez eux l'écriture ex- 
prime le discours, mais c'est au moyen 
de la figure des objets retracés et par une 
interprétation métaphorique basée sur 
Texercice de la mémoire. » 

Le témoignage de cet historien grec est 
confirmé par celui d'un historien latin : 
Ammien Marcellin constate que, « chez les 
f anciens Égyptiens, chaque lettre repré- 
« sentait un mot et quelquefois même 
« une phrase entière. » 

Vers la fin du second siècle, saint Clé- 
ment d'Alexandrie, parlant des voiles 
mystérieux dont on s'est plu souvent à en- 
tourer la science pour n'en permettre 
l'abord qu'aux initiés, observe qu'on ne 
pouvait atteindre que par des degrés suc- 
cessifs le terme le plus élevé de Tinstruc- 
tion, qui était la science des hiéroglyphes. 

Trois sortes d'écntures ont été connues 
des anciens Égyptiens. Les hiéroglyphes, 
qui représentent fidèlement des objets de 



KM CHIFFRES. Ifô 

la natuie et des produits de Tart, ont é-é 
regardés coiume symboliques; Chainpol<- 
lion a fini par ne plus voir, dans ces signes, 
que des caractères idéographiques; et^sans 
entrer ici dans une discussion qui aurait le 
double toit (rétre Irès-lougue et de nous 
éloigner beaucoup du sujet que nous 
avons en vue, nous ferons remarquer que, 
quel que soit Téclat des ingénieuses décou- 
vertes du savant illustre que nous venons 
de nommer, les théories qu*il a formu- 
lées soulèvent encore, hors de la France 
surtout, de vives objections de la part 
d'érudits fort distingués. 

L'écriture hier aligne ou sacei'dotale e^t 
regardée comme une tachy graphie des 
hiéroglyphes, et les signes vulgaires ou (fe- 
moLiques, comme une abréviation des hié- 
ratiques. 

La fameuse inscription de Thèbes, la 
seule dont Texplication soit parvenue jus- 
qu'à nous, exprimait, par les hiéroglyphes 



ie6 L^ART d'ÉCKIKE 

(run enfant, d'un vieillard, d'un vautour, 
d'un poisson, d'un hippopotame, la sen* 
tence suivaute : « Vous qui naissez et qui 
devez mourir, sachez que T Eternel déteste 
rimpureté. » 

Voici en quels termes M. Champollion 
Figeac, le frère du célèbre créateur des 
études égyptiennes, résume les notions les 
plus généralement reçues au sujet des 
hiéroglyphes : « L'écriture hiéroglyphique, 
« proprement dite, se compose de signes 
« représentant des objets du monde phy- 
« sique, animaux, plantes, arbres, figures 
« de géométrie, etc. ; le tracé est parfois 
« simplement linéaire; quelquefois il est 
« entièrement terminé et même colorié. 
« Le nombre de ces signes est d'environ 
« huit cents. 

c L'écriture hiératique est une véritable 
« tachygraphie de la précédente. Gomme 
« les signes hiéroglyphiques ne pouvaient 
« être convenablement tracés que )ntr de>: 



£N CUlFFnËS. 1U7 

a personnes exercées dans l'art du dessin, 
« on créa un système d'écriture abrégée 
« dont les signes étaient d'une exécution 
« facile, système qui n'eut d'ailleurs rien 
« d'arbitraire. Chaque signe hiératique fut 
« un abrégé du signe hiéroglyphique ; au 
« lieu de la figure entière du lion couché, 
«'par eiemple, on traça l'esquisse d'une 
« partie de son corps, et cet abrégé du 
« lion conserva, dans l'écriture, la même 
ce valeur que la ligure entière. » 

Dans des pays très-éloignés des rives du 
Nil, on trouve une écriture hiéroglyphique, 
qui offre, à certaûis égards, des analogies 
remarquables avec les procédés des Égyp- 
tiens. Les Mexicains, avant la conquête des 
Espagnols, avaient également recours à des 
figures d'hommes, d'animaux, etc., pour 
énoncer leurs idées. 

Les noms des villes de Mencuihochitl. 
(Juauhtinchan et Tehuîlojocan signifient 
cinq fleurs, maison de V aigle et lieu des 



1G8 l'akt d'éckike 

miroirs. Pour indiquer ces trois villes, on 
peignait une fleur placée sur cinq points, 
une maison de laquelle sortait la tète d'un 
aigle, et un miroir d'obsidienne. 

Divers manuscrits hiéroglyphiques mexi- 
cains out échappé a la destruction, et ils 
figureut parmi les objets les plus pré- 
cieux que possèdent les grandes bibliothè- 
ques de riilurope. M. de Ilumboldt en a 
copié (juelques pages dans son bel ouvrage 
intitulé : Vue des Cordillères (Paris, 
1819, 2 vol. in-8°). Une magnifique pu- 
blication spéciale, faite aux frais d^un ri- 
che Anglais, a reproduit tout ce qui sub- 
siste en ce genre. Voir les Antiquities of 
Mexico c mprising feu-similes of ancien t 
nuiJcan paintings and hieroglyphics y 
by lard Kingsborough (Loudon, 1831, 
9 vol. in-(ol.). Cet ouvrage a coûté à son au- 
teur plus de 25,000 livres sterling (un 
million). Il en est rendu compte dans le 
Bulletin des Sciences historiques^ publié 



EN CIllFFKES. 109 

par M. (Je Férussac, t. XVII, p. 65, et dans 
ta Revue encijclopédiquet t. XLIX, p. 148. 

Ce u était pas, d'ailleurs, au Mexique 
seulement, qu'on avait recours à pareilles 
images. 

Les indigènes de la Virginie avaient des 
peintures appelées Sagkokokj qui repré- 
sentaient, par des caractères symboliques, 
les événements qui s'étaient accomplis 
dans l'espace de soixante ans ; c'étaient 
de grandes roues divisées en soixante 
rayons ou en autant de parties égales. 
Lederer [Journal des Savants, 1681, 
p. 75) rapporte avoir vu dans le village de 
Pommacomck un de ces cycles hiéroglyphi- 
ques, dans lequel l'époque de l'arrivée 
(les blancs sur les côtes de la Virginie 
était marquée par la figure d'un cygne vo- 
missant du feu, pour indiquer à la fois la 
valeur des Européens, leur arrivée par ea:i 
et le mal que leur« armes à feu avaient fuit 
aux hommes rouges 



170 LART b ECRIBE 

g IV. 
Langage au moyen des gestes. 

Le langage au moyen des gestes peut 
être regardé comme formant Tune des 
branches de la Cryptographie; il permet ù 
celui qui l'emploie de faire connaître ses 
idées d'une manière qui échappe aux per- 
sonnes qui ne sont pas au fait de pareils 
secrets. Les anciens connaissaient cet art. 
Un ccrivain grec, Nicolas de Smyrne, a 
laissé un petit traité, intitulé : De nu- 
merorum notatione per gestum digi^ 
torum (Paris, 1614, in-8°); cet opusculj 
est devenu très-rare, mais il a été réim- 
primé dans des recueils publiés par Possiu 
et par Fabricius, el plus récemment dans 
les Ecloyx physicae de Schneider. Les Ro- 
mains portèrent au plus haut degré lOs 
ressources de Li p:ui'uminic, et Ton trouve, 



r 



EN ClllFI'RES. 171 

cbez Pétrone, T expression de manm 
loquaces. 

Au huitième siècle, Bède le Vénérable, 
célèbre religieux anglais que Testime pu- 
blique a plaoé presque au rang des Pères 
de rÉglise, écrivit un traité De loqiiela per 
gestum diçilorum, traité qui est compris 
dans le volumineux recueil de ses œuvres ' . 

Tous les lecteurs de Rabelais se rap- 
pellent de quelle façon Panurge fit qui- 
nauït VAngloys qui argttoyt par signes. 

D'après un mémoire d'il. Dunbar, inséré 
dans les Actes de la Société philosophi- 
que de V Amérique du Nord, il se ren- 
contre, parmi les nombreuses tribus in- 
diennes répandues le long du Mississipi, 
des individus qui savent tirer wi parti ad- 

< Tome I"' de l'édition de Cologne, i688, 8 vol. 
in-folio. Bède s'appuie sur l'autorilé de Plu- 
tarquc, de Pline, d'Apulée, de Juvcnal, pour 
prouver <|Ue l'arl dont il s'occupe d'énoncer k"- 
règles (Huil couuu do«t ancitMi>. 



^ • 



17i LAHT D KChiKE 

inirable des ressources de la pantomime 
pour exprimer leurs idées. Malgré la di- 
versité des langues en usage chez ces 
peuplades belliqueuses, ils n^ont jamais 
besoin d'interprètes, et ils réussissent tou- 
jours à se faire comprendre sans avoir à 
[tronocer un seul mot, tant leurs gestes, 
exécutés diaprés un système universelle- 
ment adopté, sont pleins d*énergiey de 
netteté et d'à-propos. 

Nous sortirions des limites de notre su- 
jet, si nous parlions ici du langage manuel 
en usage parmi les sourds-muets. Nous 
nous contenterons de mentionner un al- 
phabet qu'on peut appeler alphabet fa- 
ciaL 

M. Berlin, dans son Système universel 
et complet de sténographie (Paris, an XII), 
l'ait connaitre un alphabet de son in- 
vention, d'après lequel la position des 
doigts sur le visage sert à transmettre 
tout ce qu'on veut faire savoir. Il laisse de 



EN CHIFFRES. 175 

côté les voyelles isolées o et u, et il ex- 
prime par un même signe les lettres telles 
que g et j, q et k, qui donnent des sons h 
peu près identiques. 



lettres. 




Traits physUmomiques. 


b 


Boigl 


l placé diagonalemrnt sous 
l'œil droit et en regard 
du nez. 


d 


» 


sur le coin droit de In 
bouche. 


PV 


» 


sur le coin gauche. . 


OJ 


» 


sur la joue gauche. 


b 


» 


au sommet de la tête. 


KQ 


» 


sur la lèvre supérieure. 


1 


M 


placé diagonalement sur 
l'œil gauche. 


m 


» 


sur la bouche. 


n 


» 


sur la lèvre inférieure. 


p 


» 


sur la fossette du menton. 


r 


Bouche ouverte. 


m 


Doigl couché horizontalement sur 






l'intervalle des lèvres. 


t 


» 


sur le nez. 


z, 


» 


au cou. 


y 


» 


à l'intervalle des sourcils. 


on 


» 


au front. 


ou 


» 


perpendiculairement sous 
l'oreille droite. 



m 



l'atiT d'écrire 



an 
eu 
ai 
a 
i 
e 
le, la, les, 

nom âhomme, 
finde\noti 
fin de phrase, 



» 
» 
» 
» 

» 
» 



oui Poigtliorizontalemcnt ptvs de 

l'oreiile gauche, 
à Taile droite du nez. 
au sourcil droit, 
à l'aile gauche du nez. 
au sourcil gauche, 
à la tempe droite, 
à la tempe gauche, 
plac^ verticalement devant 
la figure, 
main ouverte, 
doigt fermé, 
main fermée. 
numération sténograp'iique, emploi du pouce uu 

lieu du doigt. 

On emploie deux doigts k la fois pour 
oxprimer une lettre qui se répète. 

Si Ton veut aller plus \ite, on emploie 
encore deux doigts à la fois, en ayant soin 
de convenir que le pouce est la première, 
et rindex la seconde. 

Vigenère a fait très-succinctement men- 
tion de cette méthode, lorsqu'il dit un 
mot en passant de « Tentreparler tacite- 
ment par les doigts en les élevant ou les 



■P^ 



EN CHIFFRES. 173 

plaquant sur la bouche ou sur Tun des 
veux. » 

§ V. 
Langage des fleui-s. 

C'est dans les sérails que Tart ingénieux 
(le correspondre avec des fleurs a pris nais- 
sance; il fait partie des nHBurs orientales. 
« Les Chinois, dit un écrivain ingénieux, ont 
un alphabet composé entièrement avec des 
(liantes et des racines; on lit encore sur les 
rochers de 1 Egypte les anciennes conquê- 
tes de ces peuples exprimées avec des vé- 
gétaux étrangers. Ce tangage est donc aussi 
vieux que le monde» mais il ne saurait 
vieillir, car chaque printemps en renou- 
velle les caractères, et cependant la li- 
berté de nos mœurs Ta relégué parmi les 
amusements des harems. Les belles odalis- 
ques s'en servent souvent pour se venger du 
tyran qui outrage et méprise leurs charmes; 



m* i -n 



176 i/art D*ÉCRIRE 

una simple tige de muguet, jetée comme 
par hasard, va apprendre à un jeune icoglari 
que lu sultane favorite, fati^ée d'un amour 
tyrannique, veut inspirer, veut p:)rtager un 
sentiment vif et sincère. Si on lui renvoie 
une rose, c*est comme si on lui disait que 
la raison s'oppose à ses projets, mais une 
tulipe au cœur noir et aux pétales en- 
flammés lui donne Tassurance que ses 
désirs sont compris et partagés ; cette in- 
génieuse correspondance , qui ne peut ja > 
mais ni trahir ni dévoiler un secret, ré- 
pand tout à coup la vie, le mouvement et 
rintérêt dans ces tristes lieux qu'habitent 
ordinairement l'indolence et l'ennui. » 

Dans un pareil langage, la rose signi6e 
une jeune fille : blanche, elle indique la 
constance en amour; jaune, elle exprime 
l'infidélité. 

Un oeillet veut dire un homme, et les 
cxtuleurs diverses, les variétés d'espèce de 
la fleur, caractérisent cet homme au phy- 
sique comme au moral. 






mÊm 



EN CHIFFRES. 177 

L^étoilée exprime Tidée de père ou de 
mère ; si la fleur est rouge, les parents 
sont indulgents et bons ; si elle est violette, 
ils sont rigoureux et sév'ères. L'hyacinthe 
veut dire : ami ou amie. 

Indiquons le ' sens attaché à d'à utrcs 
fleurs : 



oreille-d'onrs, 

pensée, 

renoncule, 

camomille, 

tubéreuse, 

fleur d'oranger, 

violette, 

amarante, 

pavot, 

cresson, 

jasmin d'Espagne, 

marguerite, 

pied-d'alouette, 

jasmin, 

myrte, 

romarin, 

anémone, 

basilic, 

menthe, 

muguet, 



sœur ou frère. 

veuf on veuve. 

soldat. 

médecin. 

supérieur. 

richesse. 

patrie. 

jour. 

nuit. 

promenade. 

visite. 

demande. 

voyage. 

jardin. 

épouser. 

pleurer, s'affliger. 

se réjouir. 

pleurer, s'aflliger. 

craindre. 

innocent, lion. 



12 



ITS I. ART D ECRIRE 



Uenro, 


i'iernel. 


gii-oflôe rouge. 


aujourd'hui. 


• blanch(\ 


demain, l'avenir. 


» violelte. 


hier, jadis, le pa&sé. 


narcisse, 


je, moi. 


ortie, 


Hdèle. 


géranium, 


navire, voyage par mer. 


primevère, 


la mort.- 



D'après les règles de cette langue ingé- 
nieuse, lorsqu'un jeune habitant de Con- 
stantinople ou de Smyrne veut faire parve- 
nir ce message : 

« J*irai te rendre visite, chère amie, 
« demain matin de l)onne heure dans le 
M jardin, avec mon frère, homme de bien 
« et distingué, qui t'aime, belle jeune fille, 
« et qui veut t'épouser. » 

Il envoie les fleurs suivantes avec des 
numéros d'ordre : Narcisse, jasmin d'Es- 
pagne, réséda, hyacinthe bleue, giroflée 
blanche, tournesol, jasmin, marjolaine, 
oreille-d'ours, œillet d'un brun sombre, 
chèvre-feuille, rose rouge, deux myosotis, 
m\rU\ 



EN CHIFFRES. 



179 



Le moyen âge n'ignora point la significa- 
* tion symbolique donnée aux diverses 
fleurs; parmi différents exemples que 
nous pourrions citer, nous nous bornerons 
à mentioimer un petit vocabulaire qun 
renferme un manuscrit conservé à la bi- 
bliothèque royale de Bruxelles ; nous en 
reproduisons fidèlement le style suranné : 



giroflée rouge, 
giroflée blauche, 
marjolaine grosse, 
marjolaine menue, 
thym, 

thym coupé, 
fleur de thym, 
laitue, 

ïys, 

rose blanche, 

bouton de rose blanche, 

ro»e rouge, 

Itouton de rose ronge, 

rose mnsqvette, 

rose de province, 

rose doublée de rn>e 

. musquettc, 

rosmarin, 



beaulté. 

amour chaste. 

mensonge. 

bonté. 

persévérance. 

vous parviendrez. 

à vous me donne. 

bonnes nouvelles. 

foi. 

j'ay bon vouloir. 

je vouri ayme. 

largesse. 

angoisse. 

je vous reAise. 

soyez secret. 

occasion. 

congé. 



rnsmarin coppé an boult, amour sans fin. 



-^ 



180 



i/art d'âcrirb 



V iolotte jaune, conlentemcrt . 

violette de mars lilanctie, Ix>n espoir, 
violette de mars bleue, douleur. 



violette d'oultremer, 

violette d'hiver, 

ortie, 

chanvre, 

genêt, 

fleur de genêt, 

buglosse, 

bourache, 

Invaudrc, 

saulge grosso, 

saulge menue, 

ysope, 

liere, 

piment, 

pavost, 



patience. 

temps perdu. 

trahison. 

défiance. 

adresse. 

pour amour j'endure. 

légèreté. 

reproche. 

travers. 

entreprise. 

chasteté. 

amertume. 

ingratitude. 

doufeur. 

prison. 



Un écrivain moderne, se basant sur les 
considérations de la botanique ou sur les 
récits de la mythologie, a composé un dic- 
tionnaire du langage des fleui^s, pour écrire 
un billet; irauscrivons-en une partie, en fai- 
sant remarquer toutefois que plusieurs do 
ces significations sont très-contestables. 



abandon, 
absente, 



anémone, 
absinlhe. 



43L -*. 



EN CHIFFRES. 



181 



agitation, 

aigreur, 

amabilité, 

amertume, douleur, 

amitié, 

amour, 

amour conjugal, 

amour mateniel, 

audace, 

austérité, 

beauté capririeubo, 

bienfaisance, 

bienveillance, 

consolation, 

constance, 

courage, 

cruauté, 

dédain, 

délicate:» so, 

désespoir, 

désir, 

docilité, 

élégance, 

fécondité, 

félicité, 

fierté, 

franchise, 

frugalité, 

généroîiilé, 

^entrtlcs^c, 



sainfoin-oscillant. 

épine-vinette. 

jasmin blanc. 

aloès. 

litrre. 

myrte. 

tilleul. 

mousse. 

mélèze. 

chardon. 

rose musquée. 

pomme de terre. 

jacinthe. 

perce-neige. 

pyramidale bleue. 

peuplier noir. 

ortie. 

œillet jaune. 

bluet. 

soucis et cyprès. 

jonquille. 

jonc des champs. 

acacia rose. 

rose trémiôrc. 

centaurée. 

amaryllis. 

Osier. 

chicorée. 

oranger. 

ru>e pompon. 



ii9i 



tART D KCRIRE 



liainè, 

hoote, 

immortalité, 

indépendance, 

injustice, 

jeunesse, 

naïveté, 

noirceur, 

prospérité, 

prudence, 

]iuissance, 

jMireté, 

reconnaissance, 

.sagesse, 

silence, 

simplicité, 

»ommeil du cœur, 

temps, 

tranquillité, 

vérité, 

vice, 

volupté, 



basilic. 

pivoine. 

amarante. 

prunier sauvag;c. 

houblon. 

lilas blanc. 

argentine. 

ébénier. 

hêtre. 

cormier. 

impériale. 

épi de la Vierge. 

agrimoine. 

mûrier blanc. 

rose blanche. 

fougère. 

pavot blanc. 

peuplier blanc. 

Ulysse des l'oclier». 

morclle douce-awère. 

ivraie. 

tujjéreuse. 



g VI. 
Des alphabets faciices. 

Vif3[enèrc, dans son Traité des chiffrer, 
Duiel, dans son Trésor des langues, et di- 



iBMgM! 



EN CUIFFHES. IKô 

vers autres anciens auteurs ont donné des 
modèles d'alphabets attribués à divers per- 
sonnages célèbres de Tantiquité la plus 
reculée ; M. Nodier s'exprime h cet égard 
de la façon suivante ; 

« Les alphabets factices de Salomon, 
« d'Apollonius et même d'Adam ne sont 
« pas si méprisables qu'on se l'imagine, et 
« je n'entends pas par là qu'ils annoncent 
« une grande puissance «d'invention, mais 
« seulement qu'ils remontent à une haute 
« antiquité et qu'ils révèlent en partie le 
tf secret d'une des opérations les plus eu- 
«( rieuses de l'esprit humain. Ce qui donne 
« du prix aux recueils rares où ces al plia- 
it bets se rencontrent, c'est qu'on ne les a 
« jamais reproduits depuis que Ton a fait 
« de la grammaire positive, parce qu'ils 
« n'appartiennent à aucune langue dont 
« il soit resté des traditions. Comme dé- 
4( bris d'une langue de convention qui a 
« existé, dont nous avons perdu la clef it 






18i LA UT D* ÉCRIRE 

« qui ne le cédait peut-être en rien aux 
« langues caractéristiques de Dalgamo, 
« de Wilkins et de Lt^bnitz, ces traits 
« grossiers parlent à notre intelligence 
« ayec un tout autre pouvoir que les piei^ 
« res de Denderah. » 

Formés de signes aux contoui^ bizarres 
et aux formes singulières, ces caractères, 
qui sont, en général, des transformations de 
"alphabet hébreu» n'ont, d'ailleurs, on le 
comprend de reste, aucune authenticité. 
L'alphabet d'Enoch, celui de Moïse et celui 
de Salomon sont de pure invention, tout 
comme celui dont un magicien célèbre, 
Uonorius le Thébain, se servit, dit-on, pour 
écrire ses livres de sorcellerie. Vigenère 
a conservé les lettres sous lesquelles cet 
insigne sorcier (qui n'a jamais existé) dis- 
simulait les arcanes les plus profonds de 
la nécromancie. Nous croyons inutile de 
reproduire ces signes étranges, auxquels 
quelques anciens auteurs conseillent do 



K.\ CHIFFRES. 185 

recourir pour chifTi^r, mais dont personne 
ne fait usage depuis bien longtemps. 

On peut assimiler aux alphaljets facti- 
ces les figures bizarres dont les recueils de 
secrets magiques sont remplis, et les mots 
inventés à plaisir et qu*on donnait comme 
possédant des propriétés surnaturelles et 
comme renfermant un sens ignoré du 
vulgaire. Nous ne nous étendrons pas sur 
ce sujet, qui demeure étranger aux idées 
scientifiques ; nous transcrirons seulement 
comme échantillon une phrase prise dans 
un livre de sortilèges et qui restera sans 
doute toujours inintelligible : 

« Magabusta Berenada Surmistaras. Go- 
risgatpa Helotim Latintas adton aragiatou 
Amka jaribai untus gilgar Selingarasch. » 



1M L ART D ÉCltlKË 



CHAPITRE V. 

DU KÔLi: Dt: LA CHYPTOGRAPHIE DAH» LA LITTÉRATliltE. 



§ I". 
Ai'lificps imaginés pour déguiser des ddies». 

11 est juste de rapporter à la Gryj)togra- 
phie les artifices qu'ont employés quel- 
ques scribes du moyeu âge afin de dissi- 
muler, sous une forme énigmatique plus 
ou moins ingénieuse, la date des manu- 
scrits qu^ils transcrivaient. En Toici un 
exemple que fournit un des manuscrits 
français de la Bibliothèque impériale de 
Paris. 



EN CHIFFRES. 187 

Ce livi-e fut tout parfait 

En jueillel, comme trouverez : 

I*our le savoir dimynuerez 

('es diverses lignes par trait. 

Vous praodrez la te&te d'un moyne, 

De deux cordeliers, d'un cbanoyne; 

Et puis un () party en dux. 

Vous lairrez la teste Jhesu&. ' 

Sainct Jehan, sainct Jacques et Jacob, 

Et prendrez un X à cop. 

Puis adjoustez en ceste ryrae 

Ùng _y{^ prince en algeritlinie : 

Si congnoistrez qu'il fut parfait 
Le XXill* jueillet. 

On Toit que Tiiuteur indique, par les 
initiales de plusieurs mots, des lettres 
ayant une valeur numérique en chiffres 
romains, pour former par leur réunion 
i^année de rachèvementde sa transcription. 
H s'est plu à présenter cette indication 
d*une manière énigmatique par un jeu 
assez goûté de son temps. ^ 

La tête d'un Moyney (M) mille. 

Y ajouter celles de deux Cordeliers et 
d'un Chafioifie, (CGC) trois cents. 






i88 L'aU'I d'ë€K1I\E 



Puis, un pailagé en deux, (GG) ckux 
cents. 

Laisser de côté les têtes de Jfaesus, de 
saincl Jehan, de sainct Jacques et de. Ja- 
cob (4 à soustraire). 

Prendre ensuite un X (10). 

La difficulté consiste ù savoir ce que 
signifie ung iV j^rise en algorithme. Ce 
dernier mot, évidemment altéré pour les 
besoins de la rime, est algorisme, algoris- 
mus, que le dictionnaire de Du Cangc 
explique par arithmetica, numeratuli 
ars. Lu lettre qu'il s'agit de considérer nu- 
mériqaement est un N, lettre qui ne joue 
point en latin le rôle d'un chifTre. D'après 
la forme que lui donne le manuscrit, on 
voit qu^elle joue, peut se décomposer en 
un V et un I, ce qui donne en chiffres : \ I 
^(six). Maintenant, en additionnant ces difSé- 
'Vents nombres, 1000,300, 200, 10 et G, 
puis en retranchant 4, on trouve 1512. 

Une date semblable, composée par le 



EN CHIFFRES. 189 

chanoine Charles deBovelle, est citée dans 
la Notice de M. du Sominerard sur l'hôtel 
(le Cluny. 

D'un mouton et de cinq chevaux M. CCfiCC 

Toutes les têtes prendrez. 

Et à icelles sans nuls travaux 

La queue d'un veau vous joindrez, Y 

Et au bout adjouterez 

Tous les quatre pieds d'une châtie : 1 1 1 1 

Kassomblcz, et vous apprendrez 

L'an de ma façon et ma date. 

M. CCCCC V. Illl 
(1509) 

Pareilles inventions ne furent pas, d'nil- 
leurs, la propriété exclusive des copistes 
antérieurs à Tinvention delà typographie; 
quelques volumes imprimés au quinzième 
siècle oflrent des particularités du même 
fçenre ; mentionnons- en deux exemples : 

Le Doctrinal du temps présent ^ de 
Pierre MIchault, imprimé k Bruges, par 
(^olard Mansîon, s'adresse ainsi au lecteur: 

Un Ireppier et quatre crois^ans 
l'ar six oroÏN auec sv nains faire. 



i90 l'art d'écrire 

Vous feront estre congiioissans, 
Sans faillir, de mon miliaire. 

Ce quatraifi indique l'année 1466 : 

M. cccc. xxxxxx. m m. 

Un petit volume trè^-rare, le Passe-temps 
et le Songe du triste, publié à Lyon, s'an- 
nonce comme ayant été mis au jour : 

L*an de trois croix, cinq croissans, ung trépier. 

Ce qui signifie 1530, les figures étant 
rangées de droite k gauche : XXX. GiICCC. 
M. 

§ II. 

Des aKifices employés par quelques auteurs pour 
déguiser leurs noms. 

II a été de mode parmi certains auteurs 
du seizième siècle de déguiser leurs noms 
sous une devise qui les couvrait du man- 
teau d'une anagramme plus ou moins in- 
génieuse, plus ou moins exacte. 

Le Formulaire fort récréatif de tous 



EM CHIFFRES. 1(M 

coniratz... fait par Bredin, Lyon, 1594. 

Les. mots Bonté ny soit, sont en guise do 
signature à la fm de Tavis au lecteur ; on 
croit y reconnaître le nom anagrammatisc 
de Tauteur : Benoist (du) Troncy. 

Noël du Fail, auteur de deux écrits 
dont les anciennes éditions sont vivement 
recherchées des bibliophiles (les Propos 
rustiques et les Balivemeries cTEutra- 
pel)y cacha son nom sous Tanagramme de 
Léon Ladulfi ; Nicolas Denisol, conteur 
et poëte contemporain d'Henri U, donna 
ses écrits sous la signature du comte 
(TAlsinois, Le chevalier de Caillv, dont 
les spirituelles épigrammes ont reparu 
dans la jolie Collection des pelits classi- 
ques françois (1825, 9 vol. in-16), n'eut 
guère rintention de se dérober sérieuse- 
ment aux regards du public 'lorsqu'il se 
présenta sous le nom d'Aceilly, 

Il serait facile de multiplier pareils 
exemples; nous signalerons Ancillon, si- 



U« l'art d'écrire 

jrnanl du nom <le OUincan son Traité des 
eunuques; nous mentionnerons Amelol 
de La Houssaye, d'Orléans, qui ne déguise 
guère la paternité de ses pesants commen- 
taires sûr Tacite, en les donnant comme 
l'œuvre du sieur de La ^oihes Josseval 
d^Aronsel; nous retrouverions dans Phi- 
lippe Alcripe, sieur de Neri, auteur d'un 
recueil facétieux devenu rare (la Nou- 
velle Fabrique des exce liens traits de 
vérité) f le nom de Philippe Le Picar, sieur 
de hien; nous ne saurions surtout oublier 
l'immortel auteur du Garguntua et du 
Paûtagruelj maître François Rabelais, 
qui a changé son nom en celui à'Alco- 
fribas Nasier, 

Les plus impénétrables de ces pseudo- 
nymes sont peut-être ceux que des mem- 
bres d'académies italiennes se déce^^^> 
rent, ol)éissant ainsi à une mode qui dura 
un instant pendant le siècle dernier. Ou 
ne se douterait qvCEvforbo Melesigenio 



i 



E^ ciiiiiiits. 1*45 

désigne Galazo; c'est sous le nom lïKyilisco 
Pilenejo que Pagnini livra atu pi-esses éié- 
<;antesde Bodoni sa traduction d'Anacréou. 

Un pauvre comédien qui termina ses 
jours par une mort volontaire, Garon, au-% 
teur et éditeur de livrets facétieux, re- 
cherchés des hibliomunes, s'amusnit à 
avoir recours à rai;tifice peu mystérieux 
de la disposition rétrograde des mots. Il 
donna un de ses écrits comme Tœuvre du 
bonze Esiah-luc.ei comme ayant été im- 
primé à Emeiuogna. 

i'n moine italien, François Culumna, 
auteur d'un romun bizarre et ob^^cur dont 
les anciennes éditions sonjt vivement re- 
cherchées à cause des figures sur bois qui 
les embeUissent, a caché son nom et le 
secret de son cœur dans une phrase qu'on 
retrouve, en écrivant, à la suite les unes 
des autres, les lettres iniliulcs de cha- 
cun des chapitres de cet ouvrage : 

IHJH.UM FRATER FIUNCISCUS ADAMAVIT. 

15 



*-->îJMÎ 



< » 



l[)\ L ART D EClilUK 

L'aultiur il'uii (le ces romans de chevu- 
Lerie qui lireut tourner la tète a Don 
Quichotte, rhistorien de Palmerin d'An- 
gleterre, s'est également servi d'uu acro- 
stiche du même genre ; il Ta consigné 
dans des stances placées au commence- 
ment du premier volume et dont voici 
rinterprétation : Luis Hurtado, autor/al 
lector da salud. 

Un petit poëme de la On du quinzième 
siècle, le Messagier damoun, révèle par 
un acrostiche placé dans les huit derniers 
vers le nom de Tauteur, Pilvelin. • 



§ III. 

l>e l'emploi que divers littérateurs ont fait de la 
Cryptographie. 

Quelques écrivains oui eu recours aux 
procédés de la Cryptographie, afin dedéro- 



EN CHIFFRES. i^o 

ber iiii\ profanes le sens de certains pass;i- 
ges de leurs écrits qu'il leur convenait de 
couvrir des ombres du mystère; nous pou- 
vons en citer plusieurs exemples* 

Un poète du seizième siècle > rimeur 
peu connu, mais plein d'une verve qui rap- 
pelle parfois celle de Régnier, Marc Papil- 
lon, sieur de Lasplirise, a placé, dans ses 
Œuvres poétiques (Paris, 1599), une ti- 
rade assez libre qu'il ne nous convient pas 
de transcrire en entier et dont voici le 
début* 

Sel semad ed al ruoc le seuqleuq 
sertua erocne 

lois emid elliv gritob uo egalliv. 

Il est facile de reconnaître que Tarlifice 
consiste ici en ce que chaque mot doit être 
lu de droite à gauche. . 

a Les dames de la cour et quelques 
autres encore, » etc. 

Nous trouvons, dans le mêine volume, 



196 LART d'ÉCRIKE 

un sonnet en langue inconnue ; il com- 
mence ainsi : 

Oealis zeroiii deronly (oul|)iiiic 
Parais hurlin liaor orifieux. 

Nous laissons le soin de chercher le 
sens de ces lignes énigmatiques aux heu - 
l'eux désœuvrés qui ont assez de temps 
pour donner des heures à Tétude drs 
écrits du sieur de Lasphrise et assez de 
solidité de jugement pour apprécier tout 
ce que renferme d'utile et d*iutcressant 
un pareil emploi des facultés intellec- 
tuelles. 

Un poëte lutin du seizième siècle, Jean 
de Cysipge, plus connu sous le nom de 
Janus Pannonius, offre des particularités 
semblables. En feuilletant l'édition de ses 
Poêmata iXJivechi,] 784,2 vol. in-8*), nous 
avons remarqué que Tépigramme 27C 
du I" livre (iom. I, p. 577), in me* 
rel l'item lascivam. est en partie cliitTrée; 



EN CHIFFRES. 107 

Le second vers est exprimé sous celle 
forme : 

Conseinii el dxoop iifouxnb delituit. 

et le dernier : 

Expecla nondum, Lucia, efgxuxk. 

« 

La Biographie universelley dans l'arti- 
cle consacré au trop célèbre marquis de 
Sade, rapporte que, parmi les manuscrits 
laissés paf cet écrivain qui poussa Tim- 
moralité jusqu'à la démence, il se trou- 
vait un volumineux journal de sa captivité 
•à la Bastille, écrit, en grande partie, en 
chiffres dont il avait seul la clef. 

Nous rencontrons deux ou trois pagos 
chiffrées dans une composition spirituelle 
et piquante sortie de la plume d'un des 
romanciers les plus féconds et les plus en 
vogue du dix-neuvième siècle. Ouvrez la 
Physiologie du mariage, par M. de Bal- 
zac; cherchez dans la Méditation XXV le 



lOft l'auï d'écrire 

paragraphe intitulé : des Religions et de 
la Confession considérées dans leur rap- 
port avec le mariage^ vous y lirez ce 
qui suit : 

« La Bruyère a dit trcs-spirituellement : 
a C'est trop contre un mari, que la dévo- 
« tion et la galanterie ; une femme devrait 
« opter. » 

« L'auteur pense que La Bruyère s'est 
trompé. En effet : 

« Lsuotru P-nefi^tm'm dbreaus jivoe; 
(( udnt \eit emrnu eaCmetss esosi ost 
« pfsioiylao tt démon sleuiod pne nr 
« unsmneuj eeus^ ienqseuedroteapt... » 

Nous nous garderons bien d'insérer ici 
en entier cette longue citation^ et nous 
convenons franchement que nous n'avons 
pas cherché h trouver la clef du système 
cryplographique inventé par le joyeux phy- 
siologiste. Quelques-uns des nombreux lec- 
teurs de la Physiologie du mariage ont 
sans doute ctô plus intrépides H ]>lus 
heureux rpjc nous. 



£N CHIFFRES. 1«n> 

Terminons en mentionnant une uuUv 
particularité dans le genre do celles quo 
nous signalons ici. 

Les Œuvres poétiques du sieur de La 
Gharnais, gentilhomme nivernois, renfer- 
ment 118 énigmes, dont une table, en 
deux pages, donne la clef. Cette table est 
gravée à Tenvers, en sorte que, pour la 
lire, il faut avoir recours à un miroir. 
L'auteur a, d'ailleurs, eu le soin de 
donner dans sa préface celte explication 
h SCS lecteurs. C'est une singularité dont 
il serait sans doute difficile de trouve r 
d'autres exemples. 

Un écrivain américain, Edgar Poë, ai:- 
teui* de contes pleins de talent et d'origina- 
lité', a, dans un de ses vécits, le ScarU' 

* Consultez une notice intéressante insérée 
dans la Rtvve des Deux-Momies, octobre 1846. 

« Autant de* récits, autant d'énigmes sous di- 
« verses formes et avec des costumes divers. 
« Poésie, invention, effets de style, enchaînement 
e du drame, tout est subordonné à une bi/arre 



» » 



^ L ART D ECRIRE 

bée d'or (tke Gold'Bug)^ raconte com- 
ment un homme, doué d'une inlcUigence 
iiénétrante et chercheuse, sut parvenir à b 
découverte d'un trésor considérable enfoui 
par des pirates dans un coin reculé de la 
Lousiane, trésor dont le gite était indique 
par une série de chiffres sur un vieux 
morceau de parchemin que le hasard plaça 
sous ses yeux habitués à voir juste et loin. 
Voici quelle était la première ligne de cet 
écrit : 

53 44_|. 505) 6*; 4826) 4 -f); 808*; 48 -f 
8 § 60 3 85; 1 + (;1. + *8) 

En examinant quels étaient les signes 

H préoccupation qui semljlc ne connaître qu*une 
« faculté inspirattfire, celle du raisonnement; 
« qu'une muse, la logique. L'auteur s'occupe de 
« juger, de classer les probabilités; et il emploie 
« pour ceci cet instinct, cette sagacité parlicu- 
ft iiére à l'homme, plus ou moins sûre chez l'un 
« que chez l'autre, et qui varie de puissance 
« comme de but, suivant les aptitudes et le 
« métier de chacun. » 



RM CHIFFRES. 201 

qui revenaient le plus souvent et quels 
étaient ceux qui étaient les plus rares; en 
constatant que le caractère 8 se présentait 
53 fois, 

; 26 fois, 
4 19 fois, 
-h) 16 fois; 

en observant quelles sont les lettres qui, 
en anglais, entrent le plus dans la composi- 
tion des mots; en tenant compte des com- 
binaisons et des juxtapositions qu'amènent 
les lois de Torthographe, le mystère fut 
pénétré. Mais laissons les lecteurs cher- 
cher eux-mêmes dans les pages de M. Poë 
comment s'accomplit ce tour île force. 



iOi L.VRT D KCniUE 



CHAPITRE Vf. 



DES MVnES A CI.KF. 



Ils fout encore partie du domaine de la 
Cryptographie, ces livres dans lesquels on 
a voulu , nu moyen de Tanagramme des 
noms ou ik tout autre artifice, dépayser 
le lecteur et lui donner, presque toujours 
peu sérieusement, le change sur le vérita- 
ble sens des pages qu'on mettait sous ses 
veux. 

Les compositions satiriques, les écrits 
qui ne ménagent nullement la religion et 
la décence, forment presque toujours la ci- 






KM OUI F Fil ES. mZ 

togorie où rentrent les livrog à clef. Nous 
niions en citer quelques- uns. 

Les Princesses malabares : ce livre ir- 
réligieux, attribué à L(>nglt't-Dufre8noy et 
imprimé à Rouen, en 1724, sous la fausse 
indication crAndrinople , est parfois ne* 
compagne d'une clef, dont voici une 
partie: 

Mison (Simon), saint Pierre; TttotaliCt 
catholique; Rasonif raison; Roligine, 
Religion; £ma, ànie; Chélerine, chré- 
tienne ; Gdlise, église ; Vaddi, D;ivid, etc. 
On voit que Tauteur a eu recours au plus 
vulgaire et au plus facile de tous les 
moyens de déguisement, à l'anagramme, 
procédé bien candide et bien naïf, puisque 
les éléments du mot se présentent d'eux- 
mêmes à qui prend la peine de les cher- 
cher. A côté du livre que nous venons 
d'indiquer, pinçons : 

Les Aventures de Pomponius (par Ia- 
])adie), Borne (Hrjlande), 1725. Ce récit 



M4 L*ART D*ÉCniBE 

allégorique, diçigé contre le régent (Phi- 
lippe d'Orléans) et ses favoris, présente 
aussi des noms cachés sous le voile de 
Tanagranime : W€/o«aw, Orléans; Lauges, 
Gaules; Cilopang , Polignac; Jiidosb, 
Dubois ; Nedoc, Condé; Xeàmu,. Meaiix. 

Dans les Veillées du Marais ou Histoire 
du grand prince Oribeau et de la ver- 
tueuse princesse Oribelkt par Rétif de l;i 
Bretonne , tous les noms sont travestis : 
Rousseau devient Asstiero, et Voltaire 
Iratlove, 

N'oublions pas les Soupers de Daphné 
et les Dortoirs de Lacédémone (par de 
Querlon), 1740. Une clef imprimée se 
trouve dans un très-petit nombre d'exem- 
plaires de cette satire lancée contre la cour 
de Louis XV; M. Nodier Ta reproduite dans 
ses Mélanges extraits d'une petite biblio- 
thèque , où il a également placé la clef 
d'une nouvelle de Brémond qui met en 
scène, sous des noma déguisés, le roi 



r 



EN CillFFRËS. 205 

(K Angleterre Charles II et ses fuvorites : 
Hattigé, ou les Amours du roi. de Ta- 
marariy Cologne, 1676. 

Les Amours de Zéokinizulf roi des 
KorfiranSy présentent un mystère qu'il est 
facile de percer; runagramme coniplat- 
sante nomme d'elle-même : Louis XV, roi 
des Français. 

Indiquons encore : 

Les Visites, par mademoiselle de Kéra- 
lio, Paris, 1792, in-S. 

Voyage du Vallon tranquille (par 
Charpentier), réimprimé en 1796 avec des 
notes servant de clef, par Mercier de 
Saint-Léger et Adry. 

Histoire de la princesse de Paphlago- 
nie , par mademoiselle de Montpensier. 

Paris, Histoire véridique, anecdoti" 
(jue, morale et poétique, avec la clef, par 
Cluwrier, La Ibye, 1767. 

Galerie des États généraux (par Mi- 
rabeau, de Lucliet, etc.). 



I 



*20tî l\\ut d'ÉCUII'.E 

Ne laissons pas échapper, dans cette éiiu- 
tiiéi-ation rapide et nécessairement fort in- 
complète, un ouvrage célèbre, le Cymha* 
tum mundif de Bonaventure Des Periers. 

M. Nodier s'est fort occupé de cet écrit, 
qu'il qualifie de a production bizarre et 
<f hardie, petit cheM'œuvre d'esprit et de 
« raillerie, modèle presque inimitable de 
« style dans le genre familier et badin, et 
« l'un des plus précieux monuments de la 
« charmante littérature du seizième siè* 
tf cle. » 

Le Grand Dictt07inaire historique 
(les Précieuses, par Somaize, 1661, n'of- 
fre qu'une énigme perpétuelle, lorsque 
la clef n'y est pas jointe. 

Vogt, dans son Catalogus librorum ra- 
riorum, mentionne un recueil de poésies, 
d'une bizarre mysticité, imprimé en 1758 
et qui fut défendu. Les noms y sont îftia- 
grammatisés; Madaavemania est Tàme 
(aniîna) d'Adam et d'Eve qui délivre Sir- 



r 



EN CUIFFltËS. 'iUl 

dilus (Christ us); Hifeluc e^t Liicifti*; 
Moscos désigne Cosmos t le Monde, etc. 

Nuus nous garderons bien de tout ci- 
ter en ce genre ; aussi laisserons-nous de 
côté un fastidieux roman du chevalier de 
Mouhy, intitulé les Mille et une Faveurs, 
1740, 5 Tol. in^lS. Dans cette longue 
narration, les noms des pei^onnages sont 
déguisés sous le yoile de Tanagramme, se 
présentant sous un aspect fort bizàri^, 
tels que'Croselivesgol, Tofrnenie, Onveex- 
pic, Lodeorbarli, Coufartoc, Senacso, Sa- 
nistinva, Netosniss, Fonternouesa, Tanit- 
badan, YeoldaBtular ; en les décomposant 
on y trouve des mots très-propres à inspi- 
rer le plus juste effroi au chaste lecteur. 



2U8 LART D ËCRIIIË 



CUAPITHE vu. 



UL UtCllIFFRtMENT. 



H faut de la patience cl ilc la s:igacité 
pour arriver a In lecture d'une dépêche 
chiffrée qui a été interceptée . 

Cette tâche peut offrir les plus graves 
difficultés, lorsqu'on ignore dans quelle 
langue est écrite la dépêche saisie; ou bien 
lorsque, pour récrire, il a été formé un 
nlélange de divers idiomes; loi^qu*on a 
fait emploi de plusieurs alphabets; lors- 
que les non-valoui^ sont nombreuses et 
réparties avec intelligence; lort^que les 



ISN GUI Ft HE S. ^09 

mêmes syllabes, les mêmes mots, les 
mêmes noms, se trouvent exprimés par 
des signes différents; lorsque les mots 
sont écrits ù la suite les uns des autres 
sans séparation, ou loi-squ'ils sont séparés, 
' non comme ils devaient Fêtre selon les 
règles grammaticales, mais d'une façon 
arbitraire qui déroute Tobservateur. 

Le déchiffreur doit être très-versé dans 
tous les procédés de la Cryptographie ; s'il 
n*a lui-même souvent chiffre des dépc- 
clics, s'il ne connaît à fond toutes les ru- 
î:es de Tart, s'il ne s'est amusé à vouloir 
inventer des procédés nouveaux, s'il n'a 
fait de toutes les combinaisons cryptogra- 
phiques une étude sérieuse et patiente, il 
échouera dans toutes ses tentatives, quand 
il se verra en présence d'un chiffre difticile. 
La première chose à faire est de dresser 
le catalogue des caractères qui composent 
le chiflre et de noter combien chacun est 
répété de fois. Ceci fait, on examine leurs 

14 



1 r 



lîlO LART D EGAIRE 

combinaisons; on tourne, on retourne, 
on dispose de toute façon ces caractères, 
jusqu'à ce que des conjectures se présen- 
tent avec vraisemblance sur Fattribution 
(le tel ou tel caractère à telle ou telle 
lettre. 

Pour arriver à ce but, il faut que la 
plupart des caractères se trouvent plus 
d'une fois dans le chiffre; si Tëcrit est 
ibi^ court, si une même lettre est dé- 
signée par des caractères différents, les 
difficultés deviennent de plus en plus sé- 
rieuses : 

Nous allons emprunter à un écrivain 
hollandais judicieux, à S'Gravesand, un 
exemple relatif à un chiffre éciit en latin. 

A B _C 

uhcdefghikf: Imkgnekdgeihekf: 
D E F 

bceeficlah l'cgfginebh fbhiceikf: 

G H__ I K 

f m f p i m f h i a b c q j 1 c b e i c a c g b rt v h g 

p i g b g i- b k d g h i k f c ^ m k b i t c f m. 



EN GIUPFHES. 211 

Les barres, les lettres majuscules A, 6, 
les signes de ponctuation ne font pas par- 
tie du chitîre ; nous les avons ajoutés afin 
de faciliter Tcxplication : Ce chiffre donne : 

3 d 

2 ]) 

2 u 

2 p 

1 o 

1 q 

1 r 
1 s 
1 t 

Enfin, il y a en lout disL-neuf caractères, 
dont cinq seulement une fois. 

Je vois d'abord que h ik'f se trouvent 
en deux endroits (R, M); que i A: /'se trouvent 
en un seul (F); entin, que h e k f (G) et 
k i k f (B, M) ont du rapport entre eux. 

D'où Ton peut conclure qu'il est pro- 
bable que ce sont des fins de mots, ce 
qu'on indique jiar les deux points : 

Daiiii le lutin, il e^it ordinaire de trouver 



14 


f 


14 


i 


12 


b 


11 


e 


10 


ff 


9 


c 


8 


11 


8 


k 


5 


m 


4 


a 



■«w 



iii LART b EClllRE 

(les mots uù des qualre dernières lellres 
les seules antépénultièmes diffèrent; les- 
quelles, en ce cas, sont habituellement des 
voyelles, comme dans amant, legunt, do- 
cent, etc. ; donc t, e sont probablement 
des vovelles. 

Puisque fmf (voyee G) est le commen» 
cernent d^un mot , on* peut raisonna* 
blement conjecturer que m ou f est 
voyelle, car un mot n'a jamais trois con- 
sonnes de suite, dont deux soient les 
mêmes, et il est probable que c'est f 
puisque f se trouve quatorze fois et m 
seulement cinq; donc m est consonne. 

De là allant h K ou g b f b c b g, on 
voit que, puisque /"est voyelle, b sera con- 
sonne dans le b f b, par les mêmes rai- 
sons que ci-HÎessus; donc c sera voyelle, à 
cause de ^ c ^. 

Dans Lou^^^r^, ^est consonne; 7' 
sera consonne, parce qu'il n'y a qu'un r 
dans tout Téci'it ; donc g est voyelle. 



^mmm 



EN CHIFFRES. 215 

Dans doufcgfg.ily aurait donc un 
mot ou une partie de mots en cinq voyel- 
les, mais la chose e^t impossible. Il n'y a 
point (le mot latin qui présente cette par- 
ticularité ; on se tromperait donc en pre- 
nant f c g, pour voyelles ; donc ce nVst 
pas f, mais m qui est voyelle, et /'consonne; 
donc b est voyelle (voyez K). Dans cet 
endroit K, on a la voyelle b trois fois, sé- 
parée seulement par une lettre; or on 
trouve dans le latin des mots pu pareille 
circonstance se rencontre, tels que edere, 
légère, munere, si tibi, etc., et comme 
c'est la voyelle e qui est le plus fréquem- 
ment dans ce cas, il fiiut en conclure que 
b correspond probablement à IV, et i à r. 

En opérant successivement de sembla- 
ble manière sur toute la phrase chiffrée, 
on finit par en découvrir le sens, et on trouve 
que le chiffre que nous avons reproduit, 
doit se traduire de la manière suivante : 

Perdit a simt bona; Minâarna interiit : 



2U l'art d'kgrirb 

urhs$lrata humi est. Esuriunt lot quoi 
super fuete vivi; praeterea quae agenda 
sunt consulito. 

Les mots composés d'un très-petit nom- 
bre de syllabes doivent être les premiers 
dont on s'occupe dans les opérations du 
déchiffrement. Us laissent sans trop de 
peine les voyelles se révéler, et cette dé- 
couverte conduit à celle des consonnes. 
La connaissance exacte des principes géné- 
raux qui régissent lorthographe des di- 
verses langues est le fil qu'il faut suivre 
dans ces opérations minutieuses. 

Indiquons quelques-uns des principes 
qui servent de guide pour opéœr le dé- 
chiffrement d'un écrit en langue française. 

Le signe qui revient le plus souvent, 
surtout à la fm des mois, désigne la 
voyelle e. 

Cette lettre est la seule qui, à la fm d'un 
mot, se répète deux fois, comme dans dé^si- 
rée, fuséef etc. Ainsi, lorsqu'on trouve le 



mmt 



EN CniFFAES. 215 

même sigiic place deux fois à la fin d'un 
mot, il y a toute probabilité que ce signe 
représente Ve, La voyelle e, dans un mot de 
deux lettres, est toujours précédée des con- 
sonnes cd j Imnstoa suivie de celles n t. 

Indépendamment de Tinterjection o, qui 
n'est gu6re employée dans une dépêche 
secrète, il n'y a en français que deux let- 
tres qui, seules, forment un mot complet. 
Ces lettres sont a et t/. Si Ton trouve un 
signe isolé dans le texte chiiTré, il est à 
croire qu'il correspond à une de ces deux 
lettres. 

Dans les mots formés de deux lettres 
oiî se trouve la voyelle a, elle précède 
d'ordinaire les lettres /i, û u, comme dans 
ah ai au, ou bien elle est après les lettres 
/, m, n, 5, /, comme dans la, ma, sa, la. 

Des diphthongues, ai, au, eu, oi, ou,\\k 
dernière est celle qui revient le plus sou- 
vent, surtout dans les mots de quatre syl- 
labes. 



v m f m jm ' 14, 1 - Ifctfi^^W^^"^*- 



ii6 LART d'Écrire 

Lorsque la lettre e est ravant-clernière 
d'un mot, ce mot se termine d'ordinaire 
par Tune de ces deux consonnes, r ou s. 

Lorsque la voyelle est suivie d'une au- 
tre voyelle, c'est habituellement d'un e. 

11 est rare qu'un mot finisse par les con- 
sonnes b, fy g, h, Pj q. 

Les mots formés de trois lettres sont 
ceux qui donnent le plus de peine au dé- 
chiiTreur, lorsque la même lettre s'y 
trouve deux fois comme dans été, ici, 
non, ses. 

Supposons que vous avez découvert le 
monosyllabe le cl que vous ayez un autre 
mot de trois lettres dont les premières 
sont / ete, vous jugerez que la troisième 
est un s, attendu qu'elle est la seule qui, 
dans un mot de trois lettres, puisse aller 
après le monosyllabe le et former le mot 
les. Dès que vous serez parvenu h connan 
tre ce mot les, si vous trouvez un mot 
dont les deux premiers signes soient ui\ 



r- 



mmmmmmmiBmammimitL^i ii,7'__ 



£K CHIFFRES. H' 

e et un s, vous en conclurez que le troi- 
sième, qui TOUS est encore inconnu, doit 
ùlre la lettre t, et que ces trois signes ex- 
priment le mot : est. 

Ayant découvert la lettres, vous exami- 
nerez si elle ne se trouve pas précéder un 
mot de deux lettres, dont la seconde ne 
soit pas la lettre e, que vous connaissez 
déjà. Alors ce sera nécessairement un a 
ou un i. Pour vous en assurer, voyez si, 
dans d'autres endroits, ce dernier signe ne 
précède pas, dans un autre mot de deux 
lettres, la lettre / ; en ce cas, vous serez 
certain que c'est un t. Si, au contraire, 
dans un autre mot de deux lettres, ce si- 
gne suit la lettre /, vous en conclurez 
qu'il désigne Va. 

Lorsque ces premières recherches vous 
auront révélé six signes ou lettres, savoir 
les trois voyelles a e i, et les trois conson- 
sonnes / .s t. elles vous conduiront à décou- 
vrir des mots composés d'un phis gran<l 



SIS l'art d'égrihe 

nomhro de lettres, tels, par exemple, que 
le mot lettrct où tout se trouvera connu, 
excepté la lettre r, lettre que dès ce mo- 
ment vous pourrez ajouter à celles que 
vous connaissez déjà. Le mot cette , où 
tout sera connu excepté la lettre c, le mot 
ville où la lettre v seule était encore un 
mystère, se révéleront d'une façon ana- 
logue. 

Quand vous serez ainsi parvenu à con- 
naître sept ou huit mots, vous trouverez 
sans trop de peine les autres, en recher- 
chant quelles sont les lettres qu'il con- 
vient de mettre entre celles qui sont déjà 
connues pour en former des mots. En peu 
de temps, vous obtiendrez, par ce procédé, 
une clef qui servira à déchiffrer aisément 
toute la dépêche. 

Disons encore quelques mots h re- 
gard des principes qu'il s'agit d'avoir en 
vue pour divers idiomes européens. 

En anglais, IV est la voyelle qui revient 



r 



KN CHIFFRES. 219 

Ift plus frc'qiicmniont; olle est assez sou- 
vent suivie cruii a comme dans earl 
(comte), great, reason, Vo est commun 
dans les mots formés de deux lettres; 
il est mnintes fois accompagné du w, 
comme dans groWy know, narrowly. 
L'î/ se rencontre souvent à la fin des mots 
et presque jamais au milieu. L'article in- 
déclinable the (le, la, les) reparaît fré- 
quemment. Les consonnes doubles que 
Ton trouve à la fin des mots, sont // et 
ss. 

En italien, les mots se terminent le 
plus souvent par une des quatre voyelles, 
a, Cj i, o; Vu est rare en pareil cas. Che 
est le plus fréquent des mots composés de 
trois lettres, et aucun dVux, si ce n'est gli, 
n'offre un / pour lettre du milieu. 

La langue espagnole présente des mots 
d'une grande étendue, tels que arrepenti- 
mieniOf verdaderamente. La voyelle o 
est celle qui est la plus fréquente; k la fin 



%in l'art d'écrire 

des mots, clic est souvent aecompagnét' 
<lc» Vs, comme dans nosotros, votos» An 
milieu des mots, u est fréquemment 
suivi dHm e ; vucstro, rtiego. 

Passons à rallemand. Ve est la voyelle 
la plus usitée ; elle se présente fréquem- 
ment à Textrémité des mots de plusieurs 
syllabes; ils finissent en. er, es, en ou 
et. Vn est la consonne qui revient le plus 
souvent; Va n'est jamais à la fm d'un 
mot composé de trois lettres ; la consonne 
c est toujours lice au c ou au A. Il n'y a 
qu'un seul mot formé d'une seule lettre, 
c'est l'exclamation o ! On ne compte que 
deux mots de quatre lettres qui se ter- 
minent en enw, wenn et denn. Presque 
tous les mois de quatre lettres commen- 
cent par une consonne qu'accompagne 
une voyelle, exemples : baldy dein, doch, 
ehurij Hand. 

C. A. Kortum, dans ses Principes (en 
allemand) de la science du déchiffrement 



EN CHIFI'KES. ±*1 

des écrits chiffrés en langue allemande, 
donne à ce sujet de très- longs détails 
qu'il serait très-superflu de placer ici, et 
il soumet anx règles qu'il expose deux dé- 
pêches chiflrées. 

La première ne présente que des let- 
tres î 

Efs ckftfo Tabwc ftfs f^ef hkfcu 
Y s xbs liftiTliopu woc hfinkfcwu. . . . 

La seconde est plus compliquée; les let- 
tres sont entremêlées de chiffres et les 
|r mois ne sont pas sépares : 

64mf4kml34kc4o4kiig4ôc4p 

ra24o Ikq25293edk6n ikmmôb 13. 

En étudiant le retour des signes et 
leur arrangement, on arrive à découvrir 
successivement quelques lettres^ et, une 
fois qu'elles sont connues, elles sont d'un 
secours pour arriver à connaître les au- 
tres. 

Les règles pour le déihiffremcnt, telles 



qu'elles ont clé exposées par divers au- 
teui^s, reposent , on le voit, sur le plus ou 
moins d'abondance de certaines lettres 
dans les mots, et sur leur rapprochement. 
Afin de dérouter les conjectures, il faut, 
lorsqu'on chiffre des dépêches, écrire les 
mots sans aucune séparation, entremêler - 
des mots pris dans une langue avec d^au- 
très mots empruntes à un idiome difTé- 
rcnt et ne point se conformer scrupuleu- 
sement aux règles de Tortliographe. 

En abrégeant les roots ou en les mo- 
difiant, il convient toutefois d'avoir soin 
de ne pas les dénaturer au point de lais- 
ser du doute sur leur signification; les 
caractères nuls, intercalés h propos et 
dont la non-valeur est inconnue au dé- 
chiffreur, peuvent achever de rendre tous 
ses efforts infructueux. 

C'est pour avoir négligé pareilles pré- 
cautions, et pour s'être bornées à l'emploi 
de caractères mystérieux et de cbiffœs ran- 



EN CHIFFRES. 2i5 

gés dans Tordre habituel et orthographi- 
que des mots, que des personnes qui 
croyaient avoir parfaitement déguisé leur 
pensée ont été tout étonnées de voir que 
leur secret n'en était pas un. 

Voici un fait de ce genre. 

M. DecrempSy auteur de la Magie blan- 
che dévoilée f se vantait de parvenir 
promptement à percer les mystères les 
plus difficiles. Afin de réprouver, un de 
ses amis lui adressa un jour quelques li- 
gnes qu'il avait écrites en caractères dont 
il avait fait choix. M. Decremps, en étu- 
diant le retour plus ou moins fréquent de 
ces caractères, en cherchant de quelle façon 
ils se montraient groupés entre eux, re- 
connut qu'ils représentaient les diverses 
lettres de l'alphabet; il trouva successive- 
ment qu'un oiseau exprimait la lettre a; 
que Ve était rendu par une tète vue de 
profil , et ri par la figure d'un verre à 
palte. Muni de cette clef, il découvrit 



w^f^i^mmmmmÊpmmmam^mmmaïammmmmitK 



"iti l'art u'ÉCKir.E 

bien \itc qu'en lui avait adresse copie de 
quelques vers d'une traduction d'une des 
odes d'Auacréon, et il causa à son ami 
l'étonnement le plus vif, en prouvant que 
ce que ce dernier avait cru parfaitement 
caché était dévoilé. ^ 



EN CHIFFRES. 



S2j 



CHAPITRE Vin. 



DES ÉCRITIRBS OCCULTES. 



On donne le nom à*encre de sympa' 
thie aux substances dont on fait usage, 
qui ne laissent point de traces sur le pa- 
pier et qui apparaissent derechef, lors- 
qu'elles sont soumises à Faction de divers 
procédés. 

Lor.-^ qu'on veut avoir recours à un pa- 
reil moyen, il faut faire attention à ce que 
Ja dépêche ostensible ne mentionne rien 
qui puisse donner lieu à quelque soupçon. 

15 



ji6 l'art d'ëcuike 



Le papier doit conserver sa couleur et son 
éclat habituels. Les phrases tracées à Tcn- 
cre ordinaire doivent être conçues de ma- 
nière que le lecteur, sous Ic^ yeux de 
qui elles tomberaient, n'ait aucune rai- 
son de croire qu'elles n'expriment pas 
réellement la pensée de Tccnvain et qu'el- 
les n'appartiennent pas à une correspon- 
dance sérieuse. On tracera sur les marges, 
entre les lignes ou sur le côté du feuillet 
demeuré blanc, ce que l'on veut commu- 
niquer en secret. 

Il importe que les passages écrits en encre 
sympalliique demeurent invisibles jusqu'à 
Taccomplissement des procédés qui doivent 
les rendre au jour ; il faut qu'après l'ap- 
plication de ces procédés ils puissent être 
lus nettement et sans difficulté. 

On convient d'un signe quelconque qui, 
placé soit sur l'adresse, soit dans lo corps 
de la lettre, indique, à celui qui la reçoit, 
cju'il y a des passages tracés en encre df 



UN CUlFFltËS. tir, 

sympathie. Nousn*avons pas besoin d*ajou- 
ter que ce signe doit être mis de manière \\ 
échapper aisément aux regards des cut 
rieux et à n^offrir aucune importance ap- 
parente. 

Il est des caractères qui reparaissent^ 
lorequ'on répand sur eux quelque pou- 
dre. 

On peut tracer sur le papier une écri- 
ture invisible de ce genre, avec tous les 
sucs glutineux et non colorés des plantes 
ou des fruits, ou bien avec do la bière, du 
lait, des liqueurs grasses ou aqueusos. 

On laisse sécher ce qu'on a écrit. Pour 
le rendre visible, on frotte la feuille de pa- 
pier avec une poudre très-fine et de cou- 
leur foncée; du charbon pilé extrême- 
ment menu, du cinabre, du bleu de 
Prusse, peuvent servir à cet usage. La 
poudre s'attache aux lettres qui ont é(o 
trs^cées et elle la fait revivre. 



228 L*ART D'éCRIRE 

Diverses écritures deviennent visibles, 
lorsqu^on les expose au grand jour. 

L'extrait de saturne, étendu d^'eau, 
donne une écriture invisible qui apparaît 
et devient noirâtre, lorsqu'elle est livrée 
h Faction de Tair. On obtient un ré- 
sultat semblable avec de Targent dissous 
dans de Tacide nitrique ; les caractères 
tracés avec pareil liquide deviennent ver- 
dâtres, lorsqu'ils sont exposés à Tair; 
placés de manière à recevoir les rayons du 
soleil, ils se montrent d'un noir ixtugeâtre. 

On peut aussi se servir de substances 
qui reparaissent, lorsque le papier est for- 
tement écbauffé. 

Ce qui est écrit avec du lait devient 
rougeâtre ; 

Avec du jus de cerise, verdàtre ; 

Avec du jus d'oignon, noirâtre ; 

Avec du jus de citron, brun ; 

Le vinaigre donne une cciileur rouge 
pfile; 



EN CHIFFRES. 2i9 

Le luit, une couleur rousse, afnsi que 
Tacide vitrioliqiie affaibli dans une cer* 
taine quantité d'eau. 

Le cobalt, le vitriol, et d*autres agents 
chimiques, ont été employés avec plus ou 
moins de succès dans la composition dVn- 
cre de sympathie de diiïérents genres. On 
a découvert des substances bonnes pour 
former des caractères qui ressuscitent, 
pour ainsi dire, lorsque le papier auquel 
on les a confiés est légèrement mouillé 
ou lorsqu'il est plongé dans Teau. Écrivez 
avec de Talun dissous dans Teau, mouil- 
lez le papier dont vous vous êtes servi et 
présentez-le au jour : vous distinguerez 
très-bien ce qui était invisiblement écrit ; 
les caractères seront beaucoup plus obs- 
curs que le reste du papier, et il leur 
faudra bien plus de temps pour s'imbiber. 

En écrivant avec un liquide formé d'une 
j)ortion d'eau-forte et de trois portions 
d'eau I on obtient des c;iractères qui ne 



230 LART D^ÉCKIIIË 

paraissent pas, lorsque le papier est plongé 
dans Peau ; à nïesure qu'il sèche, ils dis- 
paraissent. Ils pourront devenir visibles 
une seconde et tnême une troisième fois. 

11 est aussi des écritures occultes qui 
reparaissent, lorsqu'on les humecte avec 
un liquide approprié. C'est ainsi qu'une 
dissolution de vitriol ou de couperose 
donne des caractères qui se montrent 
h Toeil, lorsqu'on frotte le papier avec 
une éponge imbibée d'un liquide, dont 
voici la composition : noix de galle con- 
cassées et mises dans de Teau ou du 
vin blanc. On obtient le même résultat, 
en plaçant cette écriture invisible entre 
deux papiers légèrement imbibés de cette 
dernière dissolution; il fimt que le tout 
soit enfermé et serré dans un livre pen- 
dant quelques moments. 

(In procédé assez ingénieux consiste à 
masquer l'écriture invisible au moyen 
d'autres caj'uctèrcs que Ton trace dessus 



liN ClIIF.-llKS. 251 

en se servant d'une encre formée de paille 
d'avoine brûlée et délayée dans de Teau. 
Quant on passe Tépongc, cette écriture dis- 
parait et laisse voir à la place celle qui 
était invisible. 

L'extrait de saturne donne un marc, 
avec lequel on trace une écriture, qui, une 
fois séchée, ne paraît plus ; afin de la ren- 
dre visible, il suffît d'imbiber le papier de 
jus de citron ou de verjus, et alors elle 
paraîtra d'un blanc de lait qui ressortira 
sur la blancheur du papier. 

Des caractères tracés avec du bleu de 
Prusse paraîtront d'un bleu éclatant, si on 
les imbibe avec la dissolution acide du 
vitriol vert. 

Une dissolution d'or fin dans de Teau 
végétale, coupée avec de l'eau pure, four- 
nit une encre sympathique qui disparait en 
séchant, lorsqu'on veille à tenir le papier 
renfermé et à le soustraire à l'influence 
du grand air. Ces niènies caractères, expo- 



1 > 



m LAKT D ECUiAE 

ses au soleil, reparaîtront au bout d'une 
lieure ou deux. 

Disons, une fois pour toutes, que, dans 
récriture occulte, il faut employer des 
plumes neuves et affectées à cet usage 
spécial. 

Les anciens auteurs qui ont écrit sur la 
Cryptographie n'ont point oublié les pro- 
cédés que nous indiquons. Vigenère ex- 
plique longuement qu'il faut « escrire 
« avec de Talun brûlé, ou du sel ammo- 
« niac, ou du camphi^e, deslrempez en eau, 
« ce qu'estant sec blanchist à pair du pa- 
« pier, qu'il faut tremper puis après dans 
« de l'eau qui le rend noir et l'escriture 
tf demeure blanche, ou le chauffer devant 
« le feu, tant, que le papier roussisse et 
« Tencre s'offusque ; le mesme faict le jus 
« d'oignon et l'eau encore toute simple. »Si 
« Ton trasse quelque chose sur le bras, 
« un autre endroit du corps, avec du laict 
« ou de l'urine, en jectant de la cendre 



EU CHIFFRES. ^&ô 

« dessus, elle y adhère et monstre ce qui 
t y aura été desseigoe. Le sel ammoniac, 
< resouls à part soy h la cave ou autre lieu 
« humidi^, si on escrit de ceste liqueur, tout 
« demeure blanc ; frottez le papier avec 
« du coton trempé en eau distillée de vi- 
« triol ou de couperose : Tescriturc appâ- 
te roistra noire. 

« Il y a un autre artifice de faire une 
« petite incision à un œuf, avec la pointe 
« d'un trancbe-plume bien affilé, par la- 
« quelle on fourre dedans de petits bil- 
« lets de papier escris des deux costcz, 
« de la largeur de Touverture, non plus 
« grande que de petit doigt et y en peull 
« assez tenir. Puis, on la repiastre avec 
« de la craye ou ceruse, et de la chaulx 
(( vive empastées avec de la glaise. Si 
« qu'il seroit bien malaisé d*y rien re- 
« marquer ne connoistrc, quand bien 
« mcsmc on les auroit fait durcir et pcl- 
« 1er, car cela demeure enclos en leur 



^«i 



tôA l'art l»'ÉCRinK 

ff sub:»taiicr, sans que rien paroisse deliui's. 

« Il y a un autre malin artifice qui se 

« faicl avec de TaUm bruslé, destrempé 

tf en eau dont on escrit sur du papier : 

« estant sec, tout deviendra blanc. On 

« brusle d'autre part de la paille de fro- 

« ment qu*on estend en iiu linge, sur quoy 

« on passe de Teau tiedde par tant de fois 

« qu'elle ait emporté toute la noirceur de 

« la paille : puis, on escrit de cette encre, 

« sur l'escriture blanche dessusdite, ce 

«t qu*on ne veut pas tenir secret : et pour 

« lire ce qui est caché, s'effaçant ce qui 

« apparoit manifeste; il fault avoir de Feau- 

« de-vin où Ton aye fait tremper des noix 

c de galle concassées grossièrement, tant 

« que Teau-de-vie en ait attiré et embeu 

* « la teinture avec du coton mouillé de- 

c dans ; Tescriture apparente s'esvanouira 

« et l'occulte viendra à se descouvrir, 

« noii'o comme est la commune. En quoy 

« il y a certain scciet qu'il ne m'a p:is 



I 



EN CIIIIIRËS. '235 

(f SI niblc devoir divulguer, nou plus que 
« d*une aulre manière d'encre qui s'ef- 
« face d'elle- mesme en quinze jours ou 
« trois sepmaines, composée de pierre 
« de touche, sablon d'Estompés, sang de 
a pigeon, noix de galle ci autres ingre- 
(( diens, mesme de Fhuille de tartre avec 
« laquelle il fault destremper le tout, y 
« adjoustant un peu d'encre affoiblie avec- 
« ques de l'eau. » 

De son côté, Porta indique ce qu'il ap- 
pelle une manière très-simple d'écrire sur 
la peau en caractères ineffaçables : c'est 
avec de l'eau-forte imprégnée de cantha- 
rides; ou, si l'on veut que l'écriture ne 
soit visible que pendant quelques jours, il 
faut employer, pour écrire sur la peau, 
une dissolution d'argent ou de cuivre dans 
de l'eau-forte, et cette opération peut se 
faire sur un homme endormi, 5ans qu'il le 
sache. 

Résumons les autres détails dans les- 



b ,m.mÊm 



236 LART D ËC lit lie 

quels cet auteur et ses émules entrent à 
regard du sujet qui nous occu|.e. 

L'écriture faite avec une eau de vitriol 
ne devient visible, qu'en passant par-dessus 
(le la décoction de noix de galle. Le sel 
ammoniac, avec la chaux ou le savon, 
donne k récriture une couleur blanche. 

Après avoir critiqué Tantique secret des 
tablettes enduitds de cire, Porta indique 
les procédés suivants : Écrivez avec de la 
graisse de bouc sur du marbre; les lettres, 
en séchant, deviennent invisibles; plon- 
gez le marbre dans le vinaigre, elles re- 
paraissent sur-le-champ. Imprimez sur un 
bois tendre, tel que celui de tilleul, de 
peuplier ou autre, des caractères, à la 
profondeur d'un demi-doigt ; aplatissez 
ce bois à la presse jusqu'à ce que le creux 
ait entièrement disparu et qu'on ne voie 
plus de traces de lettres ; celui à qui vous 
enverrez ce morceau de bois lira l'écri- 
ture en le ]dongeant dans l'eau. 



EN CHIFFRES. 237 

Enduisez uh œuf de cire ; écrivez des- 
sus, de manière à pénétrer jusqu'à la co- 
quille sans Tendommager ; tenez Tœuf 
pendant une nuit dans une dissolution 
d'argent par Tacide nitreux ; ensuite, en- 
levez la cire, écaillez Toeuf et mettez la 
coquille entre voire œil et la lumière, les 
lettres paraissent plus transparentes et 
trèï-lisiblos. La même chose a lieu en 
écrivant avec du jus de citron, qui amollit 
la coquille do l'œuf: laites durcir un œuf, 
enduisez-lc de cire, gravez sur la cire des 
lettres qui laissent la coquille à découvert; 
mettez Tœuf dans une liqueur faite avec 
des noix de giillc et de. Talim broyés en- 
semble ; ensuite passez-le dans de fort vi- 
naigre : les caractères jîénétreront plus 
avant; ôtez la coquille, et vous verrez sur 
le blanc de Tœuf de belles lettres couleur 
de safran. 

m 

Keritures que l'eau rend visibles : Q)u'on 
écrive avec du jus de citron, ou de coing 



:258 i/ahi;. d éckirg 

ou d'oignon y ou tout iiutre suc acide; quand 
ces lettres sont sèches, on n'apcri,*oit rien ; 
écrivez, entre les lignes, avec de Tcncre, 
des choses indifférentes, afin de dérouter 
lout soupçon. En approchant la lettre du 
feu, récriture cachée devient lisible. 
Broyez du sel* ammoniac, mélez-le dans 
Teau, écrivez avec cette liqueur : récriture 
paraitra de la même couleur que le pa- 
pier; approchez-le du feu, les lettres pa- 
raîtront noires. Si Ton écrit avec du jus 
de cerises, récriture paraîtra verte au feu. 
Il est aussi des écritures qu'on peut 
i*endre visibles par Temploi de Teau seule. 
Ce que Ton écrit avec une dissolution 
d'alun devient invisible, en séchant ; il 
ne faut que plonger le papier dans Teau 
l)Our faire revivre récriture. Une lettre 
écrite sur du papier avec une eau de vi- 
triol distillée ne devient visible qu'en 
plongeant le papier dans une infusion de 
nojx de galle avec du verjus ou dw vjn, 



EN GuiFi'RËS. i,yj 

On broie aussi de la litharge que Ton met 
dans du vinaigre mêlé d'eau ; on passe la 
décoction» à la chausse , et on la met à part» 
on trace ensuite, sur la pierre, sur quel- 
que partie du corps ou sur toute autre ma- 
tière, avec du jus de citron, des caractères, 
qui, étant secs, n'ont aucune apparence 
d'écriture; en passant par-dessus de l'eau 
de litha,rge, les caractères paraissent blancs 
comme du lait. 

Rabelais dont l'érudition encyclopédi- 
que tou(îhait k toutes sortes de sujets, n'a 
point oublié les divers procédés de l'écri- 
ture occulte ; il fait mention d'une lettre 
qu'une dame de Paris envoie à Pantagruel, 
lettre qui renfermait un anneau d'or, 
mais dans laquelle il ne se trouvait rien 
d'écrit. Panurge s'efforce de découvrir le 
sens de cette missive, disant que « la 
« feuille de papier estoyt escripte, mais 
« l'estoyt par telle subtilité que Ton n'y 
« voyoit point d'escripture, 



240 l'art D'écr.ir.E 

<c 11 la mist auprès du feu pour veoir si 
« rescripturc èstoyt faicte avec du sel am- 
« rnoniac détrempé en eaue. Puys, la mist 
« dedaus l'eaue pour sçavolr si la lettre 
« esloyt escripte du suc de tithymale. 
« Puys, la monstra à la chandelle, si elle 
« estoyt point escripte du jus d'oignons 
« blancz. 

« Puys, en frotta une partie d'huylle de 
« noix, pour veoir si elle estoyt point 
« escripte de lexif de figuier. Puys, en 
« frotta une part de laict de femme alaic- 
« tant sa fille première née, pour veoir si 
tf elle estoyt poinct escripte de sang de ra- 
« bettes. Puys, en frotta un coing de cen- 
« dres d'ung nid d'arondelles, pour veoir 
« si elle estoyt escripte de rosée qu'on 
f trouve dans les pommes d'alicacahut. 
« Puys, en frotta ung aultre bout de la sa- 
it nie des aureillcs, pour veoir si elle cs- 
« loyt escripte du fiel de corbeau. Puys, la 
« trempa en vinaigre, pour veoir si elle 



EN CHIFFRES. Uï 

a estoit escripte de laict d'espurge. Puys, la 
({ graissa d^axunge de souris chaulves, pour 
« veoir si elle estoit escripte avec sperme 
« de baleine y qu'on appelle ambre gris. 
« Puys, la myst tout doulcement dans un 
« bassin d'eau fraische et soubdain la tira, 
« pour veoir si elle estoyt escripte avec 
« alun de plume, b 

Rabelais cite, à Toccasion de ces tenta- 
tives infructueuses, trois auteurs auxquels 
la Cryptographie serait redevable d'impor- 
tants travaux : « Messere Francesco dj 
Nianse, le Thuscan, qui ha escript la ma- 
nière de lire les lettres non apparentes; 
Zoroaster, dans son traité péri gramma- 
ton acritoriy et Galphurnius Bassus^ de lit- 
leris illegibilibus. » 

Cet auteur Thuscan et ces livres grecs 
et latins sont tout à fait inconnus ; il faut 
donc assigner à l'imagination de maître 
Fr^iiÇ^if' le mérite de les avoir créés. 



16 



RinLiOGRAPillL; 



Il nous reste à signaler les principaux 
ouvrages qui se rapportent aux diver- 
ses brandies de TArt d'écrire par chif- 
fres ; nous ne prétendons pas offrir une 
liste absolument contplète ; c'est un but 
qu'on ne saurait jamais se flatter d'attein- 
dre, mais nous espérons du moins ne pas 
avoir oublié d'écrits d'une importance 
réelle. Nous avons adopté l'ordre alpha- 
bétique comme étant celui qui facilite le 
mieux les recherches. 

Anweisung sum Dechiffrirent oder die Kunst ver- 
boraene Schriften aul'iulœsen, HelmAadt , 1755, 
in-8. 

Baco (Franc, de Yeruîamio). De dgntale et au- 
flmenti8scieHtiarum.,Vih.yi,c. I. Voir se:i Opéra 
omnia. Francof., 4665, folio, pag. 447-151. 

liECiiEflus (J. J.). Character pro tiolilia Imgnarum 
universaU, inveiii uni stegonographicum hactenus 
imuditum, etc. Francofurli, 16i)l, in-8. 

Beguelim. Mémoire sur la découverte des lois d'un 
chiffre de fe.i le professeur Hennann^ p oposè 
comme ab'^olament indéchiffrable. Voy. \\émo\vo> 
«le l'Académie royale de* sciences el heltes-lpl- 
tres de liciiin, lom. XIV (17H;») |>îig. ôf»9-5KÎI. 



BIBLIOGRAPHIE. ?43 

Belot. VŒuvredex œuvres ou le plus parfait de» 
fciences s'àfunographiques, Paris, 1625, in-8. 

BiELFKLD (J de). Instilutions politiques (la Haye, 
1760, in-4l, lom. 11, pag. 191. 

Brkitiiaupt (Chr.). D squisilio hislorica, critica, 
citriosa de varvs modis occul e scrihendi^ tnm 
apiid veteres qunm apud recenliores ustatis, 
Heimstadt , 1727. in-8. 

— Ars decffratoria sive scien'ia occultas scri- 
ptnras solvendi et legendi, Helmst., 1737, ia-8, 
32 et 160 Dag. 

BuERGA (A.). Panilasie oder Grundriss einer allge- 
meinen Sprachf^^rVin, 1808. 

Cap.let (J. R. du). La Cryptographie, contenant li 
manière d'écrire secrètement , Tolose , 164i , 
in-12. 

CoLLETET. Traitiez des langues estrangères, de 
leurs alithahe s et des chiffres^ Paris, Proraé, 
1660, in-4. — C'est un abrégé imparfait du 
Traité des ch'ffres de Vigenère,et il aurait tous 
les caractères du plagiai si CoUetet lui-même 

* n'avait pus prévenu cette accusation avec une 
franchise peu commune. 

CoLonm (Abr.). Scolografia i/a/ica , Praga , 1593, 
in-4. 

CoMiER (d'Arabrun). Traité de la parole, langues 
et écritures, conlenant la sténograph e tnpéné' 
trahie, ou l'Art d'écrire et de parler occulte- 
ment de loin et sans soupçon. Bruxelles, 1691, 
in-12. 

Co.NRAni (Dav. Arn.) Cnjptog raphia denudata, sive 
ars deciferand quse occulte script a sunt in qvo- 
cunque linguarum ^tfM/r^jLugd. Bat., 1739, in-H, 
73 pag. 

Cospi. LfuterprétaHoii des chiffres, ou Reiyle (sic) 



m BIBLIOGRAPHIE. 

pour bien entend' e et expliquer facHement 
toute» aortes de chiffres simples^ lire de l'ita- 
lien du sieur A. M. Cospi, sccréWtre du grand- 
duc de Toscane. Augmenté et accommodé par- 
ticulièrement ù l'usage des langues lrançai»c 
et e.>paenole, par F. J. F. ?i P. M. Paris. 1641, 
in-8, 90 pag. 
Crellii (L. C.) Diss. de sqftala laconkaj Lip&isc, 

1697, in 4. 
Dalgarno (George). Ars fdgnorum, vulgo ckaracter 
universaliset Imgua phUosophica,honà\n\ , 1 667 , 
in-8. Cet écrit a paru à M. Nodier extrêmement 
remarquable \voir les Mélanges extraits ePnne 
pelile bibliothèque, pag. 268, et les Notions de 
linqnis ique , 1834, pag. 51 . Les ouvrages de 
Dalgarno ont été réimprimés à EdimlM)urg en 
1854; XtiRevne ri' £d««*ottr^,n» 124, juilletl835, 
leur a consacré un article. 
Dr.AN»0L. Le Contf espion ou les clefs de toutes les 
correspondances secrètes, Paris, 1794, 66 pag. 
in-8. 
FinM\s-PEmÊs (Le comte). PaAiélégrffphie.Slutt- 

gard, 1811, in-8. 
FoRELii's (H.l. D.ssertatio de mod'S occulte scri- 
bèiidi et prtec pue de &cytala Incjnica, Holmiae, 
1697, in-8. 
Friderici (J. B.). Cryptograpi'ta, oder gchemer, 
Schriftmund undwirkliche Correspondenz, Ham- 
burg, lb84, in-4. 
FrNKs (Chr. B.). Nalûrllchc Magic, Berlin, 1785, 
in-8. (Il s'y trouve quelques détails sur l'art 
de déchiffrer.) 
Gerrar (m). Siylaiium romanim sire eiplcaio 
wotarum nç \\iterarum^ Londre?jl705, in-1, 



BIBLIOGRAPHIE. 'iio 

GoiiEviN (Fraliçoi^), é venue d'Hereford, Ntihcius 
inanimalus Ulopise, 1629. L'auteur expose mys- 
téiieusement les avantages d'une méthode se- 
crète de correspondance au moyen de signes 
convenus. 

S'Gravesand, Inlroduc'tio in philosophiam (Lugd. 
Bat., 1737). 11 y es>t question, eh. xxxv, del'écri- 
ture en chiffres. 

Gmsciiow (Aug.). Iniroductio in philologiam gene- 
ralem, icntB, 1704, in-8. Le chap. iv roule sur 
l'art d'écrire en chiffres avec rapidité, et sur 
les moyens de découvrir pareils secrets. 

Hanedi Steganologia et Heganographia voi'a. Ge- 
heime, magische^ nalfirliche Red-und Schreibc- 
kiinsl, Nuremberg (sans date), in-8, 299 pag.Le 
véritable nom de l'auteur est Daniel Schwenter, 

Îrofesseur de mathématiques à AUorf, mort en 
636. 

HiLLERi (L H.) Myslerlum artis steganographhaR 
iiovifisimum, Ulmae, 1682, in-8, 478 pag.^Lu ci^ 
rata de 6 pag. termine le volume. Cette *mulli- 
titude de fautes contribua sans doute au peu 
de succès de ce traité plus ample que celui de 
Breithauçt, mais moins mélhoaique. Il ne s'a- 
dapte spécialement qu'au latin, à l'italien, à 
l'allemand et au français, et seulement aux 
chiffres à clef simple ou dont l'alphabet n'est 
. pas variable. L'auteur avait donne un aperçu 
de son travail dans son Opusculum stegano- 
grapkici.m, publié à Tubingue en 1675. 

HiNDENooRG iC. F.). Arckiu der reinen und ange- 
wandien Mathematik. (Les cahiers 3 et 5 roulent 
sur l'art de chiffrer.) 

UoTTiMGA (Dorain. de). Polygraphie ou méthode 
univer elle de l'écriture cachée et cabal s'ique. 



MlHl^MMM 



:r: ^ .. ^iV-s^ -^ 



t46 BIBLIOGRAPHIE. 

Grouingue, 1620, in-4. C'est lu répi*oductiuii 
textuelle de la traduction de la Polyffraph'e de 
Trithème, publiée eu 1541 par Gabriel de Col- 
lange. Holtinga u'a point liésité à donner ce 
travail comme étant entièrement son œuvre, et 
il déclare, dans sa prérace, qu'il lui a consacré 
de longues et pénibles veilles. Il existe peu 
d'exemples d'un plagiat aussi effronté. 

JoxNEs. Ilieroglyphic or a grammatical introduc- 
tion to an miversal hieroglyphic language, Lon- 
don, 1768. 

Kalmar (Georgius). Vrascepla grammatica algue 
Specim':na lingi:» philosophie» s.ve univer- 
salis ad onine vitfe genus adcommodalse. Bero- 
lini, 1772, in-i, 56 paç. 

KiRCHERi (Athan.) Artifwium cryptographicum , 
scu dbacus numéral », dons la Uagia uiùrer- 
salis de Schott, part. IV, lib. 1. 

— Volygraphia seu artificivm in>:iuarum, qi:oci,m 
omnibus totins m iidi vopnlis polerit qu s cor- 
respêndere, Rome, .1665, in-folio, Amsterd., 
1680. Cet ouvrage curieux est divisé en trois* 
])arties ; la première offre une pasigraphie on 
écriture universelle que chacun peut lire dans 
>a langue, le principe d'oîi il part est un dic- 
tionnaire numéroté tel que Bêcher l'avait pro- 
posé sans l'exécuter; Kircber l'exécuta en 
ftetit sur cinq langues (le latin, le français, 
'allemand, l'italien, l'espagnol). Son vocabu- 
laire a environ 1,600 mots; les formes varia- 
bles des noms et des verbes sont exprimées 
par des signes de convention, la seconde par- 
lie donne une sténographie plus ingénieuse que 
celle dcTrilbèmc. La troisième partie concerne 
l'invention d'une boîte ou bureau stéganogra- 



BiBLiOG UAFH1£. ii7 

pliique pour écrire ou lire très-proiDptuiueut 
en chiffre que'conque. 

KlOuer (Lud/. Kryptograph k, txhrbch (1er Ge- 
hemschreibekunxt, Tubingue, 1809, iu-8, 470 j). 

KoRTiiM (C. A.\ Anf.imsgrûnde der En/z ffermytt- 
kunst deuUcher Zifferschr/ften, Duisburg, ilè-i, 
in-8, 144 pag. 

Lnnyage (Le) muet, on VArt de faire V amour sans 
se parler, sam écrire et sans se voir, Middcl- 
bourg, 4088, jn-l2. 

Latour (Charlotte de). Le Langage des fleurs, Pans, 
1820; 6' éd., 1845, in-12, 328 p. (L'auteur de cet 
ouvrage, en prose et en vers, est M. Aimé Martin.) 

Leibmtz. Uistoria el commendaiio imgusB ehariw- 
teristicsB uiLversatis, dans ses Œuvres pos- 
thumes, éditées par Rasbe, 144 pag. 

(Lbmahg). Die Kunsf der (ieheimschrelberei,... ini. 

G. L. Leipzig, 1797, in-4, 40 pag. 
Lennep (D. J. de). D.ssert. de M, Tiillio Tirone, 

Amsterdam, 1804, 
LiNDNER (Sam.). Elemenla artis dec'fralorite^ He- 

giomontani, 1770, in-8. 
Myslerienbuch aller und neuerZeiU oder Anleilung 

geheimer Schrifien iu leaén, Leipzig, 1797, in-8, 

115 pag. 
Netrin (J. p.). Princ'pes du droit des gens, 

(Brunswick, 1783, in-8), pag. 1€0 et suiv. 
Souveau Traité de diplomaiiqne, par deux religieux 

bénédictins iD. Toussaint etu. Tassin). l'aris, 

1750-65. 6 vol. in-4. Koj^. tom. 111, p. 499-622. 
NiETiiAMMER (J. M.). Ueber Pasigrapfiie und Ideo- 

graph e, Nurnberg, 1808, in 8. 
Souvelle Décoiiverie itune langue un'verselle pour 

1rs négociants, Paris, 1687, in-12. 



•àÊ^mmmi** 



i\H blbLlUUIsAl'llI t. 

OfiU8H0VMm,prxfecli8 arcinm /tmpertt or bus excr- 
citHHm, exploratoribuSyperegr.ni», imenlor bus, 
m Ulibus ttc omnis induslrix et lUterathras sIh- 
liioHiHy principibut majime Htili<<>mum pro ci- 
pharis liugua latina, graeca , ital ca et quavis 
nlia multt fort»' ter de-crtbentibus interpre fan- 
disque. (En latin et en italien, in-8, 44 Teuillets.) 
A la fin on lit: Impressum Romsc^anno MbXXVJ. 
Au second feuillet, l'auteur se donne le nom 
de Jacaues Silvestre, citoyen de Florence. 

OzAXAM (Jacques^. Récréations mathima iqnes et 
ph*jHiqne», 1778, 4 vol. in-8. On y trouve divcr 
ses méthodes de Sténographie. 

Pa.nc^rolli (Guidonis) Rerum memorabilium aive 
deperdilarum comment ar.us,\%^/mA. Il parle 
des chiffres, pag. Wi et suiv. 

Poliaeiscliri/t, geheime^des Grafen von Yergennes, 
17<J3, in>8, 46 pag. 

Porta jj. B.). De furlivis lilterarnm notis vulgo 
de ziferis libri quinque, Neapoli, 15b3, in-4. Au- 
tres éditions : Londres, 1591 , in-4. — Montbel- 
liard, 1593, in 8. — Naples, 1602, in-folio. — 
iitrasbourg, 1C03, in-8. 

— Magia ttrt/«fff/i«, Naples, 1d58. — Anvers, 1561. 
— Naples, 1589. — Levde, Iftii et 1651. Il est 
question, dans le livre XVl, de l'art de chiffrer. 

Pbasse {M. de). De ret cnlis cnjptoyraphUis, Lip* 
siaî, 1799, in-4, 14 pag. 

lUxHAY (0. A.). Art d'écrire aussi vite qu'on parle, 
Paris, 1783, in-12. L'original est en latin ; il 
parut dès 1678 et fut réimprimé avec uns ver- 
sion française (par A. D. G t. Paris, 1681. Depuis 
cette dernière aate, ce livre u été souvent réim- 
primé en France et à Vctranger, dans la fin du 
ui\-bcptièuic siècle. Le» anciuuneb cditiQii> 



BlBLlOGliAPfllË. 349 

■ 

poi'laient pour lilro: T, cheoyraph'e ou l'Ari 
(récrire, eic. On on eonnait wno. trndnction aUo- 
mandc, Leipzig, 1743, in-8. 

Sabpe, Prolegomena ad lachygraphiam romanam, 
Roslock, 1829, in-4. 

ScHMiPT(J. M.). VoUHtssndigea wig^en'chaftUches 
Gedanli''nverieichnh8ZHm Behvfnner aûgemei' 
nen Schrift praclic, Dillingen, 1807, in-8. 

— GrundsseUe fû' eine allgtmeine Schrifilehre , 
1816-1818, 2 vol. in-8. 

ScHOTT (Gaspard). Schola steganograph'ca inclasses 
orto dstribiila, Nurenil)erg, 1665, in-4 D'an- 
tres éditions de 1666 et de 1680 sont indiquées 
par les bibliographes. 

— Thaumaturgus phys'/ciis rea magia universul'is 
natttrœ et arlis, 1657-1G59, 4 vol. in-4; 1677. 
On trouve, dans le quatrième volume de cet 
ouvi'age curieux, des notions détaillées sur lc> 
divers moyens imaginés par les anciens et les 
modernes, pour se communiquer leurs pensées 
à l'aide de récriture secrète. 

Seleni, Gustavi (id est, Augusti, ducis Brunsvi- 
censis), Cryptotnenyt'cis el Crypographias V- 
hri IX, in quibus et piauissima SIeganographiœ 
J. Trilhemii enodatio Iradilur, itispersis nbiqur 
aiictoris el alionim non coutemnendis inreutis, 
Luneburgi, 1624, in-folio. 

SoLBRiT (Dav;. Rdtio :cnbendi per zifra'', 1721^ 
lu -8. 

— AUgemeine Schrift oder Art durch Zifftrn su 
schreiben, Coburg, 1756, in-8. C'est la traduc- 
tion de l'ouvrage latin précédent. 

SlegaiWfiraphia recens aetec'.a, Ulm, 1764, in-8, 
97 p. ÏMalgré son titre latin, cet ouvrage est en 
plleinand (seiT)l»la|)lo cjrconsljinrp n'est pas jarp 



250 BIBLIOGRAPHIE. 

pour d'anciens écrils publiés au delà du UhinK 
L'auteur a gardé l'anonyme, mais il a signé la 
préface des lettres C. W. P. 

Stein {.\.),Ueber bchriflf-prache und Poiigrapkie, 
Mûnchen, 1809, in-«. 

Stieler iC von). Deulsche Secrétariat HkunaL Nu- 
remberg, 1678, m-J^ Voir lom. 1, pag. 547-555. 

Stouexbauch. Histoire ubrégée de la Cryflograph e, 
11 s'en trouve un extrait dans les Mémoires de 
l'Académie de Berlin, t. 1, 1745, p. 105 et suiv. 

ToD (Al.>. The oUve-leafe or an mwersalA.B.C, 
London, 1603, in-8. 

Trithbmii (J.) Polygraphise libri VI, Oppenheim, 
lhl8, in-folio. — Francof., 1550.— Colon., 1564. 
— Argent., 1600 et 1613.— Colon., 1671. 

— S/<'.(7MW0tfftfpA'ff, Francof. ,1606.— Darmst.,lG06, 
Francof., 1608.— Darmst., ^ 621. — Colon., 1635. 

— La Polyyravhie et universelle écriture de Tri- 
thème, traduit du latin par Gabriel deCoUangc *, 
Paris, 1561, 16tl, 1625, in-8. 

Voici les titres de deuï ouvrages composes 
dans le but de défendre la mémoire deTritnème 
contre l'accusation de magie dirigée contre lui : 
StenographiSB nec non claïuculsB^Salomonis ger~ 

wflMÎ, /. Trithenni, geniiinn declaralio, auctore 

J. Caramuele, Colon., 1654, in-4. 
J. Thithemii S enogiaphia vmUicata et illnstrata, 

auctore W. E. Heidel, Mayence, 1676, in-4. Une 

édilion de Nuremberg, 17-21, in-4, est citée. 
Vken (M.). Sleganometrojrjp'iin, sive artificnm 

* I.a triste destinée de Collange mérite (](u"on pii fasse 
mention. Il était valet de cliambre de Charles IX, et, 
quoique catholique zélé, il fut une des victimes de la 
SHint-Barlhélerai, succombant snns doute a quelques 
inimitiés personnelles. 



BIBLIOGRAPHIR. 251 

novum et inauditum, Francof., 1751 , in-8, 528 n. 
Il en existe une traduction allemande, Ulm, 1759. 

URQrHAiir (Ihomas). Logopandecteinio», or au in- 
trod'C'ion lo the universal language, London, 
1653, in-ii. 

Vater (J. s.). Pasigraphie und Antipasi graphie... 
OH sur la découverte récente d'une langue uni- 
verselle pouvant servir à tous les peuples, Leii>- 
zig, 1799, in-12, 268 pag. 

Wallis (J.). Opéra miscellanea, Oxoniae, 1699, 
in-folio. Dans son traite De combinationbus et 
allernationihux ce célèbre mathématicien donne 
des exemples de déchiffrement, sans expliquer 
toutefois les méthodes dont il fait usage. ' 

>YiLD.oGEL (Ch.). Dtss. de scripturis terribiUùns, 
Francof., 1719, in-4. 

WiLKiNs (évéque de Chester). Mercure ou le Mes- 
sager secret el p ompt oU l'on montre comment 
on peut communiquer vite et sûrement ces pen- 
f ées à un ami éloigné, Londres, 1641, in-4. (L'ou- 
vrage est en anglais.) 

— Essay towarils a real charader and a philoso^ 
phical language, Londres, 1668 « in-folio. Un 
extrait de cet ouvrage, devenu fort rare, se 
trouve daus les Transactions philosophiques, 
n' 35. 

WoLKE C. H.). Erklxrung wie wechselseitige Ge- 
dankenmittheilunen aller cuUtvirten Vœlker des 
Erdkre ses, o:ler die Pasipkrasie môglich und 
aus^blich sey , ohne Erlernung irgend einer 
neuen besondeni, oder einer alhjemeinen Wurt- 
srhrifi oder Zeiclienspradie, hessau, 1797. 

FIN. 



■fc. ■ . i-Vi»» > — ■! - I -S^— lÉiC-^W^— MM 



TABLE DfiS CHAPITRES. 



Chapitre 1". Définition de la Cryptographie, 

son origine; notions historiques. . . i 
Chap. 11. Auteurs qui ont écrit sur la Cryp> 

tographie 55 

CiiAP. 111. Wègles et procédés de Cryptogra- 
phie ÎM 

CnAp. IV. Des diverses sortes d'écritures et 
des différents langages de convention 
qui se rattachent à In correspondance 

occulte • 136 

Chai-. V. Du rôle de la Cryp:ographie dans 

la littérature 18G 

CiiAP. VI. Des livres à clef 202 

CiiAP. Ml. Du déchiflrement 208 

Chap. VIII. Des écritures occultes .... 225 
Dibliographio 242